Faux prestataire de services détaché - agriculture

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 3 mars 2009

N° de pourvoi : 07-81043

Publié au bulletin

Rejet

M. Joly (conseiller doyen faisant fonction de président), président

Mme Guirimand, conseiller apporteur

M. Salvat, avocat général

SCP Capron, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
 l’EARL CIDRES X...,

 l’EURL CIDRES Y...,
contre l’arrêt de la cour d’appel de RENNES, 3e chambre, en date du 18 janvier 2007, qui, pour prêt illicite de main d’oeuvre et travail dissimulé, les a condamnées, chacune, à une amende de 1500 euros avec sursis ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demanderesses ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure qu’au cours des mois d’octobre et de novembre 2004, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y..., toutes deux dirigées par Dominique X..., ont eu recours, pour le ramassage de pommes, aux services de travailleurs polonais recrutés par l’intermédiaire de la société de droit britannique Eurokontakt déclarant agir en tant que prestataire de services des entreprises précitées qui fournissaient à la fois le matériel et le logement des ouvriers ; que la société Eurokontact mettait cette main-d’oeuvre à la disposition des demanderesses pour deux semaines ou pour la durée de la saison moyennant une rémunération horaire de 9, 51 euros, toutes charges comprises, sur le montant de laquelle elle percevait 3 % ;
Attendu qu’à la suite de ces faits, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... ont été poursuivies devant le tribunal correctionnel, pour prêt illicite de main-d’oeuvre et travail dissimulé, et déclarées coupables de ces infractions ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l’article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, des articles 49 et 50 du Traité instituant la Communauté européenne, des articles L. 125-3, L. 152-3-1 et L. 341-5, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, du code du travail, des articles 1er à 16 du décret n° 95-182 du 21 février 1995 pris pour l’application au secteur agricole de l’article 36 de la loi quinquennale relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle (article L. 341-5 du code du travail), de l’article 112-1 du code pénal et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
” en ce que l’arrêt attaqué a déclaré l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de prêt illicite de main-d’oeuvre et a condamné chacune d’entre elles à une peine de 1500 euros d’amende avec sursis ;
” aux motifs propres que “ le 19 novembre 2004, M. Z..., contrôleur du travail au service départemental de l’inspection du travail, de l’emploi et de la politique sociale agricole (Itepsa) à Quimper signalait au procureur de la République une situation présumée de fausse sous-traitance de travailleurs polonais qui intervenaient sur des vergers exploités par l’Earl Les cidres X... à Ergué-Gabéric et Combrit ; que sur réquisition, les gendarmes de Quimper procédaient à un contrôle sur les lieux le 24 novembre 2004 et constataient la présence à Ergué-Gabéric de six cueilleurs de nationalité polonaise dans un verger exploité par l’Eurl et de six cueilleurs de nationalité polonaise dans un verger exploité par l’Earl situé “ jardin botanique “ à Combrit ; que des vérifications entreprises auprès de la Msa du Finistère établissaient qu’à la date du contrôle, aucune de ces personnes ne figurait au nombre des salariés de ces entreprises, qui avaient par ailleurs déclaré respectivement 51 et 62 salariés pour la saison ; que Dominique X... expliquait aux enquêteurs qu’il avait dû faire face en 2004 à une récolte de pommes spécialement abondante ; qu’il avait tout d’abord procédé comme les années précédentes en embauchant des saisonniers par voie d’annonces dans la presse locale et par l’intermédiaire de l’Anpe ; qu’il avait ensuite souhaité recruter directement des Polonais, mais n’avait pu obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail ; qu’il avait enfin appris grâce à un article de presse qu’une société proposait des prestations de services dans le domaine agricole et était ainsi rentré en contact avec une société anglaise, la société Eurokontakt ; qu’après quelques échanges par mail et la venue sur place de Justina B..., représentante d’Eurokontakt en Pologne, il établissait avec cette société le 4 novembre 2004 un contrat de prestation de services pour le ramassage des pommes, pour une durée minimale de 15 jours ; qu’en droit, le prêt de main-d’oeuvre à titre lucratif ne peut être effectué de manière licite que par une entreprise de travail temporaire ; qu’il est établi que la société Eurokontakt n’est pas une société de travail temporaire, l’article L. 341-3 prévoyant au demeurant qu’un contrat de travail temporaire ne permet pas l’entrée régulière en France de travailleurs étrangers ; que la mise à disposition des travailleurs polonais est intervenue dans le cadre d’un contrat de prestation de services, ce qui amène les prévenues à exciper de l’article L. 341-5 du code du travail qui concerne effectivement les salariés étrangers mis à disposition d’une entreprise française dans ce cadre ; que cependant, l’existence d’un tel contrat suppose que les conditions de la sous-traitance soient remplies, c’est-à-dire que le prix de la prestation soit convenu forfaitairement pour la tâche sous-traitée et non à l’heure, que les salariés soient affectés à une tâche spécifique pour laquelle l’entreprise utilisatrice n’a pas le savoir-faire requis, que le prestataire de services conserve son pouvoir de direction sur ses salariés et enfin que les moyens de travail du personnel appartiennent à l’entreprise sous-traitante ; qu’en l’absence en l’espèce de ces conditions ne permet pas de reconnaître la qualification de contrat de prestation