Particulier donneur d’ordre

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 9 novembre 2010

N° de pourvoi : 10-80252

Publié au bulletin

Rejet

M. Louvel, président

M. Guérin, conseiller apporteur

Mme Magliano, avocat général

SCP Bénabent, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

 M. Vlado X...,

contre l’arrêt de la cour d’appel de PARIS, chambre 6-1, en date du 24 novembre 2009, qui, pour travail dissimulé et recours aux services d’une personne exerçant un travail dissimulé, l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis et 30 000 euros d’amende ;

Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-1 à -5, L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8224-4, D. 8222-4 et D. 8222-5 du code du travail, des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de travail dissimulé par recours direct en connaissance de cause aux services de M. Y..., employeur dissimulant l’emploi de ses propres salariés, et l’a en conséquence condamné pour l’ensemble des culpabilités lui ayant été imputées à une peine d’emprisonnement de six mois, assortie en totalité du sursis, et à une peine d’amende de 30 000 euros ;

”aux motifs qu’en ce qui concerne la poursuite de M. X... pour avoir, directement et sciemment, eu recours aux services de M. Y... comme employeur dissimulant l’emploi de ses salariés, qu’il y a lieu pour la cour de retenir à partir de ses propres déclarations, devant les gendarmes enquêteurs, le 18 octobre 2006, comme devant le magistrat instructeur le 20 octobre 2006 lors de son interrogatoire de première comparution, avec pleine confirmation des précédentes déclarations, qu’il a bien eu recours à M. Y... pour faire travailler sur sa propriété à la réfection d’un mur de clôture, ainsi qu’à divers travaux de peintures et de doublage de cloisons intérieures, des ouvriers recrutés par celui-ci, qu’il savait être tous de nationalité bulgare, sur la base d’un devis d’un montant de 101 069 euros TTC, établi au nom d’une société Victor, domiciliée à Bobigny (93), sur l’existence de laquelle il n’a procédé à aucune vérification (audition du 18 ocotbre 2006, feuillet 8), et sans avoir été en mesure de produire la facture correspondante, tout en le rémunérant personnellement par des chèques établis à son nom à hauteur de 60 000 euros, sauf à limiter la période de prévention entre le 1er juillet et le 18 octobre 2006 à défaut d’éléments objectifs pour caractériser des travaux notamment en février 2006 ; qu’il convient d’observer, par ailleurs, que M. X... est chef d’entreprise depuis 1979 ; qu’il ressort à l’évidence de ces circonstances que M. X... ne peut prétendre avoir méconnu de bonne foi les irrégularités reprochées, et y a donc sciemment participé dans les termes de la prévention, ses considérations sur les qualités propres aux maçons bulgares pour travailler la pierre étant ici dénuées de toute pertinence ; qu’en conséquence M. X... et M. Y... doivent être chacun déclaré coupable dans les termes du dispositif ci-après, étant pour le surplus relaxé ; qu’en répression, il convient de prendre en compte la consistance objective des faits poursuivis, et donc la gravité des atteintes ainsi portées à l’ordre économique et social ; qu’il y a lieu par ailleurs de prendre en considération les éléments de personnalité de chacun des prévenus : - pour M. X... la mention d’une précédente condamnation à son casier judiciaire, son expérience professionnelle personnelle exclusive de toute bonne foi en l’espèce et le niveau de ses ressources, réévalué par lui-même à la barre à hauteur de 300 000 euros par an … ; qu’il convient en conséquence de prononcer pour M. X... une peine d’emprisonnement de six mois, assortie du sursis dans sa totalité et une peine d’amende délictuelle de 30 000 euros … » ;

”alors que le particulier qui contracte pour son usage personnel est considéré comme n’ayant pas recouru sciemment au travail dissimulé dès lors qu’il s’est fait remettre par son cocontractant l’un des documents énumérés à l’article D. 8222-5 du code du travail, dont notamment un devis portant mention d’une dénomination sociale, d’une adresse complète et d’un numéro d’immatriculation ; que M. X..., qui avait, en l’espèce, eu recours aux services de la société Victor SARL, par l’intermédiaire de M. Y..., pour effectuer des travaux à son domicile pour son usage personnel devait être considéré comme un particulier, peu important sa qualité de chef d’entreprise ; qu’en se fondant sur la qualité de chef d’entreprise de M. X... pour juger que celui-ci aurait sciemment recouru aux services de M. Y..., cependant qu’il était un particulier contractant pour son usage personnel et qu’il s’était fait remettre un devis établi au nom de la société Victor SARL, la cour d’appel a violé les textes susvisés” ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a été poursuivi notamment pour avoir eu recours aux services d’un employeur dissimulant l’emploi de ses salariés pour effectuer des travaux sur sa propriété ; qu’il a été relaxé de ce chef par le tribunal correctionnel ;

Attendu que, pour réformer le jugement et le déclarer coupable de ce délit, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel a justifié sa décision dès lors que l’absence de concordance entre la dénomination de la société désignée sur le devis et l’identité du cocontractant permettait d’écarter la présomption instituée par les articles L. 8222-1, D. 8222-4 et D. 8222-5 du code du travail au bénéfice du particulier qui contracte pour son usage personnel ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Guérin conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Publication : Bulletin criminel 2010, n° 177

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris , du 24 novembre 2009