Transport aérien passagers et frêt

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 4 juin 2019

N° de pourvoi : 18-83789

ECLI:FR:CCASS:2019:CR00916

Non publié au bulletin

Cassation partielle

M. Soulard (président), président

SCP de Nervo et Poupet, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

 M. S... F... dit F...,

contre l’arrêt de la cour d’appel de CAYENNE, chambre correctionnelle, en date du 19 avril 2018, qui, pour travail dissimulé et infractions au code de l’aviation civile, l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis et à 15 000 euros d’amende ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 9 avril 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Bray ;

Sur le rapport de M. le conseiller Ricard, les observations de la société civile professionnelle de NERVO et POUPET, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général LEMOINE ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme et des pièces de procédure qu’à la suite du recueil d’observations de la direction générale de l’aviation civile, l’enquête menée sur les activités de transport public de voyageurs et de fret par voie aérienne effectuées en Guyanne, ainsi que depuis ce département vers les pays limitrophes, par M. F..., a révélé que ce dernier avait exercé lesdites activités depuis l’année 2004 , soit en son nom ou sous le couvert de l’enseigne Prest air, soit en ayant recours aux sociétés Guyane aéro services (GAS) et Air amazonie, dont il a été le gérant de fait, et ce, sans avoir procédé aux déclarations nécessaires aux organismes sociaux et fiscaux pour ces opérations d’affrètement réalisées sous couvert de l’enseigne Prest’air, et sans avoir bénéficié ni d’un certificat de transporteur aérien, ni d’une licence d’exploitation de transporteur aérien pour chacun des trois aéronefs utilisés, sans avoir obtenu d’autorisation préalable pour le transport de fret postal et sans s’être conformé aux dispositions réglementaires concernant l’entretien et la maintenance de ces avions, ainsi que leurs conditions de vol pour l’un d’entre eux ; qu’à l’issue de l’information judiciaire, l’intéressé a été renvoyé devant le tribunal correctionnel des chefs susvisés ainsi que pour abus de biens sociaux et complicité d’exploitation d’une mine sans titre ; que les premiers juges ont relaxé le prévenu de ce dernier chef et l’ont déclaré coupable des autres infractions ; que M. F..., de même que le procureur de la République ont interjeté appel de ce jugement ;

En cet état ;

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche ;

Vu l’article 567-1-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que le grief n’est pas de nature à être admis ;

Sur le premier moyen, en sa première branche, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8224-1, L. 8224-3 et L. 8224-4 du code du travail, L.150-1, L. 150-2, L. 321-7 et L.330-1 du code de l’aviation civile, préliminaire, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. F... coupable des faits d’exercice illégal de transport aérien public et transport aérien sans licence d’exploitation ni certificat, transport aérien illicite de fret postal, travail dissimulé et infraction à la réglementation du transport aérien ;