de services à la convention signée entre Dominique X... ès qualités et la société Eurokontakt, ainsi que l’a exactement relevé le tribunal par des motifs appropriés et exhaustifs, que la cour fait siens, en relevant notamment que le contrat prévoyait une rémunération horaire, que le personnel polonais était sous l’autorité exclusive de M. A..., ce que ne contredit nullement le fait qu’il s’agisse d’un personnel capable d’une certaine autonomie, dès lors que c’est M. A... qui distribuait le travail, affectait les travailleurs dans l’un ou l’autre des vergers et contrôlait la qualité du ramassage ; enfin que le matériel appartenait à l’entreprise utilisatrice, le contrat de location signé à ce sujet entre les prévenues et Eurokontakt n’étant en réalité qu’un stratagème pour cacher cette évidence ; qu’en conséquence, la convention conclue entre Eurokontakt d’une part et l’Eurl Cidres de la ville d’Ys et l’Earl Cidres X... d’autre part constitue bien un prêt de main-d’oeuvre contre une rémunération prévue à l’heure, ce qui établit le caractère temporaire et l’élément matériel du délit de prêt illicite de main-d’oeuvre à titre lucratif est caractérisé ; que le tribunal a encore relevé à juste titre que l’Eurl Cidres de la ville d’Ys et l’Earl Cidres X... ne pouvaient ignorer qu’elles utilisaient du personnel étranger dans des conditions illicites, au regard du faible coût de revient de cette main-d’oeuvre, le courrier électronique échangé entre M. A... et Justina B... indiquant explicitement qu’à la suite de l’intervention de l’inspection du travail, il était impératif de relever à 5, 50 euros net la rémunération horaire convenue qui n’était pas conforme à la législation française, et demandant d’urgence une modification en ce sens du contrat établi ; que la cour ajoutera que le bulletin de paie d’un ramasseur occasionnel ayant travaillé à temps complet du 1er au 31 octobre 2004 (D33- annexe) montre que le taux horaire de 7, 60 euros pour un ouvrier embauché directement par l’Earl Cidres X... correspondait à un coût total pour l’entreprise de 15, 32 euros de l’heure, après imputation des cotisations salariales précomptées et des cotisations patronales, somme qui rapprochée du taux horaire convenu avec la société Eurokontakt de 9, 51 euros de l’heure, en ce compris la rémunération de 3 % de cette société ; que la comparaison de ces deux sommes ne pouvait laisser aucun doute à Dominique X... sur le caractère illicite du contrat, de sorte que l’élément intentionnel du délit est lui aussi établi ; que la décision des premiers juges sera en conséquence confirmée sur la culpabilité ; qu’elle sera en revanche réformée sur la peine ; qu’il doit en effet être tenu compte de l’absence de condamnation antérieure, du contexte d’urgence dans lequel il a été décidé d’avoir recours à une société étrangère, dont le site internet donnait toutes les apparences de la légalité, après un refus par l’inspection du travail d’une embauche directe de salariés étrangers et de la volonté évidente de régularisation des prévenues, dès l’intervention des services de l’inspection du travail “ (cf. arrêt attaqué, p. 4 et 5) ;
” aux motifs adoptés qu’à la suite d’un signalement transmis au parquet de Quimper par l’inspection du travail relativement à l’emploi de travailleurs étrangers dans les vergers exploités à Combrit et Ergué-Gabéric par l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres de la ville d’Ys, les militaires de la gendarmerie se présentaient sur place et constataient la présence de douze ramasseurs de pommes polonais, six dans chacun des deux vergers ; que ces hommes se trouvaient employés dans le cadre de deux contrats conclus entre l’Earl Cidres X... ou l’Eurl Cidres de la ville d’Ys d’une part et la société britannique Eurokontakt, contrats aux termes desquels la seconde agissait “ en tant que prestataire de services pour le compte des premières dans le but d’assurer le ramassage des pommes “ et mettait “ à disposition de celles-ci un nombre de ramasseurs suffisants “ ; que l’Earl ou l’Eurl fournissaient le matériel nécessaire (tracteurs, logement, carburant …), la rémunération d’Eurokontakt devant se faire “ sur une base de rémunération horaire de 9 euros 51 “ ; attendu que l’article L. 125-3 du code du travail interdit toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’oeuvre dès lors qu’elle n’est pas effectuée dans le cadre des dispositions relatives au travail temporaire ; que les prévenues affirment que les contrats les liant à la société Eurokontakt sont des contrats de sous-traitance licites et non de prêt de main-d’oeuvre ; attendu qu’il ressort tant des termes mêmes du contrat que de l’audition de Mme C..., secrétaire comptable des deux entreprises, que les ouvriers polonais étaient payés à l’heure, ce qu’ils confirment d’ailleurs unanimement ; que ces mêmes ouvriers se trouvaient sous l’autorité non de la société Eurokontakt mais de M. A... salarié des deux entreprises prévenues ; que ce dernier précise qu’il a agi avec eux “ exactement de la même manière qu’il a pu agir avec les employés saisonniers de la cidrerie “ en indiquant les rangs à ramasser, en contrôlant les postures de travail, la disposition des caisses palettes et le remplissage des seaux, en contrôlant la qualité des pommes ramassées, en comptant les pommes ramassées et en remettant aux ouvriers des avances sur salaire en numéraire ; qu’il est constant que les interventions de Justina B..., interlocutrice représentant en Pologne la société Eurokontakt, consistaient exclusivement à envoyer par SMS aux ouvriers la traduction des consignes que lui indiquait téléphoniquement M. A... et ce sur un seul des deux vergers, sur l’autre travaillant un ouvrier parlant suffisamment le français pour assurer lui-même la traduction à l’égard de ses compatriotes ; que la société Eurokontakt ne