Nécessité de produire le procès-verbal de constat de travail dissimulé au cours du procès civil du redressement

Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 8 avril 2021, 20-13.754, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 2

N° de pourvoi : 20-13.754
ECLI:FR:CCASS:2021:C200311
Non publié au bulletin
Solution : Cassation

Audience publique du jeudi 08 avril 2021
Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles, du 12 décembre 2019

Président
M. Pireyre (président)
Avocat(s)
SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Waquet, Farge et Hazan
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION


Audience publique du 8 avril 2021

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 311 F-D

Pourvoi n° P 20-13.754

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 AVRIL 2021

La société Aux viandes de Sarcelles, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° P 20-13.754 contre l’arrêt rendu le 12 décembre 2019 par la cour d’appel de Versailles (5e chambre), dans le litige l’opposant à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) d’Île-de-France, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Aux viandes de Sarcelles, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales d’Île-de-France, après débats en l’audience publique du 3 mars 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 12 décembre 2019), la société « Aux viandes de Sarcelles » (la société), gérée par M. E... (le gérant), a fait l’objet le 28 avril 2015 d’un contrôle inopiné des services de police qui a donné lieu à une procédure pénale pour travail dissimulé, communiquée au parquet du tribunal de grande instance de Pontoise et à l’URSSAF d’Île-de-France (l’URSSAF). L’URSSAF a notifié le 4 juin 2015 à la société une lettre d’observations puis, le 23 septembre 2015, une mise en demeure pour obtenir le paiement de diverses sommes au titre d’un redressement sur les années 2013 et 2014. Par jugement du 9 mars 2016 devenu définitif, le tribunal correctionnel de Pontoise a condamné le gérant pour emploi de deux salariés non munis d’une autorisation de travail et travail dissimulé.La société a saisi une juridiction de sécurité sociale en annulation du redressement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

2. La société fait grief à l’arrêt attaqué de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a confirmé la décision de la commission de recours amiable de l’URSSAF du 27 janvier 2016 et l’a condamnée à verser à l’URSSAF, conformément au redressement dont elle avait fait l’objet, les sommes de 65 130 euros à titre de cotisations, 12 680 euros à titre de majorations de redressement et 6 947 euros à titre de majoration de retard pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer le principe de la contradiction et ne peut retenir dans sa décision les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement ; que pour dire que la société avait été l’auteur d’un délit de travail dissimulé pour les années 2013 et 2014 et que sa comptabilité n’était pas conforme justifiant le redressement opéré par l’URSSAF, la cour d’appel, qui s’est fondée sur le contenu des procès-verbaux d’audition du gérant de la société et de ses salariés, ainsi que sur le procès-verbal de délit de travail dissimulé dressé en 2015, lesquels n’étaient pas produits aux débats devant la cour d’appel, n’a pas mis la société en mesure de débattre contradictoirement de leur contenu et a violé l’article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 16 du code de procédure civile :

3. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

4. Pour décider que la procédure de contrôle effectuée par l’URSSAF avait été respectée et que l’ensemble des éléments retenus par celle-ci pour proposer un redressement avait été contradictoirement débattu, la cour d’appel relève que la société ne peut pas soutenir n’avoir jamais eu connaissance du procès-verbal de police sur lequel s’est fondée l’URSSAF pour retenir l’infraction de travail dissimulé, puisque la lettre d’observations mentionne précisément, sous l’intitulé « liste des documents consultés pour ce compte » les documents consultés et débattus lors de la phase contradictoire de la procédure de redressement, à savoir le « fichier des déclarations préalables à l’embauche, procès-verbal de police n° 2015/164 » et que, de surcroît, dans le corps même de la lettre d’observations, l’URSSAF rappelait que « lors de ce contrôle, deux personnes en situation de travail n’avaient pas fait l’objet de déclaration préalable à l’embauche : il s’agit de MM. S. Q... et B. N.... Ces faits ont conduit les services de police à dresser un procès-verbal de travail dissimulé à votre encontre (PV N°2015/164). »