”aux motifs que, sur l’exercice illégal de transport aérien public et transport aérien sans licence d’exploitation ni certificat, du 5 juillet 2003 au 13 avril 2007, la Direction générale de l’aviation civile, dans son avis du 28 décembre 2009 relevait que M. F... dit F..., agissant en qualité d’exploitant de fait des sociétés Gas et Air amazonie, a acheminé des passagers et du fret, à titre onéreux, en utilisant les aéronefs de ces deux sociétés, au départ de Cayenne Rochambeau, à destination d’aéroports publics et privés en Guyane et vers les pays limitrophes ; a) - qu’il a agi dans le cadre d’une activité d’affrètement au sens de l’article L. 323-2 du code de l’aviation civile, soumise aux lois et règlements applicables au transport aérien public ; qu’en l’espèce, selon la DGAC, “aucune des prestations fournies par M. F... dit F... ne répondent aux caractéristiques essentielles de la location coque-nue, à savoir la fourniture séparée d’un avion loué « coquenue » (sans pilote) et d’un pilote, par deux personnes morales ou physiques distinctes, sans lien juridique, personnel ou familial entre elles, et l’établissement de facturations distinctes par deux prestataires différents, sans lien d’aucune sorte ; qu’à défaut, la jurisprudence requalifie la prestation de transport effectuée en opération d’affrètement ; qu’il existe ainsi une interdépendance permanente et exclusive entre les entités commerciales, propriétaires des aéronefs et exploitantes, Gas et Air amazonie, et le pilote, prestataire M. F... dit F... et sa société « Prest’air » ; qu’en effet, le lieu de travail pour les trois sociétés est identique, F... dit F... , travailleur indépendant, utilise leurs actifs, gère l’activité aéronautique de l’ensemble des structures, et donc, de par son rôle de conseiller commercial et technique, « homme indispensable », il apparaît comme le gérant de fait et le salarié de M. L... gérant de droit de ces deux sociétés ; qu’il n’est donc pas possible de considérer que les sociétés Gas et Air amazonie ont loué seulement les aéronefs à des clients qui auraient eu recours ensuite, à M. F... dit F... , pilote travailleur indépendant ; qu’en fait, conclut la DGAC, “il s’agit d’un simple habillage n’ayant pour seul objectif que de faire croire au caractère licite de l’opération d’affrètement” ; qu’en outre, même la qualité revendiquée de « travailleur indépendant » de M. F... dit F... est hautement contestable ; qu’il n’exerce pas son activité en dehors de tous liens avec le ou les donneurs d’ordre, puisqu’il est, en fait, employé par les sociétés Gas puis Air amazonie, qu’il n’assume pas les charges sociales de sa société Prest’air, et qu’enfin, il n’a pas d’autonomie professionnelle, ne possède pas son propre instrument de travail, caractéristique essentielle de la qualité de pilote travailleur indépendant, les appareils qu’il utilise appartenant aux sociétés Gas et Air amazonie ; qu’enfin, toujours selon la DGAC, le fait que les prestations de pilotage de Prest’air aient été comptabilisées distinctement de celles relatives à la mise à disposition du Pilatus et des deux Cessna doit s’analyser comme un simple artifice n’ayant eu pour seul but de faire croire à la légalité de l’activité aérienne réalisée ; qu’un tel montage juridique a été condamné par les tribunaux ; que deux autres éléments démontrent que l’activité de M. F... est celle de transport aérien public au sens de l’article L. 330-1 du code de l’aviation civile ; qu’il s’agit d’une part, de l’engagement de ce dernier, à fournir pour des vols au bénéfice du rectorat, des billets de transport ; qu’or, la vente de billets de transport matérialise et caractérise le contrat de transport de voyageurs ou de marchandises entre un transporteur et son client ; que d’autre part, M. F... dit F... reconnaît avoir reçu des sommes pour des transports de personnes non liées par un contrat de location coque-nue qu’il s’agit de transport sans facturation au profit d’orpailleurs et commerçants, « M... et E... » ; que ces transports ont été effectués à l’occasion de missions commanditées, facturées et payées par EDF/Norelec/Cegelec ; que ce type d’opérations a représenté pour M. F... dit F... , pour les