disposait ainsi d’aucune autorité sur les travailleurs concernés ; que le savoir-faire du personnel d’Eurokontakt ne présentait aucune spécificité par rapport à celui des salariés de l’Eurl Cidres de la ville d’Ys et l’Earl Cidres X... ; que le matériel destiné à l’accomplissement du travail était uniquement fourni par les entreprises utilisatrices ; que la mise à disposition de travailleurs rémunérés par l’entreprise utilisatrice en fonction des heures effectuées, sous l’autorité de cette entreprise, pour accomplir le même travail que les salariés de celle-ci et grâce au matériel fourni par elle, constitue non un contrat de sous-traitance mais un prêt de main-d’oeuvre dont il est constant qu’il n’a pas été effectué dans le cadre des dispositions relatives au travail temporaire ; que l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres de la ville d’Ys ne pouvaient ignorer qu’elles utilisaient du personnel étranger de la même manière que des travailleurs temporaires en dehors des règles applicables ; qu’il importe peu que le bénéfice qui en est résulté soit minime, d’autant qu’elles ne sont pas prévenues de marchandage ; qu’au demeurant la faiblesse de cet avantage financier résulte pour partie de l’intervention de l’inspection du travail à la suite de laquelle les 4 euros de l’heure initialement fixés comme salaire n’ont plus été considérés que comme des “ avances “ sur un salaire de 5, 50 euros (voir à ce sujet les courriers électroniques échangés entre M. A... et Justina B...) ; que l’élément intentionnel de l’infraction est donc bien constitué (cf. jugement entrepris, p. 4 et 5) ;
” alors que, de première part, il résulte des dispositions combinées de l’article L. 341-5 du code du travail, dans sa rédaction, applicable en la cause, antérieure à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, et du décret n° 95-182 du 21 février 1995 pris pour l’application au secteur agricole de cet article, que les dispositions interdisant et incriminant le prêt illicite de main-d’oeuvre ne sont pas applicables aux opérations, intervenant dans le secteur agricole, de mise à disposition d’une entreprise française, à titre temporaire, sur le territoire national, d’un salarié par une entreprise non établie en France ; qu’en déclarant, dès lors, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de prêt illicite de main-d’oeuvre et en prononçant, en conséquence, une peine correctionnelle à leur encontre pour avoir eu recours à des travailleurs polonais mis à leur disposition par la société de droit anglais Eurokontakt pour procéder au ramassage de pommes dans des vergers qu’elles exploitaient, la cour d’appel a violé les stipulations et dispositions susvisées ;
” alors qu’à titre subsidiaire et de deuxième part, toute infraction doit être définie en termes clairs et non équivoques et la loi pénale doit satisfaire aux exigences de prévisibilité et d’accessibilité qu’implique le principe de légalité des délits et des peines ; qu’en conséquence, à supposer même que les dispositions interdisant et incriminant le prêt illicite de main-d’oeuvre soient applicables aux opérations, intervenant dans le secteur agricole, de mise à disposition d’une entreprise française, à titre temporaire, sur le territoire national, d’un salarié par une entreprise non établie en France, en déclarant, dès lors, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de prêt illicite de main-d’oeuvre et en prononçant, en conséquence, une peine correctionnelle à leur encontre pour avoir eu recours à des travailleurs polonais mis à leur disposition par la société de droit anglais Eurokontakt pour procéder au ramassage de pommes dans des vergers qu’elles exploitaient, quand l’article L. 341-5 du code du travail, dans sa rédaction, applicable en la cause, antérieure à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, et le décret n° 95-182 du 21 février 1995, qui énuméraient les dispositions françaises applicables dans le cas d’un détachement temporaire sur le territoire national de salariés dans le secteur agricole par une entreprise non établie en France, ne mentionnaient pas les dispositions interdisant et incriminant le prêt illicite de main-d’oeuvre, ce dont il résultait qu’il n’était pas satisfait, dans le cas de l’espèce, aux exigences de clarté, de prévisibilité et d’accessibilité de la loi pénale, la cour d’appel a violé les stipulations et dispositions susvisées ;
” alors que, de troisième part, l’interdiction, pénalement sanctionnée, de l’opération à but lucratif consistant pour un ressortissant d’un État membre de la Communauté européenne autre que la France, qui n’a pas la qualité d’entreprise de travail temporaire, à mettre à la disposition d’une entreprise française des travailleurs ressortissant d’un autre État membre de la Communauté européenne constitue une entrave, qui n’est ni justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général, ni objectivement nécessaire, ni proportionnée, à la liberté de prestation de services de ces ressortissants communautaires garantie par les articles 49 et 50 du Traité instituant la Communauté européenne, et ceci quand bien même la convention de mise à disposition ne constituerait pas, selon le droit français, un contrat d’entreprise ; qu’en déclarant, dès lors, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de prêt illicite de main-d’oeuvre et en prononçant, en conséquence, une peine correctionnelle à leur encontre pour avoir eu recours à des travailleurs polonais mis à leur disposition par la société de droit anglais Eurokontakt pour procéder au ramassage de pommes dans des vergers qu’elles exploitaient, la cour d’appel a violé les stipulations et dispositions susvisées ;