5. La cour d’appel relève encore que la procédure pénale a fait l’objet d’une communication lors de la procédure de contrôle, puis devant le tribunal ; qu’en réponse aux observations de la société, l’URSSAF a adressé à cette dernière, le 27 août 2015, un courrier reprenant intégralement le contenu de l’audition du gérant devant les services de police, en rappelant sa date et en soulignant les incohérences des déclarations effectuées avec les pièces produites à l’inspecteur, à savoir les plannings, les liasses fiscales et les relevés de comptes bancaires ; que la lettre d’observations reprend les déclarations du gérant et précise l’objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de fin de contrôle ; que l’audition du gérant devant les services de police a été effectuée, non pas au moment du contrôle, puisqu’il était absent, mais sur convocation et qu’elle s’est effectuée de surcroît en présence de son conseil et après avoir donné son consentement à l’audition ; que la société était donc parfaitement informée du contenu de l’audition sur laquelle s’est fondée l’URSSAF pour procéder au redressement, ce qui explique que cette contestation n’a jamais été élevée ni devant la commission de recours amiable ni devant le tribunal des affaires de sécurité sociale ;

6. En statuant ainsi, sur la base de pièces qui n’étaient pas produites aux débats devant elle, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 décembre 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Versailles autrement composée ;

Condamne l’URSSAF d’Île-de-France aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l’URSSAF d’Île-de-France et la condamne à payer à la société Aux viandes de Sarcelles la somme de 3 000 euors ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille vingt et un. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Aux viandes de Sarcelles

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu’il avait confirmé la décision de la commission de recours amiable de l’Urssaf Ile-de-France du 27 janvier 2016 et condamné la société Aux Viandes de Sarcelles à verser à l’Urssaf Ile-de-France conformément au redressement dont elle avait été l’objet, les sommes de 65.130 euros à titre de cotisations, 12.680 euros à titre de majorations de redressement et 6.947 euros à titre de majoration de retard pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014 ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le travail dissimulé :

En l’espèce, il résulte des constatations effectuées par les services de police lors de leur contrôle inopiné au sein de la boucherie le 28 avril 2015, que deux personnes étaient en tenue de travail, affairées à préparer de la viande et la mettre sur un étal tandis qu’une troisième s’occupait de remplir une rôtissoire. Aucune n’avait fait l’objet d’une déclaration préalable à l’embauche, deux n’apparaissaient pas sur le registre unique du personnel et une se trouvait en situation irrégulière sur le sol français. Entendu ultérieurement M. E... indiquait d’abord que cinq personnes, au moins, étaient nécessaires pour faire fonctionner la boucherie avant de modifier sa version et de soutenir que deux salariés étaient suffisants. Si, comme le relève la Société, sa condamnation pénale pour travail dissimulé porte sur une période hors contrôle, c’est-à-dire l’année 2015, et qu’il ne peut donc être tiré de cette condamnation une présomption de travail dissimulé pour les années 2013 et 2014, il n’en demeure pas moins que c’est au regard de la situation constatée que l’Urssaf a analysé le fonctionnement de la boucherie pour les deux années précédentes.
Ainsi, au regard des déclarations du gérant, de l’amplitude horaire de la boucherie et du chiffre d’affaires réalisé en 2013 et 2014, l’Urssaf démontre que la masse salariale a été sous-estimée, et la Société n’apporte aucun élément probant en sens contraire. En conséquence la cour estime que l’Urssaf démontre l’existence d’un travail dissimulé. Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur le redressement :

