Salarié oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 11 mars 2009

N° de pourvoi : 07-43992

Non publié au bulletin

Rejet

M. Texier (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

Me Spinosi, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 20 juin 2007), que M. X... a été engagé le 9 octobre 2000 en qualité de directeur technique par la société C3T spécialisée dans les outils de communication multimédia pour les entreprises ; que suite à des difficultés économiques, il a été licencié le 14 août 2002 puis a repris son activité à compter du mois de janvier 2003 sans percevoir de rémunération ; qu’il a saisi la juridiction prud’homale ;

Sur les premier et deuxième moyens, réunis :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt d’avoir considéré que M. X... avait un contrat de travail avec la société C3T de janvier 2003 à novembre 2004 et d’avoir en conséquence condamné la société C3T à lui verser des rappels de salaire, une indemnité pour travail dissimulé et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur la base d’un salaire de référence établi à 4 116 euros par mois, alors, selon le moyen :

1° / qu’il y a contrat de travail lorsqu’une personne s’engage à travailler pour le compte et sous la direction d’une autre moyennant rémunération ; qu’ayant constaté que, sur toute la période litigieuse, soit pendant près de deux ans, les tâches effectuées par M. X... dans l’intérêt de l’exposante n’avaient pas donné lieu à rémunération, sans pour autant relever la moindre revendication de sa part dans ce sens ni le moindre engagement pris par la société C3T, la cour d’appel n’a pas caractérisé un des éléments constitutifs du contrat de travail ; qu’en décidant néanmoins qu’il y avait un contrat de travail, elle a violé l’article L. 121-1 du code du travail ;

2° / qu’en l’absence de rémunération, le lien de subordination ne suffit pas à caractériser un contrat de travail s’il n’est pas établi que c’est contre sa volonté que le salarié a travaillé sans être rémunéré ; qu’en s’abstenant de rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de l’exposante, si M. X... n’avait pas entendu seulement apporter une aide à l’entreprise en raison des relations d’amitié existantes entre les protagonistes, de l’inactivité professionnelle provisoire de M. X..., de son espoir de pouvoir retravailler dans le futur pour l’entreprise lorsqu’elle serait à nouveau florissante, de l’opportunité que cela présentait pour lui en termes de contacts dans le cadre de sa recherche d’emploi, etc., la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 121-1 du code du travail ;

3° / que l’employeur peut rapporter la preuve que le travail n’a pas été accompli à temps complet ; qu’en l’espèce, la société C3T faisait valoir subsidiairement dans ses conclusions d’appel aux pages 23 et 24 que M. X... ne pouvait avoir travaillé à temps complet compte tenu de la très faible quantité de courriels envoyés sur toute la période, malgré les fonctions qu’il prétendait avoir exercées ; qu’en omettant totalement de répondre à ce moyen, la cour d’appel a insuffisamment motivé sa décision en violation de l’article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d’appel, par motifs propres et adoptés, procédant à la recherche prétendument omise, a constaté que M. X... avait, à partir de janvier 2003 jusqu’en novembre 2004, poursuivi son activité pour le compte de la société soit comme intervenant technique, formateur ou conseil auprès des clients, que l’ensemble de ses prestations s’inscrivait dans la définition de son poste initial à savoir l’élaboration de systèmes relatifs aux télécommunications et notamment au concept “ i’reflet “, qu’il était en état de subordination auprès du gérant de la société qui lui commandait d’intervenir tant pour l’installation du produit que la recherche de solutions techniques et la formation auprès de ses clients ; qu’en l’état de ces constatations, elle en a exactement déduit, répondant aux conclusions, que l’intéressé était lié par un contrat de travail à temps plein ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société C3T aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société C3T

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt confirmatif attaqué d’AVOIR considéré que Monsieur X... avait un contrat de travail avec la société C3T de janvier 2003 à novembre 2004 et d’AVOIR en conséquence condamné la société C3T à lui verser des rappels de salaire, une indemnité pour travail dissimulé et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE Amine X... rapporte la preuve par la production de nombreux courriers électroniques échangés entre lui, la SAS C3T et divers clients de celleci, de plannings d’intervention et de formation conduites par lui pour le compte de la SAS C3T ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. X... était en état de subordination auprès du gérant de la société qui lui commandait d’intervenir tant pour l’installation du produit, que la recherche de solutions techniques et la formation auprès de ses clients et qui pouvait exercer un contrôle sur le travail effectué dont les éléments lui étaient régulièrement rapportés ; qu’il est établi que M. X... a travaillé entre janvier 2003 et novembre 2004 pour le compte de la société C3T ; que pendant cette période il n’a perçu aucun salaire en contrepartie de son activité ;

