Organisation de séminaires

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 14 juin 2000

N° de pourvoi : 99-87730

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. GOMEZ, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze juin deux mille, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire KARSENTY, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général COTTE ;

Statuant sur les pourvois formés par :

"-" A... Christian,

"-" Y... Nini,

contre l’arrêt de la cour d’appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 28 octobre 1999, qui les a condamnés, pour exercice d’un travail dissimulé, chacun à 50 000 francs d’amende, à 5 ans d’interdiction d’exercer l’activité d’organisation de stages et conférences, et a ordonné une mesure de restitution ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 143-3, L. 320, L. 324-9, L. 324-10, L. 324-11, L. 362-3, L. 362-5 du Code du travail, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Christian A... et Nini Y... coupables des faits qui leur étaient reprochés et les a condamnés à une amende de 50 000 francs chacun et a, en outre, prononcé pour chacun d’eux l’interdiction pendant cinq ans d’exercer l’activité d’organisation de stages et de conférences relatifs à la santé et à l’épanouissement de la personne ;

”aux motifs que le 10 octobre 1997, agissant dans le cadre d’une commission rogatoire d’un juge d’instruction grenoblois, les gendarmes de Taulignan étaient appelés à opérer une perquisition au Domaine de Faujas à Taulignan, domicile de Christian A... ; que les gendarmes ont constaté la présence de stagiaires présents au domaine pour suivre un stage de jeûne de quatre jours ; que les stagiaires étaient hébergés et nourris sur place ; qu’il s’est avéré que Christian A... et sa compagne, Nini X... Y..., sous l’appellation “Institut de Recherche et d’Application Santé Globale”, organisent des stages et séminaires, recrutant les participants par voie de presse et d’affichage ; que l’enquête révélait que ni Christian A... ni sa compagne, ni même l’Institut de Recherche et d’Application Santé Globale n’étaient inscrits au registre du commerce ou au registre des métiers ; qu’il s’avère également qu’aucune déclaration fiscale ou sociale n’avait été faite, alors que l’enquête révélait qu’un certain nombre de sympathisants se rendaient au domaine et travaillaient de 6 à 8 heures par jour sur ordre de Christian A... ou de sa compagne à des tâches de maçonnerie, cuisine, lingerie, secrétariat et entretien du parc ; que l’Institut avait commencé à fonctionner en février 1997, qu’une dizaine de stages ont été organisés entre cette date et octobre 1997 ; que Christian A... et Johanson Z... reconnaissent les faits ; que c’est donc à bon droit que le premier juge les a retenus dans les liens de la prévention en leur faisant de surcroît une exacte application de la loi pénale ;

”alors que, premièrement, les juges du fond doivent, sous peine de censure, motiver leur décision ; que, notamment, avant de déclarer le prévenu coupable des faits qui lui sont reprochés, ils doivent rechercher et constater les éléments constitutifs de l’infraction ; qu’au cas d’espèce, Christian A... et Nini Y... étaient poursuivis du chef de travail clandestin ;

qu’aux termes de l’article L. 324-10 du Code du travail qui définit le travail clandestin, ce dernier suppose l’exercice à but lucratif d’une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services, ou l’accomplissement d’actes de commerce ;

qu’en statuant comme ils l’ont fait, sans constater ni rechercher quelle activité exerçaient exactement Christian A... et Nini Z..., et si notamment cette activité était à but lucratif, les juges du fond n’ont pas mis la Cour de Cassation en mesure d’exercer son contrôle ;

”et alors que, deuxièmement et de la même façon, le délit de travail clandestin suppose que le prévenu ait omis d’effectuer des déclarations relatives à ses salariés ; qu’à cet égard, il faut que les juges recherchent et constatent un lien de subordination entre le prévenu et les salariés ; qu’au cas d’espèce, en énonçant simplement qu’un certain nombre de sympathisants se rendaient au domaine et travaillaient de 6 heures à 8 heures par jour sans constater aucun lien de subordination entre ces sympathisants et Christian A..., les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard des textes susvisés” ;