années 2004 à 2006, entre 11 et 23 % du chiffre d’affaire annuel de sa société Prest’air ; que ce type de transport contre une somme d’argent relève, sans aucun doute, d’une opération de transport aérien public au sens de l’article L. 330-1 du code de l’aviation civile ; b) - que M. F... dit F... n’a pas été en mesure de justifier d’un certificat de transporteur aérien et d’une licence d’exploitation de transporteur aérien ; que les activités de transport aérien public ne peuvent en effet être effectuées que par des transporteurs titulaires d’un certificat de transporteur aérien, en vertu des articles L. 330-1, R. 133-1-1-4° et R. 330-1-1- du code de l’aviation civile ; qu’or, selon la DGAC, « les trois aéronefs : le Pilatus F-OHQ0, le Cessna F- 0GVI, le Cessna N 261 JB, ont été exploités sans certificat de transporteur aérien, de septembre 2003 au 14 janvier 2005 pour le premier, de février 2003 jusqu’au 26 janvier 2006 pour le deuxième et depuis le 27 janvier 2006 pour le troisième », exclusivement par M. F... dit F..., pour un total de 1 686 vols, du 1er janvier 2004 au 29 septembre 2006 ; que lors de sa première comparution devant le juge d’instruction, M. F... dit F... a reconnu que les sociétés Gas et Air amazonie, dont il a été établi qu’il était le gérant de fait, n’étaient pas titulaires d’un certificat de transporteur aérien ; sur le transport aérien illicite de fret postal, lors de sa première comparution devant le juge d’instruction, M. F... dit F... reconnaissait avoir effectué, le février 2007, à la demande de la poste de Guyane, un transport à titre onéreux de sacs postaux de Cayenne Rochambeau à destination de Camopi ; que le transport d’objet postaux et de correspondances postales par aéronef nécessite une autorisation préalable, en vertu des articles L. 330-1 et R. 133-6 du code de l’aviation civile ; qu’en effet, la licence d’exploitation de transporteur aérien est délivrée pour le transport de passaoers de fret ou de courrier ; qu’or, ni les sociétés Gas et Air amazonie, ni Prest’air - ni M. F... dit F... ne bénéficiaient d’une telle autorisation ; que le pilotage d’aéronefs visée par les articles L. 150.1, L. 150.2 et L. 330.1 du code de l’aviation civile : il ressortait de l’enquête initiale que les faits reprochés étaient en relation avec : - l’entretien et la maintenance du Cessna américain ; - l’utilisation, en toute connaissance de cause, d’un aéronef dans des conditions de sécurité dégradées (vol avec un pneu défaillant et une fuite d’hydraulique à une jambe du train d’atterrissage) ; que selon la DGAC, “en de telles circonstances, la sécurité des passagers et des tiers survolés n’est plus assurée ; que le certificat de navigabilité n’est donc plus valide et l’aéronef n’est plus apte à voler” ; - l’utilisation d’un aéronef étranger et monomoteur ; que M. F... dit F..., qui était l’unique pilote du Cessna 206 N261JB de la SAS Air amazonie, entre le 23 mai 2006 et le 25 octobre 2006, pour 330 vols, a sous-traité la maintenance et l’entretien de l’appareil à un mécanicien non-agréé par les autorités aéronautiques américaines, ce qui est contraire à la réglementation prévue par la Convention internationale de Chicago du 7 décembre 1944 et invalide le certificat de navigabilité ; que par ailleurs, en Guyane, l’utilisation d’un appareil monomoteur pour effectuer du transport aérien public est interdite, ce type de transport ne peut être réalisé qu’au moyen d’un avion bimoteur ; qu’enfin, le transport aérien public ne peut être effectué qu’au moyen d’aéronef inscrit sur le registre français d’immatriculation et entretenu par les ateliers de maintenance de la société exploitante, conformément à la réglementation européenne et nationale de l’arrêté du 12 mai 1997 modifié, relatif aux conditions techniques d’exploitation d’avion par une entreprise de transport aérien public dit OPS1 ; qu’à défaut, le certificat de navigabilité et le certificat de transporteur aérien perdent leur validité ; qu’or, le Cessna N 261 JB n’a jamais fait l’objet d’une immatriculation française ; qu’il résulte de ce qui précède que les infractions de travail dissimulé et relatives à la réglementation du transport aérien sont constituées ;

