Aide amicale restaurant non - salariée oui

N° 08VE00118

Inédit au recueil Lebon

4ème Chambre

M. BROTONS, président

Mme Corinne SIGNERIN-ICRE, rapporteur

Mme JARREAU, rapporteur public

NICLET LAGEAT, avocat(s)

lecture du mardi 29 décembre 2009

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2008, présentée pour la SARL SUN 70, dont le siège est sis 70, rue Maurice Berteaux à Conflans-Sainte-Honorine (78700), par Me Niclet-Lageat ; la SARL SUN 70 demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0500343 du 8 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision en date du 10 novembre 2004 du directeur de l’Office des migrations internationales (OMI) rejetant son recours gracieux formé contre la décision lui appliquant une contribution de 11 800 euros au titre de l’article L. 341-7 du code du travail pour l’emploi de ressortissants étrangers démunis d’autorisations de travail, ensemble l’état exécutoire du 10 août 2004, et à la réduction du montant de l’état exécutoire du 10 août 2004 ;

2°) d’annuler l’état exécutoire du 10 août 2004 ;

Elle soutient, en premier lieu, que l’état exécutoire du 10 août 2004 est entaché d’irrégularité dès lors que, visant un procès-verbal du 14 janvier 2003 alors que le procès-verbal de l’inspection du travail est daté du 16 juin 2003, il se fonde sur un procès-verbal inexistant ; en deuxième lieu, que l’infraction n’est pas constituée s’agissant de Mlle Bigourranen, qui n’était présente le jour du contrôle qu’en qualité d’amie d’un des associés de la société et n’effectuait aucun travail ; que le Tribunal correctionnel de Versailles ayant déclaré le gérant non coupable des faits s’agissant de l’intéressée, l’autorité de la chose jugée au pénal implique que l’infraction n’est pas constituée et que la société n’est pas redevable de la contribution litigieuse ; enfin, que c’est à tort que l’OMI a refusé de faire droit à sa demande de minoration de cette contribution au motif que le procès-verbal faisait apparaître d’autres infractions que celle prévue par l’article L. 341-6 du code du travail ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le décret n° 2009-331 du 25 mars 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 15 décembre 2009 :

 le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur,

 et les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public ;

Considérant qu’à la suite d’un procès-verbal d’infraction dressé par les services de l’inspection du travail le 14 janvier 2003 et constatant que quatre ressortissants étrangers dépourvus d’autorisation de travail travaillaient au sein du restaurant La Toscane exploité à Conflans-Sainte-Honorine par la SARL SUN 70, le directeur de l’Office des migrations internationales (OMI) a, sur le fondement des article L. 341-6 et L. 341-7 du code du travail, alors en vigueur, émis un état exécutoire à l’encontre de cette société, le 10 août 2004, en vue du versement par celle-ci d’une contribution spéciale de 11 800 euros ; que la SARL SUN 70 fait appel du jugement du 8 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant principalement à l’annulation de la décision du 10 novembre 2004 du directeur de l’OMI rejetant son recours gracieux formé contre la décision de cette autorité de lui appliquer cette contribution, ensemble l’état exécutoire du 10 août 2004, et subsidiairement à la réduction du montant de la contribution mise à sa charge par l’état exécutoire du 10 août 2004 ;

Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 341-6 du code du travail alors en vigueur : Nul ne peut, directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France ; qu’aux termes de l’article L. 341-7 du même code : Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être intentées à son encontre, l’employeur qui aura occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l’article L. 341-6, premier alinéa, sera tenu d’acquitter une contribution spéciale au bénéfice de l’Office des migrations internationales... ; que selon l’article R. 341-34 : Au vu des procès-verbaux qui lui sont transmis en application de l’article R. 341-33, le directeur de l’Office des migrations internationales décide de l’application de la contribution spéciale prévue à l’article L. 341-7 et notifie sa décision à l’employeur ainsi que le titre de recouvrement ; qu’enfin, aux termes de l’article R.341-35 de ce code : La contribution spéciale créée par l’article L. 341-7 est due pour chaque étranger employé en infraction au premier alinéa de l’article L. 341-6. / Son montant est égal à mille fois le taux horaire, à la date de la constatation de l’infraction, du minimum garanti prévu à l’article L. 141-8. Lorsque l’emploi de l’étranger n’a pas donné lieu à la constatation d’une infraction autre que l’infraction au premier alinéa de l’article L. 341-6, le directeur de l’Office des migrations internationales peut, sur proposition du directeur départemental du travail et de l’emploi du département dans lequel l’infraction a été constatée, réduire ce montant à cinq cents fois le taux horaire du minimum garanti (...) ;

Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de l’instruction que le contrôleur du travail a dressé le 14 janvier 2003 un procès-verbal des infractions relevées lors du contrôle du restaurant La Toscane , qu’il a clos le 16 juin 2003 ; que ce procès-verbal a été versé au dossier ; que, dans ces conditions, et peu important que l’état exécutoire litigieux mentionne seulement que ce procès verbal a été dressé le 14 janvier 2003 et ne précise pas la date de sa clôture, la SARL SUN 70 n’est pas fondée à soutenir que ledit état exécutoire serait fondé sur un procès-verbal inexistant ;

Considérant, en deuxième lieu, que si les faits constatés par le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif d’un jugement ayant acquis force de chose jugée s’imposent à l’administration comme au juge administratif, la même autorité ne saurait s’attacher aux motifs d’un jugement de relaxe tiré de ce que les faits reprochés à l’accusé ne sont pas établis ou qu’un doute subsiste sur leur réalité ; qu’il appartient, dans ce cas, à l’autorité administrative d’apprécier si la matérialité de ces faits est avérée et, dans l’affirmative, s’ils justifient l’application d’une sanction administrative ; que, dans ces conditions, la circonstance que le Tribunal de Grande instance de Versailles ait, par un jugement en date du 31 mars 2003, relaxé M. Frajemberg, gérant de la SARL SUN 70, pour l’emploi irrégulier de Mlle Bigourranen, qui était l’un des quatre salariés dont la présence a été constatée par le contrôleur du travail le 14 janvier 2003, ne fait pas obstacle, dès lors qu’il ne résulte pas des motifs de ce jugement que le juge pénal ait constaté que les faits d’emploi d’un étranger non muni d’une autorisation de travail n’ont pas été commis par l’intéressé, à ce que la contribution spéciale susmentionnée puisse légalement être mise à la charge de la SARL SUN 70 pour l’emploi de cette salariée ;

Considérant, en troisième lieu, qu’il résulte de l’instruction et notamment du procès-verbal du contrôleur du travail que Mlle Bigourranen, ressortissante marocaine démunie de titre de travail, était occupée à servir en salle dans le restaurant exploité à Conflans-Sainte-Honorine par la SARL SUN 70 et a déclaré au contrôleur du travail donner un coup de main de temps en temps dans le restaurant avant de prendre la fuite ; que si la SARL SUN 70 soutient que la présence de Mlle Bigourranen n’était due qu’à sa qualité d’amie de l’un des associés de la société, elle n’apporte aucune justification, ni aucune précision à l’appui de cette allégation ; que, dans ces conditions, l’infraction aux dispositions de l’article L. 341-6 précité du code du travail est établie et justifiait ainsi l’application, à l’encontre de la SARL SUN 70, de la contribution spéciale visée à l’article L. 341-7 du même code ;

Considérant, enfin, qu’il résulte de l’instruction, et notamment du procès-verbal dressé par le contrôleur du travail que l’emploi des quatre étrangers démunis d’autorisation de travail a également donné lieu à la constatation d’infractions autres que l’infraction au premier alinéa de l’article L. 341-6 du code du travail ; que, dès lors, la SARL SUN 70 n’est fondée ni à soutenir que c’est à tort que c’est à tort que le directeur de l’OMI a refusé de réduire, sur le fondement de l’article R. 341-35 précité du code du travail, à cinq cents fois le taux horaire du minimum garanti le montant de la contribution spéciale qui lui a été appliquée, ni à demander à la Cour de décider cette réduction ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SARL SUN 70 n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la SARL SUN 70 le versement à l’Office français de l’immigration et de l’intégration, qui vient aux droits de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations, qui s’est substituée à l’Office des migrations internationales, de la somme de 1 500 euros qu’il demande au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la SARL SUN 70 est rejetée.

Article 2 : La SARL SUN 70 versera à l’Office français de l’immigration et de l’intégration la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.