Au soutien de son appel, la Société relève que pour mettre en place la procédure de taxation forfaitaire l’Urssaf doit démontrer que la comptabilité de la SARL est irrégulière ou incomplète, ce qu’elle ne fait pas en l’espèce.
L’Urssaf rétorque que la taxation a été établie au regard des déclarations du gérant parce que les documents remis par la Société à l’inspecteur ne permettaient pas de les tenir pour conformes. Sur ce, aux termes de l’article R. 242-5 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du décret n°2009-1596 du 18 décembre 2009 applicable au litige. Lorsque la comptabilité d’un employeur ne permet pas d’établir le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations dues, le montant des cotisations est fixé forfaitairement par l’organisme chargé du recouvrement. Ce forfait est établi compte tenu des conventions collectives en vigueur ou à défaut, des salaires pratiqués dans la profession ou la région considérée. La durée de l’emploi est déterminée d’après les déclarations des intéressés ou par tout autre moyen de preuve. Lorsque l’employeur ou le travailleur indépendant ne met pas à disposition les documents ou justificatifs nécessaires à la réalisation du contrôle engagé en application de l’article L. 243-7 ou lorsque leur présentation n’en permet pas l’exploitation, le montant des cotisations est fixé forfaitairement par l’organisme chargé du recouvrement, dans les conditions prévues au présent article. En cas de carence de l’organisme créancier, le forfait est établi par le responsable du service mentionné à l’article R. 155-1. Lorsque l’employeur n’a pas versé dans les délais prescrits par les articles R. 243-6, R. 243-7, R. 243-9 et R. 243-22, les cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, l’organisme créancier peut fixer, à titre provisionnel, le montant desdites cotisations en fonction des versements effectués au titre des mois ou trimestres antérieurs. Cette évaluation doit être notifiée à l’employeur par une mise en demeure adressée par lettre recommandée, avec accusé de réception dans les conditions de l’article L. 244-2. (Souligné par la cour). Pour sa part, l’article 9 du code de procédure civile se lit ainsi : il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l’espèce, les déclarations contradictoires du gérant tant sur le nombre de salariés employés que sur l’organisation du temps de travail ainsi que le manque de cohérence entre ces déclarations et le chiffre d’affaires déclaré par la Société ne permettent pas de considérer la comptabilité sincère et de connaître avec exactitude le chiffre exact des rémunérations servant de base au calcul des cotisations dues. L’audition de M. E... par les services de police a ainsi fait apparaître des discordances entre les salaires réellement versés aux salariés et ceux déclarés auprès de l’Urssaf. A cet égard, la Société ne peut utilement prétendre que son gérant et les salariés n’ont été interrogés que sur le fonctionnement de la boucherie au cours de l’année 2015 puisque la lecture des procès-verbaux enseigne qu’ils ont répondu spécifiquement sur les années 2013 et 2014, pour lesquelles le gérant a détaillé les horaires de travail de ses employés, a produit des plannings ainsi qu’un contrat de travail signé en juin 2013. De même, le nombre de salariés déclarés, qui travaillent en outre à temps partiel, ne permet pas, à défaut d’éléments plus précis, d’expliquer l’important du chiffre d’affaires réalisé au cours des années 2013 et 2014. Des contradictions apparaissent également entre les informations figurant sur les plannings fournis à l’Urssaf et les déclarations du gérant devant les services de police sur les horaires d’ouverture du commerce, d’autant plus que celles-ci ont évolué au cours de son audition. Ainsi, si les plannings des salariés produits pour les années 2013 et 2014 mentionnent une amplitude horaire journalière :
 du mardi au samedi : de 9 heures à 13 heures 30 et de 15 heures 30 à 19 heures,
 le lundi après-midi de 15 heures 30 à 19 heures,
 le dimanche matin de 9 heures à 13 heures 30,
soit une amplitude de 48 heures, aucun élément ne permet de connaître la date à laquelle ils ont été établis et donc s’ils étaient effectivement en vigueur au cours des années litigieuses, d’autant plus qu’au moment du contrôle, le gérant n’avait pas été en mesure de les produire. Aucun élément ne vient en outre confirmer l’effectivité de ces mentions lesquelles contredisent les premières déclarations du gérant. Par ailleurs, les DPAE concernant des salariés travaillant dans l’entreprise en 2013 et 2014 ne sont toujours pas produites et les DADS ne portent pas sur l’intégralité des périodes concernées. En l’absence de production des contrats de travail des salariés concernés, la durée et la répartition de leur temps de travail demeurent inconnues et ne peuvent être corrélées avec les fiches de paie versées aux débats. Ce faisant, le montant du redressement a été effectué au regard des déclarations faites par M. E... le 13 mai 2015 selon lesquelles deux salariés, outre lui-même, étaient indispensables à la bonne marche de l’entreprise, pour une durée journalière de travail de 10 heures 30 (ouverture reconnue de 8 heures à 19 heures 30). L’Urssaf a déduit de cette durée le temps de la pause déjeuné soit une heure. Ayant également déclaré que le commerce était ouvert sept jours sur sept, elle a retenu 21 heures d’activité salariée par jour soit 147 heures par semaine. En considérant qu’un mois comporte 4,33 semaines, la durée de l’emploi salarié annuel minimum s’élevait à 147 heures X 4,33 x 12 mois soit 7 638 heures annuelles pour les années 2013 et 2014.
L’examen des liasses fiscales effectué par l’Urssaf démontre une activité stable entre l’année 2013 et l’année 2014, de sorte que l’amplitude horaire retenue pour la première période n’avait pas à être revue pour la seconde.
Enfin, l’inspecteur a relevé, sans être contesté sur ce point, qu’au cours de l’année 2013, de nombreux chèques et virements d’un montant de 2 000 euros avaient été réalisés au profit du gérant alors qu’aucune déclaration de rémunération n’avait été faite auprès de l’Urssaf. Ces rémunérations ne seront déclarées qu’à compter du premier trimestre 2014.
Aucune des explications fournies par la Société ou des pièces produites ne permet de remettre en cause ces éléments de calcul.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, la cour estime que la Société n’a pas démontré le caractère excessif du redressement et c’est donc par une exacte appréciation des faits de l’espèce que l’Urssaf a procédé à la reconstitution de la masse salariale à partir du différentiel entre les heures réellement effectuées et celles qui lui avaient été déclarées en appliquant le taux du SMIC horaire en vigueur puis a procédé à la réintégration dans l’assiette des cotisations de 55 108 euros au titre de l’année 2013 et 38 708 euros au titre de l’année 2014 amenant à un redressement de 29 737 euros au titre de l’année 2013 et 20 983 euros au titre de l’année 2014 soit un montant total de 50 720 euros.
La constatation d’un travail dissimulé entraînant, par application des dispositions des articles L.133-4-2 et L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale, l’annulation des réductions dites « Fillon », c’est à juste titre que l’Urssaf a sollicité, pour la période contrôlée, paiement de la somme de 14 410 euros de cotisations et a appliqué une majoration complémentaire de 12 680 euros.
Il convient en conséquence de confirmer la décision du tribunal. » ;