ALORS, D’UNE PART, QU’il y a contrat de travail lorsqu’une personne s’engage à travailler pour le compte et sous la direction d’une autre moyennant rémunération ; qu’ayant constaté que, sur toute la période litigieuse, soit pendant près de deux ans, les tâches effectuées par M. X... dans l’intérêt de l’exposante n’avaient pas donné lieu à rémunération, sans pour autant relever la moindre revendication de sa part dans ce sens ni le moindre engagement pris par la société C3T, la Cour d’appel n’a pas caractérisé un des éléments constitutifs du contrat de travail ; qu’en décidant néanmoins qu’il y avait un contrat de travail, elle a violé l’article L. 121-1 du Code du travail ;

ALORS, D’AUTRE PART, QU’en l’absence de rémunération, le lien de subordination ne suffit pas à caractériser un contrat de travail s’il n’est pas établi que c’est contre sa volonté que le salarié a travaillé sans être rémunéré ; qu’en s’abstenant de rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de l’exposante, si M. X... n’avait pas entendu seulement apporter une aide à l’entreprise en raison des relations d’amitié existantes entre les protagonistes, de l’inactivité professionnelle provisoire de M. X..., de son espoir de pouvoir retravailler dans le futur pour l’entreprise lorsqu’elle serait à nouveau florissante, de l’opportunité que cela présentait pour lui en termes de contacts dans le cadre de sa recherche d’emploi, etc., la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 121-1 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt confirmatif attaqué d’AVOIR dit que le salaire de référence est établi à 4116 par mois et d’AVOIR en conséquence, condamné la société C3T à payer à Monsieur X... les sommes de 94. 671 à titre de rappel de salaire outre les congés payés afférents, de 20. 000 à titre d’indemnités pour travail dissimulé et de 4. 116 à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE Amine X... a travaillé entre janvier 2003 et novembre 2004 pour le compte de la société C3T ; que pendant cette période, il n’a perçu aucun salaire en contrepartie de son activité ; que le dernier salaire perçu était de 4. 116 ;

ALORS QUE l’employeur peut rapporter la preuve que le travail n’a pas été accompli à temps complet ; qu’en l’espèce, la société C3T faisait valoir subsidiairement dans ses conclusions d’appel aux pages 23 et 24 que Monsieur X... ne pouvait avoir travaillé à temps complet compte tenu de la très faible quantité de courriels envoyés sur toute la période, malgré les fonctions qu’il prétendait avoir exercées ; qu’en omettant totalement de répondre à ce moyen, la Cour d’appel a insuffisamment motivé sa décision en violation de l’article 455 du nouveau Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt confirmatif attaqué d’AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... était sans cause réelle et sérieuse et d’AVOIR en conséquence, condamné la société C3T à verser à Monsieur X... la somme de 4. 116, à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE la poursuite de l’activité de Amine X... permet d’établir l’absence de suppression de son poste de travail ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE pendant la période de janvier 2003 à novembre 2004, Monsieur X... n’a perçu aucun salaire ;.. ; que Amine X... a continué son activité entre janvier 2003 et novembre 2004 pour le compte de la société C3T ; que la société qui n’a pas pu reclasser son salarié au moment du licenciement a continué à lui fournir du travail pendant près de deux ans ; que la poursuite des relations contractuelles prive le licenciement de cause réelle et sérieuse ;

ALORS QUE la suppression d’emploi consécutive à un licenciement pour motif économique est effective lorsque le poste est occupé après le licenciement par une personne non rémunérée ; que dès lors, ayant constaté que Monsieur X... n’avait pas perçu de salaire sur le période litigieuse, la Cour d’appel aurait dû en déduire qu’en lui faisant prétendument exécuter les mêmes tâches, mais en qualité de bénévole, l’employeur avait procédé à la suppression de l’emploi salarié ; qu’en décidant le contraire, elle a violé les dispositions des articles L. 321-1 et L. 122-14-3 du Code du travail.

Décision attaquée : Cour d’appel de Montpellier du 20 juin 2007