”et aux motifs éventuellement adoptés qu’il doit être relevé que s’agissant de la qualité de gérant de fait des sociétés Gas et Air amazonie de M. F... dit F..., l’enquête et l’information subséquente ont permis d’établir que ce dernier exerçait de fait la direction, l’administration ou la gestion desdites sociétés sous le couvert, ou au lieu et place de leurs représentants légaux ; qu’en effet, M. F... dit F..., qui disposait des clés du regard où étaient entreposés les avions propriété de la société Gas puis de la société SAS Air amazonie, avait toutes libertés de se rendre dans les locaux de ces sociétés dont il connaissait parfaitement le fonctionnement administratif et commercial, au contraire de M. L... ; il prenait directement rendez-vous avec les clients tant pour la prestation de service de pilotage, que pour la location de l’avion lui-même ; qu’en réalité, M. F... dit F... qui avait à sa disposition deux téléphones dont la charge était assumée par lesdites sociétés, s’il faisait facturer par la société le coût de la location de l’avion, quel qu’il soit, ne transmettait les éléments nécessaires à la secrétaire, Mme R..., qu’a posteriori : c’est lui qui prenait la commande des prestations, fixait les horaires ; que de même il doit être souligné qu’il utilisait exclusivement les avions appartenant aux sociétés Gas et Air amazonie pour assurer sa prestation de pilote et était le seul à gérer l’entretien des avions, prétendant avoir seule compétence pour ce faire ; qu’il ressort de l’enquête que M. F... dit F... était le pilote exclusif des deux Cessna pendant les années 2006 et 2007 ; que d’ailleurs lors de son audition M. L... avait expliqué qu’il avait créé la société Air amazonie afin de préserver l’emploi de Mme R... et l’activité de M. F... dit F..., et s’était révélé incapable de communiquer les tarifs des prestations, le chiffre d’affaires ou encore la nature du contrat qui aurait pu lier la société Air amazonie à la société Prest’air ; que la DGAC a précisément exposé dans son avis que la caractéristique principale de la location « coque-nue » est la fourniture séparée d’un avion loué « coque-nue » et d’un pilote, par deux entités distinctes, personne morale ou physique, sans liens juridiques, personnel ou familial ; qu’en l’espèce, M. F... dit F... utilisait les actifs des sociétés, spécialement ceux de la société Air amazonie, leurs structures, leurs avions, gérait l’activité aéronautique et était ainsi, à la fois gérant de fait et salarié de la société Amazonie ; que M. F... dit F..., en acheminant des passagers à titre onéreux et en effectuant du fret à titre onéreux, sans licence d’exploitation ni certificat de transporteur aérien, a effectué des activités d’affrètement et de transports illicites de passagers et de marchandises ; que de même, il a reconnu que les sociétés Gas et Air amazonie n’étaient pas davantage titulaires d’un certificat de transporteur aérien ; quoiqu’il s’en défende à l’audience, M. F... dit F... a reconnu devant le magistrat Instructeur avoir effectué un transport à titre onéreux de sacs postaux de Cayenne-Rochambeau à Camopi, sans être lui même titulaire d’une autorisation préalable, pas plus que ne l’étaient les sociétés Gas et Air amazonie ; que le Cessna N 261 JB, appartenant à la société Air amazonie et piloté exclusivement par M. F... dit F..., n’a jamais fait l’objet d’une immatriculation française ; que par ailleurs, il avait sous-traité l’entretien et la maintenance de cet appareil américain, par un mécanicien non agréé par les instances aéronautiques américaines, en contravention avec la réglementation issue de la Convention de Chicago du 7 décembre 1944, le certificat de navigabilité s’en trouvant ainsi invalidé ; que M. F... dit F... a par ailleurs, reconnu qu’il n’avait pas effectué l’ensemble des déclarations fiscales ou sociales auxquelles il était astreint pendant plusieurs années (janvier 2004 à avril 2007) ;

