Msa - décision de principe

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 29 novembre 2016

N° de pourvoi : 15-85887

ECLI:FR:CCASS:2016:CR05322

Non publié au bulletin

Rejet

M. Guérin (président), président

SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
"-" M. Alain X...,
contre l’arrêt de la cour d’appel de VERSAILLES, 9e chambre, en date du 17 septembre 2015, qui, dans la procédure suivie contre lui, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 18 octobre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller RICARD, les observations de la société civile professionnelle MATUCHANSKY, POUPOT et VALDELIÈVRE, de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, THOUVENIN et COUDRAY, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général CUNY ;
Vu les mémoires ampliatif personnel, et le mémoire en défense produits ;
Sur la recevabilité du mémoire personnel :
Attendu que ce mémoire, produit au nom de M. Alain X..., par un avocat au barreau de Versailles, ne porte pas la signature du demandeur ; que, dès lors, en application des articles 584 et suivants du code de procédure pénale, il n’est pas recevable et ne saisit pas la Cour de cassation des moyens qu’il pourrait contenir ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme, 1382 du code civil, L. 8221-5 et L. 8224-1 du code du travail, 2, 3, 464, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;
” en ce que l’arrêt attaqué a confirmé le jugement en ce qu’il a condamné M. Alain X... à payer à la Mutualité sociale agricole Beauce Coeur de Loire, les sommes de 9 762, 15 euros en principal, à titre de dommages et intérêts et celle de 2 000 euros en compensation du trouble de gestion, avec intérêts de droit à compter du jugement ;
” aux motifs propres que, c’est à bon droit et par des motifs pertinents que la cour adopte, que le premier juge, statuant sur les intérêts civils, a, d’une part, rejeté les moyens invoqués par le conseil de M. X..., tendant à l’irrecevabilité des demandes de la mutualité sociale agricole et à l’irrégularité prétendue du contrôle, et, d’autre part, a dit, après avoir fait observer que la condamnation pénale de M. X..., était définitive, que les demandes formulées par la partie civile, la mutualité sociale agricole, consistaient en l’allocation de dommages-intérêts correspondant au solde des cotisations salariales dont il était redevable vis-à-vis d’elle, pour les faits d’exécution de travail dissimulé ; que la somme allouée par le tribunal a été calculée à partir des sommes dues, en conséquence directe des infractions commises par le condamné, M. X..., soit le montant des cotisations frauduleusement éludées, selon décompte arrêté au 17 juillet 2013, soit 23 506 euros, la majoration de retard s’appliquant à ces cotisations pour la même période, soit 1 874, 84 euros, les pénalités légales de 96 euros et le montant de la CSG éludée du fait de la fraude pour cette période, soit 1 865 euros, sommes desquelles, à juste titre, le premier juge a déduit un crédit de cotisations d’un montant de 17 731, 26 euros ; que la somme de 9 762, 15 euros, ne peut ainsi qu’être confirmée ; que le contenu des écritures de M. X..., revenant sur la régularité du contrôle, ne peut qu’être écarté et considéré comme dénué de pertinence ; que, sur le décompte effectué par le tribunal, la cour constate que l’appelant M. X... ne semble qu’insinuer qu’il ne résulterait pas directement des infractions dont le condamné a été déclaré coupable, alors que le premier juge démontre clairement le contraire, par une motivation adaptée et suffisante ; que, sur le bénéfice d’une somme de 2 000 euros allouée par le premier juge, en compensation du trouble de gestion, le prévenu, qui conclut au débouté, ne formule, dans ses conclusions déposées en appel, aucune contestation argumentée ; qu’en revanche, le premier juge avait répondu à la demande formulée à ce titre par la MSA de manière satisfaisante ; qu’en l’absence de véritable contestation de la part de M. X... et de demande nouvelle de la part de la MSA à ce titre cette somme sera confirmée ;
