Travaux d’élagage - recouvrement utilisateur employeur de fait

Cour Administrative d’Appel de Versailles

N° 07VE01611

Inédit au recueil Lebon

4ème Chambre

Mme CHELLE, président

Mme Emmanuelle BORET, rapporteur

Mme JARREAU, commissaire du gouvernement

SCHNERB, avocat(s)

lecture du mardi 3 mars 2009

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2007, présentée pour la société SAUBA PARC SA, dont le siège est 39, rue du Chemin Vert, BP 02, à la Queue-en-Brie (94510), par Me Schnerb ; la société SAUBA PARC SA demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0303313 du 15 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’état exécutoire émis le 17 décembre 2002 par le directeur de l’Office des migrations internationales en vue du recouvrement d’une somme de 8 730 euros au titre de la contribution spéciale prévue par l’article L. 341-7 du code du travail, ensemble la décision en date du 1er avril 2003 ayant rejeté son recours gracieux ;

2°) d’annuler ces décisions ;

3°) de mettre à la charge de l’Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations, qui s’est substituée à l’Office des migrations internationales, une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement attaqué est irrégulier en ce qu’il a omis de viser un mémoire adressé au tribunal administratif le 27 avril 2007, soit avant la clôture de l’instruction ; que les trois ressortissants étrangers dont la présence a été relevée sur son chantier lui sont inconnus ; que la main-d’oeuvre lui a été fournie par son sous-traitant, la société Euro Jardin et que la procédure prévue par l’article R. 324-4 du code du travail a été respectée ; que le Tribunal correctionnel de Créteil a relaxé la société du chef d’emploi de travailleurs étrangers sans titre de travail ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 10 février 2009 :

"-" le rapport de Mme Boret, premier conseiller,

"-" et les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu’aux termes de l’article R. 613-2 du code de justice administrative : « Si le président de la formation de jugement n’a pas pris une ordonnance de clôture, l’instruction est close trois jours francs avant la date de l’audience indiquée dans l’avis d’audience prévu à l’article R. 711-2. Cet avis le mentionne (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 613-3 du même code : « Les mémoires produits après la clôture de l’instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...) » ; que lorsque, postérieurement à cette clôture, le juge est saisi d’un mémoire émanant de l’une des parties à l’instance, et conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l’instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi que de le viser sans l’analyser ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le conseil de la société SAUBA PARC SA a adressé, par courrier simple, au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise un mémoire, enregistré au greffe le 2 mai 2007, soit le jour même de l’audience publique lors de laquelle l’affaire a été appelée ; que si ce mémoire ne contenait l’exposé d’aucune circonstance de fait ou de droit impliquant qu’il en soit tenu compte par les premiers juges, il ne pouvait, cependant, être écarté sans avoir été visé ; que l’absence de mention, dans les visas du jugement attaqué, de ce mémoire, produit postérieurement à la clôture de l’instruction, entache le jugement d’irrégularité ; que, par suite, la société SAUBA PARC SA est fondée à demander l’annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société SAUBA PARC SA devant le Tribunal administratif de Cergy- Pontoise ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’à la suite d’un contrôle de l’inspection du travail effectué le 12 juin 2002 sur un chantier d’entretien d’espaces verts attribué par la commune de Bondy à la société SAUBA PARC SA, le contrôleur du travail a constaté la présence de trois travailleurs étrangers, M. X , de nationalité algérienne, et M. Z et M. Y, de nationalité marocaine, occupés à élaguer des arbres ou stationnés à proximité du chantier dans un véhicule appartenant à l’entreprise, et qui ont déclaré être dépourvus de titre de travail ; que, quelle que soit l’orthographe des patronymes susmentionnés, ledit procès-verbal, qui fait foi jusqu’à preuve contraire, ne comporte aucune incertitude sur l’identité des personnes qui en sont l’objet ; que le directeur de l’Office des migrations internationales a mis à la charge de la société SAUBA PARC SA, au titre de la contribution spéciale prévue par les dispositions de l’article L. 341-7 du code du travail, une somme de 8 730 euros par un titre exécutoire du 17 décembre 2002 ; que le directeur de l’Office a rejeté le recours gracieux formé par la société SAUBA PARC SA, par une décision en date du 1er avril 2003 ;

Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 341-6 du code du travail : « Nul ne peut, directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service, employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France » ; qu’aux termes de l’article L. 341-7 du même code : « Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être intentées à son encontre, l’employeur qui aura occupé un travailleur étranger en violation des dispositions de l’article L. 341-6, premier alinéa, sera tenu d’acquitter une contribution spéciale au bénéfice de l’Office des migrations internationales. Le montant de cette contribution spéciale ne saurait être inférieur à 500 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l’article L. 141-8. Un décret en Conseil d’Etat fixera les modalités d’application du présent article » ; qu’aux termes de l’article R. 341-35 alors applicable : « La contribution spéciale créée par l’article L. 341-7 est due pour chaque étranger employé en infraction au premier alinéa de l’article L. 341-6. Son montant est égal à mille fois le taux horaire, à la date de la constatation de l’infraction, du minimum garanti prévu à l’article L. 141-8 (...) » ;

Considérant, en premier lieu, que si les faits constatés par le juge pénal saisi de poursuites pour infraction à l’article L. 341-6 du code du travail et qui commandent nécessairement le dispositif d’un jugement ayant acquis force de chose jugée s’imposent à l’administration comme au juge administratif, la même autorité ne saurait s’attacher aux motifs d’un jugement de relaxe tiré de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ; qu’ainsi, la société SAUBA PARC SA ne peut se prévaloir utilement de ce qu’elle a été relaxée du chef d’emploi de travailleurs étrangers démunis d’autorisation de travail par un jugement définitif du 8 novembre 2006 rendu par le Tribunal de grande instance de Bobigny statuant en matière correctionnelle ;

Considérant, en second lieu, que si la société SAUBA PARC SA soutient que les travailleurs en cause, étaient en réalité salariés de la société Euro-jardin, à laquelle elle serait liée par un contrat de sous-traitance, elle ne produit aucun élément probant de nature à établir la réalité de ce contrat ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société SAUBA PARC SA n’est pas fondée à demander l’annulation du titre exécutoire en litige et de la décision rejetant son recours gracieux ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu’en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société SAUBA PARC SA la somme de 2 000 euros que l’ANAEM demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 15 mai 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société SAUBA PARC SA devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 3 : La société SAUBA PARC SA versera à l’ANAEM la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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