” alors qu’en tout état de cause, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... faisaient valoir, dans leurs conclusions d’appel, que leur gérant, Dominique X..., avait pris le soin de recueillir, au préalable, les conseils d’une juriste spécialisée en droit social afin de s’assurer du caractère licite de l’opération et avait vérifié que les observations de cette juriste, notamment en ce qui concernait l’obligation de déclaration préalable auprès de la direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle qui incombait à la société Eurokontakt de la mise à disposition de ses salariés, avaient bien été respectées et qu’en conséquence, faute d’élément intentionnel, le délit de prêt illicite de main-d’oeuvre n’était pas constitué ; qu’en laissant sans réponse ce moyen péremptoire, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de réponse à conclusions et privé, par suite, sa décision de motifs “ ;
Attendu que, pour confirmer le jugement entrepris qui avait dit l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de prêt illicite de main-d’oeuvre et écarter les conclusions des prévenues qui excipaient des dispositions, antérieures à la loi du 2 août 2005, de l’article L. 341-5 du code du travail autorisant le détachement temporaire dans une entreprise française de salariés étrangers à l’occasion de prestations de services, l’arrêt énonce que l’application de ce texte suppose que les conditions d’un contrat de prestation de services soient réunies, mais qu’en la circonstance, l’opération menée s’analyse en un prêt illicite de main d’oeuvre pratiqué hors des règles du travail temporaire, dès lors que la rémunération des prestations effectuées, ne supposant aucun savoir-faire spécifique, a été calculée de façon horaire, que la société Eurokontakt n’a conservé aucune autorité sur les travailleurs et que les moyens et matériels de travail ont été fournis par les sociétés poursuivies ; que les juges ajoutent que les prévenues ne pouvaient ignorer qu’elles utilisaient du personnel étranger de la même manière que de la main-d’oeuvre intérimaire, et ce, à un faible coût, par comparaison avec le coût des salariés qu’elles employaient habituellement ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, la cour d’appel n’a méconnu aucune des dispositions invoquées ;
Qu’en effet, si, au sens des articles L. 341-5 et D. 341-5 du code du travail, dans leur rédaction applicable antérieurement à la loi du 2 août 2005, sont considérées comme prestations de services les activités de caractère industriel, commercial, artisanal ou libéral exécutées dans le cadre d’un contrat d’entreprise, d’un contrat de mise à disposition au titre du travail temporaire ou de toute autre mise à disposition de salariés, c’est à la condition qu’il existe une relation de travail entre l’entreprise d’envoi et le travailleur pendant la période de détachement ;
Que, tel n’étant pas le cas en l’espèce, le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l’article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, des articles L. 143-3, L. 320, L. 324-9, L. 324-10, L. 341-5, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, L. 362-3, L. 362-6, L. 620-3 et R. 632-1 du code du travail, des articles 1er à 16 du décret n° 95-182 du 21 février 1995 pris pour l’application au secteur agricole de l’article 36 de la loi quinquennale relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle (article L. 341-5 du code du travail), de l’article 112-1 du code pénal et des articles 388, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
” en ce que l’arrêt attaqué a déclaré l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de travail dissimulé par omission de remise de bulletins de paie aux travailleurs concernés et de déclarations nominatives préalables à leurs embauches et a condamné chacune d’entre elles à une peine de 1 500 euros d’amende avec sursis ;
” aux motifs propres que “ le 19 novembre 2004, M. Z..., contrôleur du travail au service départemental de l’inspection du travail de l’emploi et de la politique sociale agricole (Itepsa) à Quimper signalait au procureur de la République une situation présumée de fausse sous-traitance de travailleurs polonais qui intervenaient sur des vergers exploités par l’Earl Les cidres X... à Ergué-Gabéric et Combrit ; que sur réquisition, les gendarmes de Quimper procédaient à un contrôle sur les lieux le 24 novembre 2004 et constataient la présence à Ergué-Gabéric de six cueilleurs de nationalité polonaise dans un verger exploité par l’Eurl et de six cueilleurs de nationalité polonaise dans un verger exploité par l’Earl situé “ jardin botanique “ à Combrit ; que des vérifications entreprises auprès de la Msa du Finistère établissaient qu’à la date du contrôle, aucune de ces personnes ne figurait au nombre des salariés de ces entreprises, qui avaient par ailleurs déclaré respectivement 51 et 62 salariés pour la saison ; que Dominique X... expliquait aux enquêteurs qu’il avait dû faire face en 2004 à une récolte de pommes spécialement abondante ; qu’il avait tout d’abord procédé comme les années précédentes en embauchant des saisonniers par voie d’annonces dans la presse locale et par l’intermédiaire de l’Anpe ; qu’il avait ensuite souhaité recruter directement des Polonais, mais n’avait pu obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail ; qu’il avait enfin appris grâce à un article de presse qu’une société proposait des prestations de services dans le domaine agricole et était ainsi rentré en contact avec une société anglaise, la société Eurokontakt ; qu’après quelques échanges par mail et la venue sur place de Justina B..., représentante d’Eurokontakt en Pologne, il établissait avec cette société le 4 novembre 2004 un contrat de prestation de services pour le ramassage des pommes, pour une durée minimale de 15 jours ; qu’en droit, le prêt de main-d’oeuvre à titre lucratif ne peut être effectué de manière licite que par une entreprise de travail temporaire ; qu’il est