Parc animalier

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 30 janvier 2001

N° de pourvoi : 00-84714

Non publié au bulletin

Rejet

Président : M. COTTE, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente janvier deux mille un, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l’avocat général COMMARET ;

Statuant sur les pourvois formés par :

"-" Y... Gabriele Petra,

"-" C... de la X... Xavier,

contre l’arrêt de la cour d’appel de VERSAILLES, 9ème chambre, en date du 7 juin 2000, qui, pour travail dissimulé, les a condamnés chacun à 10 000 francs d’amende ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 513 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

”en ce qu’il résulte des mentions de l’arrêt attaqué que le rapport a été fait par M. Kunlin, conseiller-stagiaire, qui a siégé en surnombre et participé avec voix consultative au délibéré ;

”alors que le rapport oral doit être présenté par un conseiller qui participe au délibéré et fait partie de la formation juridictionnelle qui rend la décision ; que cette formalité est essentielle et doit être respectée à peine de nullité ; qu’il s’ensuit que l’arrêt attaqué, qui mentionne que le rapport a été présenté par un conseiller stagiaire ayant seulement voix consultative au délibéré et ne faisant pas partie de la juridiction qui rend la décision, encourt l’annulation” ;

Attendu que l’arrêt attaqué énonce que M. Kunlin, conseiller stagiaire, qui a siégé en surnombre et participé avec voix consultative au délibéré, a été entendu en son rapport ;

Attendu qu’en cet état et dès lors que l’ordonnance du 22 décembre 1958, en son article 19, permet aux magistrats stagiaires de participer à l’activité juridictionnelle, sous la responsabilité des magistrats, l’arrêt n’encourt pas les griefs du moyen lequel, dès lors, ne peut qu’être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 324-9 et L. 324-10 du Code du travail (rédaction antérieure et postérieure à la loi du 11 mars 1997), L. 324-11 du même Code, 121-3 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a déclaré Xavier C... de la Baume et Gabriele B... Y... coupables de travail clandestin et de travail dissimulé, et les a condamnés de ce chef ;

”aux motifs que l’article L. 324-10 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure ou postérieure à la loi du 11 mars 1997, incrimine le travail clandestin ou dissimulé, lorsqu’il est exercé dans un but lucratif ; que la SA Château Sauvage, dirigée par Gabriele B... Y..., loue le terrain de 70 hectares abritant la réserve animalière à l’association FICN, dont le Secrétaire général était, au moment des faits, Xavier C... de la Baume ; que cette association reçoit du public et fait payer un droit d’entrée pour la visite de la réserve animalière ; qu’il s’ensuit que cet organisme, même s’il perçoit des subventions, exerce une activité à but lucratif ;

que Xavier C... de la Baume n’a pas, postérieurement au 11 mars 1997, déclaré l’activité de la réserve aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale ; qu’il a engagé, en juin 1996, Elise Z..., qui a travaillé de juin 1996 à mars 1997, sans être déclarée ni mentionnée sur le registre unique du personnel ou le livre de paie de l’association, moyennant une contrepartie de logement sur les lieux, qui n’a été régulièrement engagée et déclarée que le 21 avril 1997, et qui n’a pas reçu de bulletin de paie pour le mois de mai 1997 ; que Gabriele B... Y... a, d’une part, engagé Sébastien A... (collégien) en été 1995, pour s’occuper des animaux de la réserve, l’intéressé ayant pour ce travail reçu 5 000 francs, et, d’autre part, fait travailler le même jeune homme du 5 au 9 juin 1997, travail pour lequel il devait percevoir 130 francs par jour ;

”alors, d’une part, que l’omission des déclarations aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale, au sens de l’article L. 324-10-b nouveau du Code du travail, ne peut être qualifiée de travail dissimulé que dans le cas de l’exercice à but lucratif d’une activité économique ; qu’en l’espèce, l’association “Fonds International pour la Conservation de la Nature”, dont les dirigeants de droit et de fait ne sont pas rémunérés, et qui n’exerce pas une activité économique à caractère spéculatif dans un secteur concurrentiel, mais se borne à réaliser son objet de protection de la nature, en s’occupant d’un parc animalier qu’elle fait accessoirement visiter au public, n’est pas concernée par ce texte ; qu’en déclarant Xavier C... de la Baume coupable de travail dissimulé par omission des déclarations sociales ou fiscales, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

