Bijouterie - bénévole oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 26 septembre 2012

N° de pourvoi : 10-25365

Non publié au bulletin

Rejet

M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 mars 2009), que Mme X... a été engagée par la société Nature et horizon en qualité de vendeuse du 26 mai au 30 septembre 2004 ; qu’entre le 26 et le 29 avril 2005, elle a procédé à l’étiquetage de bijoux pour cette société ; qu’invoquant l’existence d’un contrat de travail, elle a saisi la juridiction prud’homale de demandes de dommages-intérêts au titre de la rupture et du travail dissimulé ;

Attendu que Mme X... fait grief à l’arrêt de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ qu’en se bornant à affirmer que Mme X... ne justifiait pas avoir perçu une rémunération pour son étiquetage des bijoux de M. Y..., la cour d’appel a statué par un motif inapte à caractériser l’intention bénévole de la salariée et à écarter l’existence d’un contrat de travail, en violation de l’article L. 1221-1 du code du travail ;

2°/ que dans sa lettre du 11 mai 2005, Mme X... écrivait : « c’est ainsi que j’ai commencé à travailler pour vous le mardi 26 avril à 9 heures 30, à mon domicile et avec votre accord, afin de procéder à l’étiquetage de bijoux en argent et pierres fines. Ce travail s’est déroulé les jours qui ont suivi, c’est-à-dire les mercredi 27, jeudi 28 et vendredi 29 avril. J’ai ainsi étiqueté environ 2 000 pièces ce qui m’a occupée 9 heures par jour, pendant 4 jours. Il est évident qu’à partir de là, votre décision de m’embaucher et mon accord de travailler pour vous étaient implicitement entendus. En me confiant votre marchandise à mon domicile, vous prouviez à nouveau la confiance totale que vous m’accordez depuis 8 ans » ; qu’en énonçant qu’il n’était pas établi que Mme X... considérait l’étiquetage comme un début d’exécution de son contrat de travail, la cour d’appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre du 11 mai 2005, et ainsi violé l’article 1134 du code civil ;

3°/ qu’en retenant qu’hormis la fourniture du matériel et des outils par M. Y..., n’étaient pas établis les autres indices de la dépendance, à savoir l’imposition du lieu et des horaires de travail, la cour d’appel a prononcé par un motif impropre à exclure le lien de subordination juridique, en violation de l’article L. 1221-1 du code du travail ;

Mais attendu qu’appréciant souverainement la portée des éléments de preuve, la cour d’appel a fait ressortir que Mme X... ne justifiait pas avoir été placée dans des conditions normales d’emploi ; qu’ayant ainsi caractérisé l’absence d’un lien de subordination, elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu les articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Madame Martine X... de l’ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « sur l’existence d’un contrat de travail pour la période du 26 au 29 avril 2004, la requérante fait valoir que c’est Monsieur Y... qui l’a chargée comme chaque année d’étiqueter les bijoux pour la boutique qui devait ouvrir début mai, qu’il lui a donné 70 € par jour pendant 4 jours pour rémunérer ce travail ; qu’ainsi il ne pouvait mettre un terme à leur relation sans respect de la procédure et sans motiver la rupture ; qu’au surplus il l’a fait travailler sans la déclarer et sans lui faire signer de contrat de travail, elle sollicite l’application de l’article L 8223-1 du CT ; que l’intimé soutient que c’est Madame X... qui a proposé d’effectuer gracieusement l’étiquetage des bijoux auquel elle a procédé pendant à peine deux jours en dehors de tout lien de subordination et sans aucune rémunération ; que la relation de travail salariée se caractérise par l’état de subordination, l’existence d’une rémunération, et d’une prestation de travail ; que le lien de subordination est défini par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu’en l’absence d’écrit, la preuve de l’existence d’un contrat de travail revient à celui qui s’en prévaut, en l’espèce Madame X... ; qu’il est constant et d’ailleurs non contesté que la requérante a exécuté une prestation de travail consistant en l’étiquetage des bijoux pendant quelques jours ; que cependant elle ne justifie pas avoir perçu la moindre rémunération de ce chef ; qu’hormis la fourniture par l’employeur du matériel et des outils nécessaires à l’accomplissement du travail, il convient de remarquer que les autres indices laissant présumer l’état de dépendance à savoir lieu de travail et horaires imposés ne sont pas réunis ; que surtout il ne résulte pas des pièces aux débats et en particulier des nombreux courriels échangés avant et après cette période, que l’appelante ait jamais considéré l’étiquetage, compris dans ce que les parties nomment l’installation du magasin, comme un début d’exécution de son contrat de travail ; qu’à aucun moment elle ne fait mention d’une rémunération ; qu’elle indique même, le 11 mai, “ma pensée n’était en aucun cas une opposition sans compromis à vos propositions de travail...si tel était le cas pourquoi aurais je procédé à l’étiquetage des bijoux depuis mardi ?... A partir de là votre décision de m’embaucher et mon accord de travailler pour vous étaient implicitement entendus ... je vous ai alors demandé de me rédiger une lettre expliquant votre désengagement la veille d’une signature de contrat” ; que force est de constater que l’existence d’un contrat de travail entre les parties à compter du avril 2005, n’est pas établie ; qu’il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris qui a débouté la requérante de ses demandes » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « sur la demande au titre des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement, vu l’Article L.122-14-4 du Code du Travail, vu les échanges non équivoques entre les parties au sujet de l’embauche de Madame X..., en l’espèce, il n’a pas été établi de contrat de travail entre Monsieur Y... et Madame X... ; qu’en conséquence la demande au titre des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement n’est pas fondée ; que sur la demande au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, vu l’Article L.122-14-5 du Code du Travail, en l’espèce, il n’a pas été établi de contrat de travail entre Monsieur Y... et Madame X... ; qu’en conséquence la demande au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse n’est pas fondée » ;

ALORS 1°) QUE : en se bornant à affirmer que Madame X... ne justifiait pas avoir perçu une rémunération pour son étiquetage des bijoux de Monsieur Y..., la cour d’appel a statué par un motif inapte à caractériser l’intention bénévole de la salariée et à écarter l’existence d’un contrat de travail, en violation de l’article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS 2°) QUE : dans sa lettre du 11 mai 2005, Madame X... écrivait : « C’est ainsi que j’ai commencé à travailler pour vous le mardi 26 AVRIL à 9H30, à mon domicile et avec votre accord, afin de procéder à l’étiquetage de bijoux en argent et pierres fines. Ce travail s’est déroulé les jours qui ont suivi, c’est-à-dire les mercredi 27, jeudi 28 et vendredi 29 AVRIL. J’ai ainsi étiqueté environ 2 000 pièces ce qui m’a occupée 9 heures par jour, pendant 4 jours. Il est évident qu’à partir de là, votre décision de m’embaucher et mon accord de travailler pour vous, étaient implicitement entendus. En me confiant votre marchandise à mon domicile, vous prouviez à nouveau la confiance totale que vous m’accordez depuis 8 ans » ; qu’en énonçant qu’il n’était pas établi que Madame X... considérait l’étiquetage comme un début d’exécution de son contrat de travail, la cour d’appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre du 11 mai 2005, et ainsi violé l’article 1134 du code civil ;

ALORS 3°) QUE : en retenant qu’hormis la fourniture du matériel et des outils par Monsieur Y..., n’étaient pas établis les autres indices de la dépendance, à savoir l’imposition du lieu et des horaires de travail, la cour d’appel a prononcé par un motif impropre à exclure le lien de subordination juridique, en violation de l’article L. 1221-1 du code du travail.
Décision attaquée : Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 24 mars 2009