établi que la société Eurokontakt n’est pas une société de travail temporaire, l’article L. 341-3 prévoyant au demeurant qu’un contrat de travail temporaire ne permet pas l’entrée régulière en France de travailleurs étrangers ; que la mise à disposition des travailleurs polonais est intervenue dans le cadre d’un contrat de prestation de services, ce qui amène les prévenues à exciper de l’article L. 341-5 du code du travail qui concerne effectivement les salariés étrangers mis à disposition d’une entreprise française dans ce cadre ; que cependant, l’existence d’un tel contrat suppose que les conditions de la sous-traitance soient remplies, c’est-à-dire que le prix de la prestation soit convenu forfaitairement pour la tâche sous-traitée et non à l’heure, que les salariés soient affectés à une tâche spécifique pour laquelle l’entreprise utilisatrice n’a pas le savoir-faire requis, que le prestataire de services conserve son pouvoir de direction sur ses salariés et enfin que les moyens de travail du personnel appartiennent à l’entreprise sous-traitante ; que l’absence en l’espèce de ces conditions ne permet pas de reconnaître la qualification de contrat de prestation de services à la convention signée entre Dominique X... ès qualités et la société Eurokontakt, ainsi que l’a exactement relevé le tribunal par des motifs appropriés et exhaustifs, que la cour fait siens, en relevant notamment que le contrat prévoyait une rémunération horaire, que le personnel polonais était sous l’autorité exclusive de M. A..., ce que ne contredit nullement le fait qu’il s’agisse d’un personnel capable d’une certaine autonomie, dès lors que c’est M. A... qui distribuait le travail, affectait les travailleurs dans l’un ou l’autre des vergers et contrôlait la qualité du ramassage ; enfin que le matériel appartenait à l’entreprise utilisatrice, le contrat de location signé à ce sujet entre les prévenues et Eurokontakt n’étant en réalité qu’un stratagème pour cacher cette évidence ; qu’en conséquence, la convention conclue entre Eurokontakt d’une part et l’Eurl Cidres de la ville d’Ys et l’Earl Cidres X... d’autre part constitue bien un prêt de main-d’oeuvre contre une rémunération prévue à l’heure, ce qui établit le caractère temporaire et l’élément matériel du délit de prêt illicite de main-d’oeuvre à titre lucratif est caractérisé ; que le tribunal a encore relevé à juste titre que l’Eurl Cidres de la ville d’Ys et l’Earl Cidres X... ne pouvaient ignorer qu’elles utilisaient du personnel étranger dans des conditions illicites, au regard du faible coût de revient de cette main-d’oeuvre, le courrier électronique échangé entre M. A... et Justina B... indiquant explicitement qu’à la suite de l’intervention de l’inspection du travail, il était impératif de relever à 5, 50 euros net la rémunération horaire convenue qui n’était pas conforme à la législation française, et demandant d’urgence une modification en ce sens du contrat établi ; que la cour ajoutera que le bulletin de paie d’un ramasseur occasionnel ayant travaillé à temps complet du 1er au 31 octobre 2004 (D33- annexe) montre que le taux horaire de 7, 60 euros pour un ouvrier embauché directement par l’Earl Cidres X... correspondait à un coût total pour l’entreprise de 15, 32 euros de l’heure, après imputation des cotisations salariales précomptées et des cotisations patronales, somme qui rapprochée du taux horaire convenu avec la société Eurokontakt de 9, 51 euros de l’heure, en ce compris la rémunération de 3 % de cette société ; que la comparaison de ces deux sommes ne pouvait laisser aucun doute à Dominique X... sur le caractère illicite du contrat, de sorte que l’élément intentionnel du délit est lui aussi établi ; que l’Eurl Cidres de la ville d’Ys et l’Earl Cidres X... qui ne peuvent se prévaloir du contrat de prestation de services doivent être considérées comme les employeurs véritables de la main-d’oeuvre polonaise qui travaillait dans leurs vergers ; que c’est dès lors à juste titre que le tribunal a estimé caractérisée l’infraction de travail dissimulé, dès lors qu’aucune des déclarations sociales n’avait été effectuée en France par ces entreprises ; que la décision des premiers juges sera en conséquence confirmée sur la culpabilité ; qu’elle sera en revanche réformée sur la peine ; qu’il doit en effet être tenu compte de l’absence de condamnation antérieure, du contexte d’urgence dans lequel il a été décidé d’avoir recours à une société étrangère, dont le site internet donnait toutes les apparences de la légalité, après un refus par l’inspection du travail d’une embauche directe de salariés étrangers et de la volonté évidente de régularisation des prévenues, dès l’intervention des services de l’inspection du travail » (cf. arrêt attaqué, p. 4 et 5) ;
” aux motifs adoptés qu’” à la suite d’un signalement transmis au parquet de Quimper par l’inspection du travail relativement à l’emploi de travailleurs étrangers dans les vergers exploités à Combrit et Ergué-Gabéric par l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres de la ville d’Ys, les militaires de la gendarmerie se présentaient sur place et constataient la présence de douze ramasseurs de pommes polonais, six dans chacun des deux vergers ; que ces hommes se trouvaient employés dans le cadre de deux contrats conclus entre l’Earl Cidres X... ou l’Eurl Cidres de la ville d’Ys d’une part et la société britannique Eurokontakt, contrats aux termes desquels la seconde agissait “ en tant que prestataire de services pour le compte des premières dans le but d’assurer le ramassage des pommes “ et mettait “ à disposition de celles-ci un nombre de ramasseurs suffisant “ ; que l’Earl ou l’Eurl fournissaient le matériel nécessaire (tracteurs, logement, carburant …), la rémunération d’Eurokontakt devant se faire “ sur une base de rémunération horaire de 9 euros 