”1°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; qu’en déclarant M. F... dit F... coupable de travail dissimulé, sans mieux s’expliquer sur les conclusions du prévenu, qui soutenait qu’il ne pouvait être contesté que l’entreprise unipersonnelle de M. F... dit F... était régulièrement déclarée et immatriculée, titulaire d’un numéro Siret d’ailleurs porté sur les factures émises, qu’il n’existait aucun salarié dans l’entreprise et que ne pouvait être invoquée l’absence de déclaration aux organismes de protection sociale, l’activité de travailleur indépendant de M. F... dit F... ayant été prise régulièrement en compte, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision ;

Attendu que, pour confirmer le jugement ayant déclaré M. F..., coupable du chef de travail dissimulé, l’arrêt relève, notamment, que ce dernier, en sa qualité de pilote indépendant, agissant en nom propre ou sous couvert de l’enseigne Prest’air, n’a déclaré aucun salarié et n’a plus fait de déclaration à l’Association pour l’emploi dans l’industrie et le commerce (ASSEDIC) entre 2003 et 2006, en dépit d’une mise en demeure délivrée en décembre 2005 ; que les juges ajoutent que, tout en ayant réalisé des transports aériens publics, de personnes et de fret avec plusieurs aéronefs, le prévenu n’a pas effectué de déclaration fiscale depuis l’année 2004 malgré l’importance du chiffre d’affaires réalisé chaque année résultant de cette activité ;

Attendu qu’en statuant ainsi, dès lors qu’elle n’est pas tenue de suivre le prévenu dans le détail de son argumentation et qu’elle a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé, en tous ses éléments, l’infraction de travail dissimulé dont elle a déclaré le prévenu coupable, la cour d’appel a justifié sa décision sans méconnaître les textes visés au moyen ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 130-1 et 132-1, 132-19, 132-20 et 132-24 du code pénal, préliminaire, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs ;

”en ce que l’arrêt attaqué a condamné M. F... dit F... à la peine de six mois de prison avec sursis et 15 000 euros d’amende ;

”aux motifs propres que le tribunal a justement apprécié la nature et le quantum des peines à appliquer si bien que la décision doit être confirmée ;

”et aux motifs éventuellement adoptés que pendant plusieurs années M. F... dit F... a fait fi de la réglementation en vigueur, prétendant avoir pour certains points, agi par négligence, voire par fainéantise. Néanmoins, il doit être observé que s’agissant de transport public de personnes et de marchandises, et de transport aérien de surcroît, l’ensemble de la réglementation a pour objectif d’assurer la sécurité des personnes et des biens ; qu’en l’ignorant délibérément, M. F... dit F... a pris des risques dont, à l’évidence, il ne mesure pas encore aujourd’hui, la portée ; qu’il doit en conséquence lui être fait une application stricte de la loi pénale en prononçant à son encontre une peine d’emprisonnement assortie du sursis en totalité, ainsi qu’une peine d’amende dissuasive ;

”1°) alors que le montant de l’amende est déterminé en tenant compte des ressources et des charges de l’auteur de l’infraction ; qu’en condamnant M. F... dit F... à une amende de 15000 euros, sans tenir compte ni de ses ressources ni de ses charges, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

”2°) alors qu’en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de son auteur et de sa situation personnelle ; que, pour condamner M. F... dit F... à une peine d’emprisonnement sans s’expliquer sur sa situation personnelle, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision” ;

Vu les articles 132-1, 132-20, alinéa 2, du code pénal et les articles 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu qu’en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur

auteur et de sa situation personnelle ; que le juge qui prononce une amende

doit motiver sa décision en tenant compte des ressources et des charges du

prévenu ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, pour confirmer la peine de six mois d’emprisonnement avec sursis et de 15 000 euros d’amende, l’arrêt, par motifs propres et adoptés, invoque la multiplicité des faits commis par le prévenu pendant plusieurs années, l’importance de ces agissements au regard du montant des sommes ayant échappé aux déclarations sociales et fiscales et la gravité des faits, dès lors que la violation de la réglementation du transport aérien est susceptible de mettre en péril la sécurité des personnes et des biens ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, sans s’expliquer sur la situation personnelle du prévenu, ni sur le montant de ses ressources comme de ses charges, autrement qu’en mentionnant l’importance du chiffre d’affaires résultant des activités de l’intéressé sous couvert de la dénomination Prest’Air et sur le fait que M. F... n’a plus fait de déclaration auprès de l’Assedic de 2003 à 2006 et auprès de l’administration fiscale à compter de l’année 2004, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Cayenne, en date du 19 avril 2018, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées à l’encontre de M. F..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Cayenne, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Cayenne et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre juin deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

Décision attaquée : Cour d’appel de Cayenne , du 19 avril 2018