Salarié algérien - réintégration dans son emploi non

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 1 mars 1995

N° de pourvoi : 91-41390

Publié au bulletin

Cassation.

Président : M. Kuhnmunch ., président

Rapporteur : M. Merlin., conseiller apporteur

Avocat général : M. Terrail., avocat général

Avocat : la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique :

Vu l’article 29 de la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que les absences occasionnées par l’accomplissement du service national ne sont pas une cause de rupture du contrat de travail pour les salariés ayant plus d’un an d’ancienneté dans l’entreprise et que le contrat de travail est suspendu pendant la durée légale du service national ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X..., de nationalité algérienne, a été engagé, en qualité de cariste, par la société industrielle Bertrand Faure ; qu’il a quitté l’entreprise, le 31 juillet 1985, pour accomplir son service militaire en Algérie ; que libéré de ses obligations au regard du service national algérien, le 15 septembre 1987, il a demandé, le 14 octobre 1987, à reprendre son emploi en se prévalant de l’article 29 de la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne, applicable à l’entreprise ; que l’employeur lui a refusé le bénéfice de ce texte car il n’avait pas effectué le service national actif prévu par la législation française ;

Attendu que, pour condamner l’employeur à payer au salarié une indemnité de préavis, une indemnité de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d’appel énonce que l’interprétation proposée par la société industrielle Bertrand Faure, tendant à réserver aux salariés français le bénéfice de la suspension du contrat de travail, n’est pas commandée par une lecture objective de l’article 29 de l’accord collectif applicable et qu’elle serait contraire au principe de la prohibition des discriminations fondées sur un critère de nationalité, consacré par le droit positif français et aux engagements internationaux pris par la France dans le même domaine ;

Attendu, cependant, que, sans introduire une discrimination prohibée fondée sur la nationalité, l’article 29 de la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne, prévoit une suspension du contrat de travail pour les salariés, quelle que soit leur nationalité, qui accomplissent leurs obligations du service national prévues par le Code français du service national ;

Attendu, dès lors, que sous réserve du principe de l’égalité de traitement des ressortissants des Etats membres de la Communauté économique européenne résultant des textes communautaires ou de l’application de conventions internationales prévoyant pour les doubles nationaux qu’ils seront considérés comme ayant satisfait aux obligations du service national prévues par la loi française, s’ils ont accompli leurs obligations de service national dans les conditions de la loi de l’Etat dont ils sont également les ressortissants, l’article 29 de la convention collective précitée ne peut s’appliquer aux salariés ayant accompli leurs obligations de service national dans les conditions prévues par une loi étrangère ;

D’où il suit, qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 21 janvier 1991, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée.

Publication : Bulletin 1995 V N° 78 p. 57

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris , du 21 janvier 1991

Titrages et résumés : CONVENTIONS COLLECTIVES - Métallurgie - Conventions régionales - Région parisienne - Salarié astreint au service national - Libération du salarié - Réintégration dans l’entreprise - Refus de l’employeur - Convention prévoyant la suspension du contrat et la réintégration du salarié - Travailleur de nationalité étrangère - Exécution des obligations militaires dans le pays d’origine - Effet . L’article 29 de la convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne prévoit une suspension du contrat de travail pour les salariés quelle que soit leur nationalité qui accomplissent leurs obligations du service national prévues par le Code français du service national. Ce texte n’institue pas une discrimination prohibée fondée sur la nationalité. Il ne peut s’appliquer aux salariés ayant rempli leurs obligations de service national dans les conditions prévues par une loi étrangère, sous réserve du principe de l’égalité de traitements des ressortissants des Etats membres de la Communauté économique européenne résultant des textes communautaires ou de l’application de conventions internationales prévoyant, pour les doubles nationaux, qu’ils seront considérés comme ayant satisfait aux obligations du service national prévues par la loi française, s’ils ont accompli leur obligation de service national dans les conditions de l’Etat dont ils sont également les ressortissants.

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salarié - Salarié astreint au service national - Libération du salarié - Réintégration dans l’entreprise - Refus de l’employeur - Convention collective prévoyant la suspension du contrat et la réintégration du salarié - Travailleur de nationalité étrangère - Exécution des obligations militaires dans le pays d’origine - Effet

Précédents jurisprudentiels : A RAPPROCHER : Chambre sociale, 1992-02-25, Bulletin 1992, V, n° 119, p. 72 (cassation).

Textes appliqués :
* Convention collective régionale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la région parisienne art. 29