51 “ ; que l’article L. 125-3 du code du travail interdit toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’oeuvre dès lors qu’elle n’est pas effectuée dans le cadre des dispositions relatives au travail temporaire ; que les prévenues affirment que les contrats les liant à la société Eurokontakt sont des contrats de sous-traitance licites et non de prêt de main-d’oeuvre ; qu’il ressort tant des termes mêmes du contrat que de l’audition de Mme C..., secrétaire comptable des deux entreprises, que les ouvriers polonais étaient payés à l’heure, ce qu’ils confirment d’ailleurs unanimement ; que ces mêmes ouvriers se trouvaient sous l’autorité non de la société Eurokontakt mais de M. A..., salarié des deux entreprises prévenues ; que ce dernier précise qu’il a agi avec eux “ exactement de la même manière qu’il a pu agir avec les employés saisonniers de la cidrerie “ en indiquant les rangs à ramasser, en contrôlant les postures de travail, la disposition des caisses palettes et le remplissage des seaux, en contrôlant la qualité des pommes ramassées, en comptant les pommes ramassées et en remettant aux ouvriers des avances sur salaire en numéraire ; qu’il est constant que les interventions de Justina B..., interlocutrice représentant en Pologne la société Eurokontakt, consistaient exclusivement à envoyer par SMS aux ouvriers la traduction des consignes que lui indiquait téléphoniquement M. A... et ce sur un seul des deux vergers, sur l’autre travaillant un ouvrier parlant suffisamment le français pour assurer lui-même la traduction à l’égard de ses compatriotes ; que la société Eurokontakt ne disposait ainsi d’aucune autorité sur les travailleurs concernés ; que le savoir-faire du personnel d’Eurokontakt ne présentait aucune spécificité par rapport à celui des salariés de l’Eurl Cidres de la ville d’Ys et l’Earl Cidres X... ; que le matériel destiné à l’accomplissement du travail était uniquement fourni par les entreprises utilisatrices ; que la mise à disposition de travailleurs rémunérés par l’entreprise utilisatrice en fonction des heures effectuées, sous l’autorité de cette entreprise, pour accomplir le même travail que les salariés de celle-ci et grâce du matériel fourni par elle, constitue non un contrat de sous-traitance mais un prêt de main-d’oeuvre dont il est constant qu’il n’a pas été effectué dans le cadre des dispositions relatives au travail temporaire ; que l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres de la ville d’Ys ne pouvaient ignorer qu’elles utilisaient du personnel étranger de la même manière que des travailleurs temporaires en dehors des règles applicables ; qu’il importe peu que le bénéfice qui en est résulté soit minime, d’autant qu’elles ne sont pas prévenues de marchandage ; qu’au demeurant la faiblesse de cet avantage financier résulte pour partie de l’intervention de l’inspection du travail à la suite de laquelle les 4 euros de l’heure initialement fixés comme salaire n’ont plus été considérés que comme des “ avances “ sur un salaire de 5, 50 euros (voir à ce sujet les courriers électroniques échangés entre M. A... et Justina B...) ; que l’élément intentionnel de l’infraction est donc bien constitué ; que les salariés polonais n’ont fait l’objet d’aucune déclaration sociale en France (pas de déclaration préalable à l’embauche, pas de mention sur le registre unique de personnel, pas de délivrance de bulletin de paie) ; que l’infraction de travail dissimulé devra donc également être retenue “ (cf. jugement entrepris, p. 4 à 6) ;
” alors que, de première part, il résulte des dispositions combinées de l’article L. 341-5 du code du travail, dans sa rédaction, applicable en la cause, antérieure à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, et du décret n° 95-182 du 21 février 1995 pris pour l’application au secteur agricole de cet article, que les dispositions incriminant le travail dissimulé ne sont pas applicables aux opérations, intervenant dans le secteur agricole, de mise à disposition d’une entreprise française, à titre temporaire, sur le territoire national, d’un salarié par une entreprise non établie en France ; qu’en déclarant, dès lors, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de travail dissimulé et en prononçant, en conséquence, une peine correctionnelle à leur encontre pour avoir omis de procéder aux déclarations nominatives préalables à l’embauche et de remettre des bulletins de paie aux travailleurs polonais mis à leur disposition par la société de droit anglais Eurokontakt pour procéder au ramassage de pommes dans des vergers qu’elles exploitaient, la cour d’appel a violé les stipulations et dispositions susvisées ;
” alors qu’à titre subsidiaire et de deuxième part, à supposer même que les dispositions incriminant le travail dissimulé soient applicables aux opérations, intervenant dans le secteur agricole, de mise à disposition d’une entreprise française, à titre temporaire, sur le territoire national, d’un salarié par une entreprise non établie en France, il résulte des dispositions combinées de l’article L. 341-5 du code du travail, dans sa rédaction, applicable en la cause antérieure à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, et du décret n° 95-182 du 21 février 1995 pris pour l’application au secteur agricole de cet article que les dispositions incriminant le travail dissimulé par omission de délivrance d’un bulletin de paie au salarié ne sont applicables aux opérations, intervenant dans le secteur agricole, de mise à disposition d’une entreprise française, à titre temporaire, sur le territoire national, d’un salarié par une entreprise non établie en France que lorsque la durée d’une telle opération est supérieure à un mois ; qu’en déclarant, dès lors, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de travail dissimulé par omission de délivrance d’un bulletin de paie aux travailleurs concernés et en prononçant, en conséquence, une peine correctionnelle à leur encontre pour avoir omis de remettre des bulletins de paie aux travailleurs polonais mis à leur disposition par la société de droit anglais Eurokontakt pour procéder au ramassage de pommes dans des vergers qu’elles exploitaient, sans constater que la durée d’une telle mise à disposition était supérieure à un mois, la cour d’appel a violé les stipulations et dispositions susvisées ;