”alors, d’autre part, que le travail clandestin par omission d’effectuer au moins deux des formalités obligatoires en cas d’emploi de salariés, au sens de l’article L. 324-10-3 ancien du Code du travail, suppose l’exercice à but lucratif d’une activité économique ; que l’association “Fonds International pour la Conservation de la Nature”, qui n’exerce pas une activité économique à caractère spéculatif, mais se borne à poursuivre son objet de protection de la nature, en s’occupant d’un parc animalier qu’elle fait accessoirement visiter au public, n’est pas visée par ce texte ; qu’en déclarant Xavier C... de la Baume et Gabriele B... Y... coupables de travail clandestin par omission des formalités obligatoires en cas d’emploi de salariés, antérieurement à mars 1997, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

”alors, de troisième part, que le délit de travail dissimulé par omission d’effectuer l’une des formalités obligatoires en cas d’emploi de salariés, au sens de l’article L. 324-10, alinéa 5, du Code du travail, est constitué par la soustraction intentionnelle à l’une des obligations mentionnées par ce texte ; qu’en relevant que Xavier C... de la Baume avait engagé une salariée (Elise Z...) qui a fait l’objet d’une déclaration préalable à l’embauche le 21 avril 1997, mais qui n’avait pas, lors du contrôle du 9 juin 1997, reçu son bulletin de salaire pour le mois de mai 1997, omission qui a pu provenir d’une négligence ou d’un oubli, sans caractériser, à l’encontre de Xavier C... de la Baume, l’intention frauduleuse de dissimulation, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

”alors, enfin, qu’en déclarant Gabriele B... Y... coupable de travail clandestin et dissimulé, pour avoir engagé, en été 1995 et du 5 au 9 juin 1997, Sébastien A... pour s’occuper contre rémunération des animaux de la réserve, sans caractériser aucun élément constitutif du travail clandestin ou dissimulé, la cour d’appel a violé l’article L. 324-10-3 ancien et L. 324-10, alinéa 5, nouveau du Code du travail” ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que Gabriele B... Y... est poursuivie pour travail dissimulé, pour avoir, étant directrice de fait de la réserve animalière du Château de Sauvage, employé un salarié sans avoir effectué les formalités prévues à l’article L. 324-10 du Code du travail et que Xavier C... de la Baume est poursuivi du même chef, pour avoir, étant secrétaire général de l’association Fonds International pour la Conservation de la Nature, employé une salariée sans avoir effectué les formalités prévues à l’article L. 324-10 du Code du travail, et exploité la réserve animalière du Château de Sauvage sans avoir procédé aux déclarations exigées par l’article L. 324-10 du Code du travail ;

Attendu que, pour déclarer les infractions établies, les juges se prononcent par les motifs partiellement reproduits au moyen ; qu’en l’état de ces seuls motifs, la cour d’appel a caractérisé, sans insuffisance ni contradiction, le but lucratif de l’association qui employait les deux salariés ; que, par ailleurs, en relevant “qu’aucun document social ne se trouvait sur place et que le secrétaire général n’a pu renseigner les contrôleurs quant à l’existence d’un registre unique du personnel, de déclarations préalables à l’embauche relatives aux personnes présentes sur les lieux du contrôle ou de bulletins de paie”, l’arrêt a établi le caractère dissimulé de l’emploi des deux salariés concernés ;

D’où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Anzani conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Avocat général : Mme Commaret ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Décision attaquée : cour d’appel de Versailles, 9ème chambre du 7 juin 2000

Titrages et résumés : (Sur le second moyen) TRAVAIL - Travail clandestin - Activités professionnelles visées par l’article L324-10 du Code du travail - Association - But lucratif.

Textes appliqués :
* Code du travail L324-10