Arrêt de principe - cumul procédures recouvrement et partie civile

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 5 octobre 2004

N° de pourvoi : 04-84056

Publié au bulletin

Cassation partielle sans renvoi

M. Cotte, président

M. Le Corroller., conseiller apporteur

Mme Commaret., avocat général

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq octobre deux mille quatre, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller Le CORROLLER et les conclusions de Mme l’avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

"-" X... Michel,

contre l’arrêt de la cour d’appel de VERSAILLES, 9ème chambre, en date du 13 mai 2004, qui, dans la procédure suivie contre lui pour infraction au Code de la sécurité sociale, sur renvoi après cassation, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire personnel produit et les observations complémentaires formulées par le demandeur après communication du sens des conclusions de l’avocat général ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l’article 547 du Code de procédure pénale dans sa rédaction issue de la loi du 9 mars 2004 ;

Attendu que les mentions de l’arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel, qui a statué en application de l’article 547 du Code de procédure pénale, était présidée par un conseiller désigné par ordonnance du premier président pour présider la chambre en remplacement du président empêché ;

D’où il suit que le moyen ne peut qu’être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 392-2 du Code de procédure pénale ;

Attendu que le moyen, qui revient à reprocher à la juridiction de renvoi d’avoir statué en conformité de la doctrine de l’arrêt de cassation qui l’avait saisie, est irrecevable ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 du Code de procédure pénale et L. 244-9 du Code de la sécurité sociale ;.

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 2 mai 2000, l’union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocation familiales (URSSAF) de Paris a fait citer Michel X... devant le tribunal de police pour défaut de paiement de cotisations de sécurité sociale par un employeur ou travailleur indépendant, en lui réclamant des dommages-intérêts au titre d’un préjudice distinct de celui résultant de l’absence de règlement des cotisations et compensé par les majorations de retard ; que, par ailleurs, l’URSSAF a délivré, le 21 septembre 1999, au titre des mêmes cotisations, une contrainte signifiée le 10 février 2000 et portant paiement de la somme due, d’un montant de 5 963 francs, outre 596 francs de majorations de retard ; que cet acte a été validé par un jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale, confirmé par arrêt du 12 novembre 2002 ;

Attendu qu’en cet état, si c’est à tort que la cour d’appel a énoncé qu’aucune action civile n’avait été exercée, l’arrêt n’encourt pas pour autant la censure, au regard de l’article 5 du Code de procédure pénale, dès lors que les demandes portées devant la juridiction civile et la juridiction répressive n’ont ni le même objet ni la même cause ;

D’où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 244-2, L. 244-3, L. 244-9 et R. 133-3 du Code de la sécurité sociale ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les moyens, qui se bornent à reprendre l’argumentation que, par une motivation exempte d’insuffisance comme de contradiction, la cour d’appel a écartée à bon droit, ne sauraient être accueillis ;

Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, R. 243-18 du Code de la sécurité sociale et 593 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu’en allouant des dommages intérêts, la cour d’appel n’a fait qu’user de son pouvoir d’apprécier souverainement l’existence d’un dommage distinct de celui résultant du défaut de paiement des cotisations, lequel est compensé par les majorations de retard qui ont été réclamées, avec ces cotisations, dans le cadre de l’instance civile ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le septième moyen de cassation, pris de la violation des articles 475-1 et 618-1 du Code de procédure pénale et 1351 du Code civil ;

Vu l’article 475-1 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que la juridiction correctionnelle de renvoi ne peut condamner l’auteur de l’infraction à verser à la partie civile une somme correspondant aux frais non payés par l’Etat et exposés par elle devant la Cour de cassation ;

Attendu que l’arrêt critiqué, après avoir énoncé que la procédure s’est poursuivie pendant 3 ans, notamment devant la Cour de cassation, puis devant la cour de renvoi, condamne l’auteur de l’infraction à payer à la partie civile, la somme de 2 000 euros au titre de l’article 475- 1 du Code de procédure pénale pour “l’ensemble de la procédure postérieure au jugement du 13 juin 2000” frappé d’appel ;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, alors que, de surcroît, la partie civile, qui n’avait pas obtenu d’indemnité devant la Cour de cassation, avait limité sa demande aux seuls frais par elle exposés devant la juridiction de renvoi, la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

qu’elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d’appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l’article L. 131-5 du Code de l’organisation judiciaire ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives à la somme allouée au titre de l’article 475-1 du Code de procédure pénale, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Versailles, en date du 13 mai 2004, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

FIXE à 1 500 euros la somme que Michel X... devra payer à l’URSSAF en vertu de l’article 475-1 du Code de procédure pénale, au titre des seuls frais exposés devant la juridiction de renvoi ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

DIT n’y avoir lieu à application, au profit de Michel X..., de l’article 618-1 du Code de procédure pénale ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L.131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Le Corroller conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

Publication : Bulletin criminel 2004 N° 231 p. 830

Décision attaquée : Cour d’appel de Versailles , du 13 mai 2004

Titrages et résumés : JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Composition - Cour d’appel - Président siégeant à juge unique - Président empêché - Remplacement - Conditions - Détermination. Lorsqu’elle est composée, par application de l’article 547 du Code de procédure pénale, de son seul président de chambre, la chambre des appels correctionnels peut, en cas d’empêchement de ce magistrat, être présidée par le conseiller qui a été désigné pour le remplacer par le premier président de la cour d’appel, selon les modalités prévues aux articles L. 710-1 et R. 213-6 et suivants du Code de l’organisation judiciaire.

Textes appliqués :
* Code de l’organisation judiciaire L710-1, R213-6 et suivants
* Code de procédure pénale 547