” et aux motifs adoptés que, par jugement en date du 8 juin 2011, (en réalité 7 juillet 2011) le tribunal correctionnel de Chartres a reconnu M. X..., coupable de plusieurs infractions, touchant à la législation du travail ainsi qu’au droit des étrangers ; que cette même décision a reçu la Mutualité sociale agricole dans sa constitution de partie civile, mais seulement en ce qu’elle visait M. X... en son nom propre ; que la Mutualité sociale agricole, après avoir sollicité plusieurs renvois, a déposé des conclusions sur intérêts civils le 26 juillet 2013 ; que le report de l’examen d’une affaire, soit à la demande d’une partie, comme en l’espèce, soit à l’initiative de la juridiction, est un acte administratif, qui n’a pas d’effet interruptif sur le délai de prescription ; que l’article 10 du code de procédure pénale dispose que « lorsque l’action civile est exercée devant une juridiction répressive, elle se prescrit selon les règles de l’action publique », soit trois années en matière délictuelle, sauf, si une mesure d’instruction a été ordonnée dans le cadre civil, ce qui n’est pas le cas ; que l’article 386 du code de procédure civile visant la péremption d’instance ne s’applique pas davantage à une instance suivie devant une juridiction répressive et qu’en conséquence, la Mutualité sociale agricole est toujours recevable à faire valoir ses demandes ; que le jugement du 8 juin 2011, aujourd’hui définitif, a statué sur la culpabilité de M. X... et sur la recevabilité de la constitution de partie civile de la Mutualité sociale agricole ; que tout moyen tiré de la nullité prétendue des procédures de contrôle ne peut être examiné sans contrevenir à l’autorité de la chose jugée ; que, si la Mutualité sociale agricole reconnaît qu’il existe une instance pendante devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, il apparait qu’elle ne porte que sur les cotisations de salaires réclamées à la Sarl des Avenages et ne concerne pas M. X... en son nom propre ; que les demandes présentes de la Mutualité sociale agricole dans le cadre de l’instance pénale visent à obtenir du condamné, M. X... ès-qualités d’employeur de main d’oeuvre, des dommages et intérêts dont le montant représente le solde des cotisations salariales dont il reste redevable, vis-à-vis de l’organisme social, suite à sa condamnation définitive pour travail dissimulé ; que, c’est à bon droit et en se fondant sur une décision définitive quant à la culpabilité de M. X..., que la Mutualité sociale agricole réclame à celui-ci paiement de sommes dues en conséquence directe de l’infraction dont il a été reconnu coupable :- le montant des cotisations frauduleusement éludées, selon décompte arrêté au 17 juillet 2013 : 23 506 euros,- les majorations de retard s’appliquant à ces cotisations, pour la période considérée : 1 874, 74 euros,- les pénalités légales, soit 96 euros,- le montant de la CSG éludée, du fait de la fraude, pour la même période : 1 865 euros, sommes desquelles il convient de déduire un crédit de cotisations (17 731, 26 euros) ; que M. X... sera donc condamné à payer à la Mutualité sociale agricole une somme de 9 762, 15 euros ; que la recherche et la caractérisation, puis la poursuite des fraudes commises engendre pour la Mutualité sociale agricole un surcoût de fonctionnement, au détriment de ses missions sociales ; qu’il lui sera alloué, de ce chef, une somme de 2 000 euros ;
” 1°) alors que seul le préjudice résultant directement de l’infraction pour laquelle, le prévenu est déclaré coupable peut donner lieu à réparation ; que M. X... faisait valoir que la Mutualité sociale agricole avait réclamé, sous forme de dommages et intérêts, le montant de cotisations qu’il aurait prétendument éludées, ce qui relevait de l’action en recouvrement des cotisations obéissant à des règles spécifiques prévues par le code de la sécurité sociale et ne pouvait constituer, au sens de l’article 2 du code de procédure pénale, la réparation du préjudice causé par l’infraction ; qu’en se bornant à énoncer que M. X... ne semble qu’insinuer que le décompte effectué par le tribunal ne résulterait pas directement des infractions, dont il a été déclaré coupable alors que le premier juge démontre le contraire, sans expliquer, comme elle y était invitée, les raisons pour lesquelles la demande de la Mutualité sociale agricole ne relevait pas exclusivement de la compétence du tribunal de sécurité sociale, ni en quoi la Mutualité sociale agricole avait subi un préjudice, résultant directement de la commission du délit de travail dissimulé, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ;
