Exclusivité non - prêt illicite non

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 29 mars 2017

N° de pourvoi : 15-27745

ECLI:FR:CCASS:2017:SO00625

Non publié au bulletin

Rejet

Mme Guyot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

Me Ricard, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 30 septembre 2015), que que M. X..., engagé selon contrat à durée déterminée du 2 avril au 31 août 2013 en qualité de chauffeur par la société Euronégoce, a été, le 5 août 2013, victime d’un accident de travail et a été en arrêt de travail jusqu’au 15 septembre 2013 ; que la société a mis fin, le 31 août 2013, à la relation contractuelle ;

Sur les quatre premiers moyens du pourvoi principal du salarié :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le cinquième moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts en réparation du prêt de main-d’oeuvre illicite, alors, selon le moyen :

1°/ qu’en application de l’article L. 8241-1 du code du travail, une opération de prêt de main-d’oeuvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition ; qu’en affirmant que la mise à disposition de la société SNH de M. X..., engagé par la société Euronégoce par contrat à durée déterminée au double motif d’un surcroît d’activité et du remplacement d’un salarié absent, constituait une opération de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, sans constater que les 46 euros facturés par heure par salarié par la société Euronégoce à la société SNH couvraient seulement les salaires versés au salarié et les charges sociales, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 8241-1 du code du travail ;

2°/ qu’en application de l’article L. 8241-2 du code du travail, en sa rédaction en vigueur au 2 avril 2013, le prêt de main d’oeuvre à but non lucratif conclu entre entreprises requiert, d’une part l’accord du salarié concerné, d’autre part une convention de mise à disposition entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice, qui en définit la durée et mentionne l’identité et la qualification du salarié concerné, ainsi que le mode de détermination des salaires, des charges sociales et des frais professionnels qui seront facturés à l’entreprise utilisatrice par l’entreprise prêteuse et enfin un avenant au contrat de travail, signé par le salarié, précisant le travail confié dans l’entreprise utilisatrice, les horaires et le lieu d’exécution du travail, ainsi que les caractéristiques particulières du poste de travail ; qu’en ne recherchant pas si, en l’espèce, ces formalités substantielles, conditionnant la validité de la convention emportant du prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, étaient en l’espèce respectées, quand la société Euronégoce avait engagé M. X... par contrat à durée déterminée au double motif d’un surcroît d’activité et du remplacement d’un salarié absent, pour le mettre à disposition de la société SNH, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions ;

Mais attendu que la cour d’appel, qui, par motifs propres et adoptés, a relevé, d’une part que la mise à disposition du salarié s’effectuait dans le cadre d’un contrat de prestations de service incluant la fourniture de divers matériels et de personnel, d’autre part que l’intéressé était resté sous la subordination de son employeur, a légalement justifié sa décision ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l’employeur :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit que la rupture du contrat de travail conclu le 2 avril 2013 intervenue le 31 août 2013 est nulle et de nul effet, et constaté que la relation professionnelle a pris fin par l’envoi au salarié des documents de fin de contrat,