Attendu que, pour caractériser l’infraction prévue à l’article L. 324-10, alinéas 1 et 2, du Code du travail, la cour d’appel retient que, sous l’appellation “Institut de recherche et d’application en santé globale”, et sans avoir procédé à leur immatriculation au registre du commerce ou au répertoire des métiers, les prévenus organisaient stages et séminaires, recrutant les participants par voie de presse ; que les juges ajoutent que certains des sympathisants travaillaient jusqu’à 8 heures par jour à diverses tâches sous les ordres des prévenus ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, dont il résulte que l’activité n’ayant fait l’objet d’aucune immatriculation et déclaration était exercée à titre lucratif, avec le recours à des travailleurs dissimulés, les juges ont justifié leur décision ;

Que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-3 et 111-4 du Code pénal, L. 362-3 et L. 362-4 du Code du travail, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré Christian A... et Nini Y... coupables des faits qui leur étaient reprochés et les a condamnés à une amende de 50 000 francs chacun et a, en outre, prononcé pour chacun d’eux l’interdiction pendant cinq ans d’exercer l’activité d’organisation de stages et de conférences relatifs à la santé et à l’épanouissement de la personne ;

”aux motifs que le 10 octobre 1997, agissant dans le cadre d’une commission rogatoire d’un juge d’instruction grenoblois, les gendarmes de Taulignan étaient appelés à opérer une perquisition au Domaine de Faujas à Taulignan, domicile de Christian A... ; que les gendarmes ont constaté la présence de stagiaires présents au domaine pour suivre un stage de jeûne de quatre jours ; que les stagiaires étaient hébergés et nourris sur place ; qu’il s’est avéré que Christian A... et sa compagne, Nini X... Y..., sous l’appellation “Institut de Recherche et d’Application Santé Globale”, organisent des stages et séminaires, recrutant les participants par voie de presse et d’affichage ; que l’enquête révélait que ni Christian A... ni sa compagne, ni même l’Institut de Recherche et d’Application Santé Globale n’étaient inscrits au registre du commerce ou au registre des métiers ; qu’il s’avère également qu’aucune déclaration fiscale ou sociale n’avait été faite, alors que l’enquête révélait qu’un certain nombre de sympathisants se rendaient au domaine et travaillaient de 6 à 8 heures par jour sur ordre de Christian A... ou de sa compagne à des tâches de maçonnerie, cuisine, lingerie, secrétariat et entretien du parc ; que l’Institut avait commencé à fonctionner en février 1997, qu’une dizaine de stages ont été organisés entre cette date et octobre 1997 ; que Christian A... et Johanson Z... reconnaissent les faits ; que c’est donc à bon droit que le premier juge les a retenus dans les liens de la prévention en leur faisant de surcroît une exacte application de la loi pénale ;

”alors que nul ne peut être puni pour un crime ou un délit d’une peine qui n’est pas prévue par la loi ; que, par ailleurs, la loi pénale est d’interprétation stricte ; qu’aux termes de l’article L. 362-4 du Code du travail, les personnes physiques qui se sont rendues coupables de travail clandestin peuvent se voir condamnées à l’interdiction pour une durée de cinq ans d’exercer librement ou par personne interposée l’activité professionnelle dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise ; que, pour l’application de ces textes, il faut bien entendu prendre en compte la profession dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle le prévenu a été poursuivi ; qu’au cas d’espèce, il résulte de la citation devant le tribunal correctionnel de Valence que Christian A... et Nini Y... ont été poursuivis pour avoir exercé une activité “d’hôtellerie-restauration” ; qu’en interdisant à Christian A... et Nini Y... d’exercer pendant cinq ans l’activité d’organisation de stages et conférences relatifs à la santé et à l’épanouissement de la personne, activité sans aucun rapport avec l’hôtellerie-restauration, les juges du fond ont violé les textes susvisés” ;

Attendu qu’il ne saurait être reproché à la cour d’appel d’avoir prononcé, à titre de peine complémentaire, une interdiction d’exercer l’activité d’organisation de stages et conférences relatifs à la santé et à l’épanouissement de la personne, dès lors qu’elle a constaté que l’infraction avait été commise dans l’exercice ou à l’occasion de cette activité ;

D’où il suit que le moyen ne peut qu’être écarté ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Gomez président, Mme Karsenty conseiller rapporteur, M. Pinsseau conseiller de la chambre ;

Avocat général : M. Cotte ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée : cour d’appel de Grenoble, chambre correctionnelle du 28 octobre 1999