” alors qu’à titre infiniment subsidiaire et de troisième part, toute infraction doit être définie en termes clairs et non équivoques et la loi pénale doit satisfaire aux exigences de prévisibilité et d’accessibilité qu’implique le principe de légalité des délits et des peines ; qu’en conséquence, à supposer même que les dispositions incriminant le travail dissimulé soient applicables aux opérations, intervenant dans le secteur agricole, de mise à disposition d’une entreprise française, à titre temporaire, sur le territoire national, d’un salarié par une entreprise non établie en France, en déclarant, dès lors, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de travail dissimulé et en prononçant, en conséquence, une peine correctionnelle à leur encontre pour avoir omis de procéder aux déclarations nominatives préalables à l’embauche et de remettre des bulletins de paie aux travailleurs polonais mis à leur disposition par la société de droit anglais Eurokontakt pour procéder au ramassage de pommes dans des vergers qu’elles exploitaient, quand l’article L. 341-5 du code du travail, dans sa rédaction, applicable en la cause, antérieure à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, et le décret n° 95-182 du 21 février 1995, qui énuméraient les dispositions françaises applicables dans le cas d’un détachement temporaire sur le territoire national de salariés dans le secteur agricole par une entreprise non établie en France, ne mentionnaient pas les dispositions incriminant le travail dissimulé, ce dont il résultait qu’il n’était pas satisfait, dans le cas de l’espèce, aux exigences de clarté, de prévisibilité et d’accessibilité de la loi pénale, la cour d’appel a violé les stipulations et dispositions susvisées ;
” alors que, de quatrième part, l’omission de faire figurer les nom et prénoms d’un salarié sur le registre unique du personnel n’est pas constitutive, de la part de l’employeur, du délit de travail dissimulé ; qu’en énonçant, pour déclarer l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de travail dissimulé, qu’elles n’avaient pas fait figurer les noms et prénoms des travailleurs polonais mis à leur disposition par la société Eurokontakt sur le registre unique du personnel, la cour d’appel a donc violé les stipulations et dispositions susvisées ;
” alors que, de cinquième part, les tribunaux correctionnels ne peuvent statuer que sur les faits relevés par l’acte qui les a saisis ; qu’en énonçant, pour déclarer l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... coupables de travail dissimulé, qu’elles n’avaient pas fait figurer les noms et prénoms des travailleurs polonais mis à leur disposition par la société Eurokontakt sur le registre unique du personnel, quand les faits d’omission de faire figurer les noms et prénoms de salariés sur le registre unique du personnel n’étaient pas relevés par les citations qui l’ont saisie, la cour d’appel a excédé sa saisine, en violation des dispositions susvisées ;
” alors qu’en tout état de cause, l’Earl Cidres X... et l’Eurl Cidres Y... faisaient valoir, dans leurs conclusions d’appel, que leur gérant, Dominique X..., avait pris le soin de recueillir, au préalable, les conseils d’une juriste spécialisée en droit social afin de vérifier les conditions légales auxquelles était soumise l’opération litigieuse et avait vérifié que les observations de cette juriste, notamment en ce qui concernait l’obligation de déclaration préalable auprès de la direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle qui incombait à la société Eurokontakt de la mise à disposition de ses salariés, avaient bien été respectées et qu’en conséquence, faute d’élément intentionnel, le délit de travail dissimulé n’était pas constitué ; qu’en laissant sans réponse ce moyen péremptoire, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de réponse à conclusions et privé, par suite, sa décision de motifs “ ;
Attendu que, pour dire établi le délit de travail dissimulé prévu par l’article L. 324-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable aux faits poursuivis, à l’encontre des deux sociétés prévenues, auxquelles il est reproché d’avoir omis de procéder à des déclarations préalables à l’embauche et de remettre des bulletins de paie aux salariés concernés, l’arrêt, qui a relevé que le contrat conclu entre la société Eurokontakt et Dominique X... ne pouvait être qualifié de contrat de prestation de services au sens de l’article, alors en vigueur, L. 341-5 du même code, a confirmé les dispositions du jugement retenant que les sociétés prévenues avaient omis intentionnellement de procéder à des déclarations nominatives d’embauche et de remettre des bulletins de paie aux salariés concernés ;
Attendu qu’en prononçant ainsi, la cour d’appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions présentées devant elle et caractérisé en tous ses éléments constitutifs tant matériels qu’intentionnel le délit de travail dissimulé, n’a encouru aucun des griefs allégués ;
D’où il suit que le moyen, qui invoque vainement la violation des dispositions de l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article 112-1 du code pénal visant le principe de la légalité des délits et des peines, doit être écarté ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Guirimand conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