AUX MOTIFS QU’en l’espèce, c’est à bon droit que les premiers juges ont relevé que le contrat signé le 2 avril 2013 entre les parties ne répondait pas aux conditions légales et devait être requalifié, dès lors qu’’y étaient précisés deux motifs distincts de recours au contrat à durée déterminée (remplacement d’un salarié absent et accroissement d’activité) ne permettant pas de connaître pour quelle tâche précise le salarié avait été engagé …. ; qu’en application des dispositions des articles L1226-7 et L 1226-9 du Code du travail le contrat de travail à durée indéterminée du salarié victime d’un accident du travail est suspendu pendant toute la durée de l’arrêt de travail ; qu’il ne peut être rompu à l’initiative de l’employeur que si celui-ci justifie d’une faute grave ou lourde imputable au salarié ou s’il démontre son impossibilité, pour un motif non lié à l’accident professionnel, de maintenir le contrat de l’employé ; qu’en vertu de l’article L 1226-13 du Code du Travail, le non respect de ces dispositions entraîne la nullité de la rupture ; qu’à défaut de demande de réintégration dans l’entreprise, le salarié est en droit de réclamer une indemnité destinée à réparer le préjudice subi ne pouvant être inférieure à celle prévue par l’article L 1235-3 du Code du Travail, soit à 6 mois de salaire, outre une indemnité compensatrice de préavis et le cas échéant, s’il justifie d’un an d’ancienneté, une indemnité de licenciement ; qu’en l’espèce, il est constant que Monsieur Ludovic X... était en arrêt de travail au moment où son contrat initial devait prendre fin ; qu’or, par l’effet de la requalification en contrat à durée indéterminée, la SARL Euronégoce ne pouvait rompre la relation professionnelle du seul fait de l’arrivée du terme, le contrat étant seulement suspendu pendant toute la durée de l’arrêt de travail ; qu’il apparaît cependant que, par courrier recommandé avec accusé réception daté du 4 septembre 2013, soit avant l’expiration de son arrêt de travail, le salarié s’est vu remettre un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’un certificat de travail datés du 31 août 2013 ; que l’envoi de ces documents traduit la volonté non équivoque de I’employeur de mettre un terme à la relation de travail ; qu’il n’est, par ailleurs, nullement démontré que Monsieur Ludovic X..., à l’issue de son arrêt de travail, ait sollicité sa réintégration ou qu’il ait poursuivi l’exécution de son contrat, de sorte que cette absence de réaction permet de fixer la rupture effective de la relation contractuelle au 31 août 2013 ; que dans ces conditions, le contrat litigieux n’étant plus en cours, la résiliation judiciaire du contrat de travail ne pourra pas être prononcée et les demandes relatives aux rappels de salaires à compter du 15 septembre 2013 ainsi qu’à la remise de documents de fin de contrat seront rejetées ;

ALORS QUE la rupture du contrat de travail intervenue, hors la faute grave du salarié ou le cas de force majeure, durant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail est nulle ; que la cour d’appel ne pouvait, après avoir dit que la rupture du contrat de travail de M. X... intervenue le 31 aout 2013, durant la suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail, était nulle et de nul effet, lui donner effet en retenant que le salarié s’étant vu remettre par courrier recommandé avec accusé réception daté du 4 septembre 2013, soit avant l’expiration de son arrêt de travail, un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’un certificat de travail datés du 31 août 2013, l’envoi de ces documents traduisait la volonté non équivoque de I’employeur de mettre un terme à la relation de travail ; qu’en fixant la rupture effective de la relation contractuelle au 31 août 2013 la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir constaté que la relation professionnelle a pris fin par l’envoi au salarié des documents de fin de contrat, débouté Monsieur Ludovic X... de ses demandes tendant au prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail, au versement de rappels de salaires à compter du 15 septembre 2013 et à la remise de documents de fin de contrat rectifiés, dit n’y avoir lieu au versement d’indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QU’en l’espèce, c’est à bon droit que les premiers juges ont relevé que le contrat signé le 2 avril 2013 entre les parties ne répondait pas aux conditions légales et devait être requalifié, dès lors qu’’y étaient précisés deux motifs distincts de recours au contrat à durée déterminée (remplacement d’un salarié absent et accroissement d’activité) ne permettant pas de connaître pour quelle tâche précise le salarié avait été engagé …. ; qu’en application des dispositions des articles L1226-7 et L 1226-9 du Code du travail le contrat de travail à durée indéterminée du salarié victime d’un accident du travail est suspendu pendant toute la durée de l’arrêt de travail ; qu’il ne peut être rompu à l’initiative de l’employeur que si celui-ci justifie d’une faute grave ou lourde imputable au salarié ou s’il démontre son impossibilité, pour un motif non lié à l’accident professionnel, de maintenir le contrat de l’employé ; qu’en vertu de l’article L 1226-13 du Code du Travail, le non respect de ces dispositions entraîne la nullité de la rupture ; qu’à défaut de demande de réintégration dans l’entreprise, le salarié est en droit de réclamer une indemnité destinée à réparer le préjudice subi ne pouvant être inférieure à celle prévue par l’article L 1235-3 du Code du Travail, soit à 6 mois de salaire, outre une indemnité compensatrice de préavis et le cas échéant, s’il justifie d’un an d’ancienneté, une indemnité de licenciement ; qu’en l’espèce, il est constant que Monsieur Ludovic X... était en arrêt de travail au moment où son contrat initial devait prendre fin ; qu’or, par l’effet de la requalification en contrat à durée indéterminée, la SARL Euronégoce ne pouvait rompre la relation professionnelle du seul fait de l’arrivée du terme, le contrat étant seulement suspendu pendant toute la durée de l’arrêt de travail ; qu’il apparaît cependant que, par courrier recommandé avec accusé réception daté du 4 septembre 2013, soit avant l’expiration de son arrêt de travail, le salarié s’est vu remettre un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’un certificat de travail datés du 31 août 2013 ; que l’envoi de ces documents traduit la volonté non équivoque de I’employeur de mettre un terme à la relation de travail ; qu’il n’est, par ailleurs, nullement démontré que Monsieur Ludovic X..., à l’issue de son arrêt de travail, ait sollicité sa réintégration ou qu’il ait poursuivi l’exécution de son contrat, de sorte que cette absence de réaction permet de fixer la rupture effective de la relation contractuelle au 31 août 2013 ; que dans ces conditions, le contrat litigieux n’étant plus en cours, la résiliation judiciaire du contrat de travail ne pourra pas être prononcée et les demandes relatives aux rappels de salaires à compter du 15 septembre 2013 ainsi qu’à la remise de documents de fin de contrat seront rejetées ;