” 2°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que, l’insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que M. X... faisait valoir que les cotisations réclamées par la Mutualité sociale agricole visaient vraisemblablement cinq salariés, mais qu’il n’en avait personnellement employé que deux, M. Y..., dont l’état civil exact était A..., et M. Z..., qui avaient été respectivement déclarés le 10 septembre 2007 et le 1er octobre 2008, et dont les cotisations afférentes à leurs contrats de travail avaient été réglées pour un montant reconnu par la Mutualité sociale agricole de 17 731, 26 euros ; qu’en estimant, pour allouer la somme de 9 762, 15 euros à la Mutualité sociale agricole à titre de réparation de son préjudice que M. X... ne semblait qu’insinuer que le décompte effectué par le tribunal ne résulterait pas directement des infractions, dont il avait été déclaré coupable alors que le premier juge démontrait le contraire, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, s’agissant des deux salariés employés par M. X..., les cotisations n’avaient pas été réglées pour un montant reconnu par la Mutualité sociale agricole de 17 731, 26 euros, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision ;
” 3°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l’insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que M. X... faisait valoir que le tribunal des affaires de sécurité sociale d’Eure et Loir, dans un litige opposant la Sarl des Avenages et la Mutualité sociale agricole dans le cadre d’une opposition à contrainte, avait, dans un jugement en date du 11 décembre 2013, relevé que le calcul de la Mutualité sociale agricole, qui concernait cinq salariés-, dont les deux employés par M. X..., était explicité mais que ce calcul n’était pas établi salarié par salarié et ne pouvait donc être repris, et qu’en l’état la contrainte ne pouvait être validée, ce dont il s’évinçait qu’il existait une certaine confusion quant au montant des cotisations prétendument éludées par M. X... et par la SARL des Avenages, la Mutualité sociale agricole n’hésitant pas à réclamer des sommes déjà demandées dans l’instance pénale (conclusions d’appel de M. X... p. 3 et 4) ; que faute d’avoir répondu à ces conclusions dirimantes de nature à remettre sérieusement en cause le décompte de la Mutualité sociale agricole produit devant la juridiction correctionnelle, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision “ ;
Attendu que, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la demande de la Mutuelle sociale agricole Beauce coeur de Loire (MSA), partie civile, consiste en l’allocation de dommages-intérêts correspondant au solde des cotisations salariales dont X... est redevable au titre des conséquences dommageables du délit de travail dissimulé dont il a été déclaré coupable ; que les juges ajoutent que le montant de la somme au paiement de laquelle le prévenu a été condamné a été calculée à partir des sommes dues en conséquence directe de cette infraction et déduction faite des sommes versées par le demandeur ;
Attendu que, dès lors que les articles L. 142-1 et L. 142-2 du code de la sécurité sociale, qui attribuent compétence au tribunal des affaires de sécurité sociale pour régler les différends auxquels donne lieu l’application des législation et réglementation de sécurité sociale, ne dérogent pas au principe selon lequel la juridiction pénale est compétente pour statuer sur la demande formée par la partie civile en paiement de sommes dues en conséquence directe de l’infraction de travail dissimulé dont le prévenu a été reconnu coupable, la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondant aux conclusions, souverainement apprécié que le montant du préjudice était égal aux cotisations éludées et fixé le montant de celles-ci ;
D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. X... devra payer à la Mutuelle sociale agricole Beauce coeur de Loire en application de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-neuf novembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles , du 17 septembre 2015