Publication : Bulletin criminel 2009, n° 50

Décision attaquée : Cour d’appel de Rennes du 18 janvier 2007

Titrages et résumés : TRAVAIL - Travailleurs étrangers - Prêt de main-d’oeuvre à but lucratif - Détachement temporaire de salariés d’une entreprise non établie en France pour effectuer sur le territoire national des prestations de services - Condition

N’ont pas la qualité de salariés détachés au sens des dispositions de l’ancien article L. 341-5 du code du travail autorisant le détachement temporaire de salariés d’une entreprise non établie en France pour effectuer sur le territoire national des prestations de services, les travailleurs étrangers non liés par une relation de travail à l’entreprise d’envoi.

Justifie en conséquence sa décision la cour d’appel qui déclare établi le délit de prêt illicite de main-d’oeuvre pratiqué hors des règles du travail temporaire à l’encontre de personnes morales ayant eu recours sur le territoire national, dans des conditions financières avantageuses, aux services de travailleurs recrutés en Pologne par une entreprise de droit britannique qui s’est bornée à mettre à disposition desdites personnes morales de la main-d’oeuvre, sans entretenir avec celle-ci une quelconque relation de travail

Textes appliqués :
• article L. 341-5 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 ; article L. 125-3 devenu L. 8241-1 du code du travail