ALORS QUE le salarié, dont le licenciement est nul, a le droit de réclamer sa réintégration dans son emploi ; qu’en l’espèce, il ressort de la procédure que le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 7 novembre 2013 pour solliciter le paiement de ses salaires à compter du 15 septembre 2013, date de la fin de son arrêt pour accident du travail et sa réintégration dans l’entreprise ; qu’en affirmant que le salarié ne démontrait pas avoir sollicité sa réintégration, la cour d’appel a méconnu les termes du litige et violé l’article 4 du code de procédure civile ;

ALORS QUE l’employeur est tenu de payer sa rémunération et de fournir un travail au salarié qui se tient à sa disposition ; qu’il appartient à l’employeur de démontrer que le salarié n’est pas resté à sa disposition ; qu’en l’espèce, pour rejeter la demande du salarié en paiement des salaires, la cour d’appel s’est bornée à relever l’absence de réaction du salarié à réception des documents de fin de contrat ; qu’en statuant ainsi, sans constater que l’employeur avait démontré que le salarié avait refusé d’exécuter son travail ou ne s’était pas tenu à sa disposition, la cour d’appel a inversé la charge de la preuve en violation des articles 1315 du code civil et L. 1221-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté le salarié de ses demandes tendant au prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail, au versement de rappels de salaires à compter du 15 septembre 2013 et à la remise de documents de fin de contrat rectifiés, et dit n’y avoir lieu au versement d’une indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QU’en l’espèce, c’est à bon droit que les premiers juges ont relevé que le contrat signé le 2 avril 2013 entre les parties ne répondait pas aux conditions légales et devait être requalifié, dès lors qu’’y étaient précisés deux motifs distincts de recours au contrat à durée déterminée (remplacement d’un salarié absent et accroissement d’activité) ne permettant pas de connaître pour quelle tâche précise le salarié avait été engagé …. ; qu’en application des dispositions des articles L1226-7 et L 1226-9 du Code du travail le contrat de travail à durée indéterminée du salarié victime d’un accident du travail est suspendu pendant toute la durée de l’arrêt de travail ; qu’il ne peut être rompu à l’initiative de l’employeur que si celui-ci justifie d’une faute grave ou lourde imputable au salarié ou s’il démontre son impossibilité, pour un motif non lié à l’accident professionnel, de maintenir le contrat de l’employé ; qu’en vertu de l’article L 1226-13 du Code du Travail, le non respect de ces dispositions entraîne la nullité de la rupture ; qu’à défaut de demande de réintégration dans l’entreprise, le salarié est en droit de réclamer une indemnité destinée à réparer le préjudice subi ne pouvant être inférieure à celle prévue par l’article L 1235-3 du Code du Travail, soit à 6 mois de salaire, outre une indemnité compensatrice de préavis et le cas échéant, s’il justifie d’un an d’ancienneté, une indemnité de licenciement ; qu’en l’espèce, il est constant que Monsieur Ludovic X... était en arrêt de travail au moment où son contrat initial devait prendre fin ; qu’or, par l’effet de la requalification en contrat à durée indéterminée, la SARL Euronégoce ne pouvait rompre la relation professionnelle du seul fait de l’arrivée du terme, le contrat étant seulement suspendu pendant toute la durée de l’arrêt de travail ; qu’il apparaît cependant que, par courrier recommandé avec accusé réception daté du 4 septembre 2013, soit avant l’expiration de son arrêt de travail, le salarié s’est vu remettre un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’un certificat de travail datés du 31 août 2013 ; que l’envoi de ces documents traduit la volonté non équivoque de I’employeur de mettre un terme à la relation de travail ; qu’il n’est, par ailleurs, nullement démontré que Monsieur Ludovic X..., à l’issue de son arrêt de travail, ait sollicité sa réintégration ou qu’il ait poursuivi l’exécution de son contrat, de sorte que cette absence de réaction permet de fixer la rupture effective de la relation contractuelle au 31 août 2013 ; que dans ces conditions, le contrat litigieux n’étant plus en cours, la résiliation judiciaire du contrat de travail ne pourra pas être prononcée et les demandes relatives aux rappels de salaires à compter du 15 septembre 2013 ainsi qu’à la remise de documents de fin de contrat seront rejetées ;