1°) ALORS QU’il incombe à l’Urssaf qui se prévaut de l’existence d’un délit de travail dissimulé à l’origine du redressement opéré d’en apporter la preuve pour la période ayant fait l’objet du redressement ; qu’en jugeant que l’Urssaf pouvait se prévaloir, pour justifier la procédure de redressement de la société Aux Viandes de Sarcelles pour les années 2013 et 2014, du procès-verbal ayant suivi le contrôle de police inopiné de la société le 28 avril 2015 et qui a abouti au terme de la procédure pénale, à une condamnation pour travail dissimulé en 2015, au motif qu’elle aurait pu extrapoler les faits constatés en 2015 pour les appliquer automatiquement aux années antérieures, la cour d’appel qui a admis de retenir l’existence d’un travail dissimulé sur les années 2013 et 2014 d’activité de la société Aux Viandes Sarcelles par simple présomption, en dépit de l’absence de tout élément de preuve produit aux débats par l’Urssaf Ile-de-France de nature à établir un quelconque fait matériel d’infraction pour la période correspondant au redressement, a violé les articles L. 8221-3, L. 8221-5 du code du travail, L. 144-2 et R. 143-59 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige, l’article 9 du code de procédure civile et l’article 1353 du code civil.

2°) ALORS QU’en jugeant que le délit de travail dissimulé et le redressement par taxation d’office étaient justifiés au vu des informations fournies par le procès-verbal de travail dissimulé et les procès-verbaux d’audition de M. E..., le gérant de la société Aux Viandes de Sarcelles, et de ses salariés, la cour d’appel qui a procédé par voie de simple affirmation en évoquant le contenu de pièces qui n’étaient pas produites à la procédure et sur les simples dires de l’Urssaf quant à leur contenu, a violé l’article 455 du code de procédure civile.

3°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer le principe de la contradiction et ne peut retenir dans sa décision les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement ; que pour dire que la société avait été l’auteur d’un délit de travail dissimulé pour les années 2013 et 2014 et que sa comptabilité n’était pas conforme justifiant le redressement opéré par l’Urssaf, la cour d’appel qui s’est fondée sur le contenu des procès-verbaux d’audition de M. E..., gérant de la société, et de ses salariés ainsi que sur le procès-verbal de délit de travail dissimulé dressé en 2015, lesquels n’étaient pas produits aux débats devant la Cour d’appel, n’a pas mis la société en mesure de débattre contradictoirement de leur contenu et a violé l’article 16 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2021:C200311