ALORS QUE le salarié dont le contrat est en cours peut demander la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de son employeur en cas d’inexécution par celui-ci de ses obligations contractuelles, lorsque ces manquements sont d’une gravité suffisante et de nature à empêcher la poursuite du contrat ; que lorsqu’elle est prononcée, la résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à la date de la décision judiciaire la prononçant ; qu’en ne recherchant pas comme elle y était invitée si l’employeur n’avait pas manqué gravement à ses obligations contractuelles en prononçant un licenciement nul et en ne fournissant pas du travail au salarié qui avait demandé sa réintégration, la cour d’appel a privé de base légale sa décision en violation des articles 1184 du code civil et L. 1231-1 du code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit n’y avoir lieu au versement d’une indemnité de licenciement ;

AUX MOTIFS QU’en revanche, le salarié ne justifiant pas d’une année d’ancienneté dans l’entreprise, ne pourra prétendre à une indemnité de licenciement ;

1°) ALORS QUE le salarié victime d’un licenciement nul et qui ne réclame pas sa réintégration a droit, quelle que soit son ancienneté dans l’entreprise, et en toute hypothèse, d’une part, aux indemnités de rupture, d’autre part, à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à six mois de salaire ; qu’en refusant d’accorder au salarié, dont la rupture du contrat de travail intervenue le 31 août 2013 a été déclarée nulle et de nul effet, une indemnité de licenciement en raison d’une ancienneté inférieure à un an, la cour d’appel a violé les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°) ALORS QUE, le licenciement étant nul, et la relation de travail s’étant poursuivie du fait de la demande de réintégration formulée dès la saisine du conseil de prud’hommes tendant à la résiliation judiciaire du contrat, le salarié avait plus d’un an d’ancienneté à la date à laquelle la résiliation a été prononcée par le premier juge ; qu’en refusant d’accorder au salarié, dont la rupture du contrat de travail intervenue le 31 août 2013 a été déclarée nulle et de nul effet, une indemnité de licenciement en raison d’une ancienneté inférieure à un an, la cour d’appel a violé les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1234-9 du code du travail

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir débouté le salarié de sa demande de paiement en dommages-intérêts en réparation du prêt de main-d’oeuvre illicite ;

AUX MOTIFS QU’en application des dispositions de l’article L8241- l1du Code du travail, en dehors des cas limitativement énumérés par la Loi, toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main d’oeuvre est interdite ; qu’une opération de prêt de main-d’oeuvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition ; que la chambre sociale de la Cour de Cassation a eu l’occasion de rappeler qu’un prêt de main d’oeuvre est licite si l’opération (non lucrative) consiste à mettre au service d’une société, la transmission d’un savoir faire on la mise en oeuvre d’une technicité qui relève de la spécificité propre de l’entreprise prêteuse et si cette dernière conserve l’autorité sur son personnel et exerce un contrôle sur la réalisation du travail ; qu’en l’espèce, il est versé aux débats un contrat de prestations de services de mise à disposition du matériel et de personnel en date du 14 mars 2003, conclu entre la société Euronégoce, représentée par Monsieur Guy Y...et la Société Nouvelle Herboux, représentée par Monsieur Rémi Z..., pour une durée indéterminée, lequel stiple que « dans le cadre de leurs relations commerciales, la Société Euronégoce, spécialisée dans le démontage et le traitement de tous métaux met à la disposition de la société SNH du personnel ainsi que du matériel représenté par une grue et une mini pelle, ainsi que divers matériels » ; que cette convention mentionne que « la facturation sera établie de la façon suivante :- une prestation horaire de 46 euros par salarié ainsi que 75 euros par heure d’utilisation du matériel » et précise que « le personnel et le matériel restent sous la responsabilité de la société Euronégoce » ; qu’il est également transmis les extraits Kbis des sociétés Nouvelle Herboux et Euronégoce, attestant de ce qu’il s’agit de deux entités juridiques distinctes même si elles ont pour dirigeant la même personne ; que l’employeur produit, par ailleurs, une attestation de Monsieur Jean-François A...en date du 27 janvier 2014, aux termes de laquelle ce dernier affirme que « Monsieur X... faisait partie de ses collaborateurs au sein de la société Euronégoce » et qu’étant son supérieur hiérarchique, il lui donnait ses tâches de travail ; que l’examen de la déclaration d’accident du travail établie le 30 août 2013 (pièce n° 2 partie appelante) fait d’ailleurs apparaître que Monsieur A... a été la première personne avisée lors de la chute de Monsieur Ludovic X... sur son lieu de travail, ce qui tend à établir la réalité du lien de subordination entre le salarié et la SARL Euronégoce ; que l’ensemble de ces pièces permet de conclure an caractère licite de la convention de mise à disposition et d’écarter les arguments de Monsieur Ludovic X..., lesquels ne reposent sur aucun élément probant ;

1°) ALORS QU’en application de l’article L. 8241-1 du code du travail, une opération de prêt de main-d’oeuvre ne poursuit pas de but lucratif lorsque l’entreprise prêteuse ne facture à l’entreprise utilisatrice, pendant la mise à disposition, que les salaires versés au salarié, les charges sociales afférentes et les frais professionnels remboursés à l’intéressé au titre de la mise à disposition ; qu’en affirmant que la mise à disposition de la société SNH de M. X..., engagé par la société Euronégoce par contrat à durée déterminée au double motif d’un surcroît d’activité et du remplacement d’un salarié absent, constituait une opération de prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, sans constater que les 46 euros facturés par heure par salarié par la société Euronégoce à la société SNH couvraient seulement les salaires versés au salarié et les charges sociales, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 8241-1 du code du travail ;

2°) ALORS QU’en outre, en application de l’article L. 8241-2 du code du travail, en sa rédaction en vigueur au 2 avril 2013, le prêt de maind’oeuvre à but non lucratif conclu entre entreprises requiert, d’une part l’accord du salarié concerné, d’autre part une convention de mise à disposition entre l’entreprise prêteuse et l’entreprise utilisatrice, qui en définit la durée et mentionne l’identité et la qualification du salarié concerné, ainsi que le mode de détermination des salaires, des charges sociales et des frais professionnels qui seront facturés à l’entreprise utilisatrice par l’entreprise prêteuse et enfin un avenant au contrat de travail, signé par le salarié, précisant le travail confié dans l’entreprise utilisatrice, les horaires et le lieu d’exécution du travail, ainsi que les caractéristiques particulières du poste de travail ; qu’en ne recherchant pas si, en l’espèce, ces formalités substantielles, conditionnant la validité de la convention emportant du prêt de main d’oeuvre à but non lucratif, étaient en l’espèce respectées, quand la société Euronégoce avait engagé M. X... par contrat à durée déterminée au double motif d’un surcroît d’activité et du remplacement d’un salarié absent, pour le mettre à disposition de la société SNH, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions.

Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Euronégoce, demanderesse au pourvoi incident.

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société EURONEGOCE à payer à Monsieur X... les sommes de 414, 90 €

à titre d’indemnité de préavis, 41, 90 € au titre des congés payés y afférents et 9. 944, 70 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la rupture du contrat de travail requalifié et les conséquences financières » : en application des dispositions des articles L1226-7 et L 1226-9 du Code du travail, le contrat de travail à durée indéterminée du salarié victime d’un accident du travail est suspendu pendant toute la durée de l’arrêt de travail ; qu’il ne peut être rompu à l’initiative de l’employeur que si celui-ci justifie d’une faute grave ou lourde imputable au salarié ou s’il démontre son impossibilité, pour un motif non lié à l’accident professionnel, de maintenir le contrat de l’employé ; qu’en vertu de l’article L. 1226-13 du Code du Travail, le non-respect de ces dispositions entraîne la nullité de la rupture ; qu’à défaut de demande de réintégration dans l’entreprise, le salarié est en droit de réclamer une indemnité destinée à réparer le préjudice subi ne pouvant être inférieure à celle prévue par l’article L 1235-3 du Code du Travail, soit à 6 mois de salaire, outre une indemnité compensatrice de préavis et le cas échéant, s’il justifie d’un an d’ancienneté, une indemnité de licenciement ; qu’en l’espèce, il est constant que Monsieur Ludovic X... était en arrêt de travail au moment où son contrat initial devait prendre fin ; or que par l’effet de la requalification en contrat à durée indéterminée, la SARL EURONEGOCE ne pouvait rompre la relation professionnelle du seul fait de l’arrivée du terme, le contrat étant seulement suspendu pendant toute la durée de l’arrêt de travail ; qu’il apparaît cependant que, par courrier recommandé avec accusé réception daté du 4 septembre 2013, soit avant l’expiration de son arrêt de travail, le salarié s’est vu remettre un reçu pour solde de tout compte ainsi qu’un certificat de travail datés du 31 août 2013 ; que l’envoi de ces documents traduit la volonté non équivoque de l’employeur de mettre un terme à la relation de travail ; qu’il n’est par ailleurs nullement démontré que Monsieur Ludovic X..., à l’issue de son arrêt de travail, ait sollicité sa réintégration ou qu’il ait poursuivi l’exécution de son contrat, de sorte que cette absence de réaction permet de fixer la rupture effective de la relation contractuelle au 31 août 2013 ; que dans ces conditions, le contrat litigieux n’étant plus en cours, la résiliation judiciaire du contrat de travail ne pourra pas être prononcée et les demandes relatives aux rappels de salaires à compter du 15 septembre 2013 ainsi qu’à la remise de documents de fin de contrat seront rejetées ; qu’au regard de l’ancienneté de Monsieur Ludovic X... dans l’entreprise (4 mois et 29 jours) et conformément aux dispositions légales et conventionnelles (convention industrie et commerce de la récupération, article 78), applicables au présent litige, la SARL EURONEGOCE sera condamnée à lui verser les sommes suivantes : 414, 90 euros au titre de l’indemnité de préavis (1 semaine de préavis pour tout salarié justifiant d’une ancienneté inférieure à 6 mois), 41, 49 euros au titre des congés payés y afférents, 9. 944, 70 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi (correspondant au minimum prévu par la loi soit 6 mois de salaires) ; qu’en revanche, le salarié ne justifiant pas d’une année d’ancienneté dans l’entreprise, ne pourra prétendre à une indemnité de licenciement » ;

ALORS QUE Monsieur X... avait seulement demandé la résiliation judiciaire du contrat de travail et la condamnation de la société EURONEGOCE à lui payer diverses indemnités à ce titre ; qu’il n’avait pas demandé, à titre subsidiaire, l’indemnisation des conséquences du licenciement nul en date du 31 août 2013 ; que la cour d’appel, dès lors qu’elle déboutait le salarié de sa demande de résiliation judiciaire, ne pouvait lui octroyer des sommes non demandées sur le fondement de la rupture intervenue antérieurement ; qu’en statuant de la sorte elle a méconnu l’objet du litige, en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d’appel de Douai , du 30 septembre 2015