employeur producteur

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 16 juillet 1996

N° de pourvoi : 94-42698

Non publié au bulletin

Cassation

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1°/ M. D. T... Buffalo,

2°/ M. Danell P...,

3°/ M. Kewin D...,

4°/ M. Cassie N...,

5°/ M. Fabian B...,

6°/ Mme Lavina A...,

7°/ Mme Augustine Z...,

8°/ M. Joseph X...,

9°/ M. Chester E...,

10°/ M. John F...,

11°/ M. Kenneth G...,

12°/ M. Marty H...,

13°/ M. Norman J...,

14°/ Mme I... J...,

15°/ M. Orion K...,

16°/ M. Eric L...,

17°/ M. Georges M...,

18°/ M. Mackingley E. O...,

19°/ M. William Q...,

20°/ M. Sheila R...,

21°/ M. Andrew S...,

demeurant tous chez M. Y... ...,

en cassation d’un jugement rendu le 2 février 1994 par le conseil de prud’hommes de Paris (activités diverses), au profit :

1°/ de M. C..., mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Artistic Partners, demeurant ...,

2°/ du Garp, domicilié ...,

défendeurs à la cassation ;

LA COUR, composée selon l’article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 4 juin 1996, où étaient présents : Mme Ridé, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Merlin, Desjardins, conseillers, Mme Bourgeot, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme le conseiller Ridé, les observations de Me Choucroy, avocat de M. T... Buffalo, de M. P..., de M. D..., de M. N..., de M. B..., de Mme A..., de Mme Z..., de M. X..., de M. E..., de M. F..., de M. G..., de M. H..., de M. J..., de Mme J..., de M. K..., de M. L..., de M. M..., de M. E. O..., de M. Q..., de M. R... et de M. S..., les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Vu l’article L. 762-1 du Code du travail ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que l’organisateur de spectacles qui s’assure, moyennant rémunération, le concours d’artistes du spectacle en vue de leur production est présumé les employer en vertu d’un contrat de travail qui peut être commun à plusieurs artistes lorsque ceux-ci se produisent dans un même numéro ou font partie du même ensemble ;

Attendu que par contrat du 20 octobre 1989, signé par la société Américan Indian Dance Théatre et la société Artistic Partners, cette dernière société s’est engagée, en qualité de producteur, à présenter le spectacle de 21 danseurs, au cours d’une tournée de plusieurs semaines en France et en Belgique et à verser, en contrepartie des prestations des artistes, une rémunération globale ; qu’après avoir organisé la tournée, la société Artistic Partners a fait l’objet, le 11 juin 1990, d’un jugement de liquidation judiciaire ; que les 21 danseurs, faisant valoir qu’ils n’avaient pas perçu la totalité de ce qui leur était dû, ont demandé à Me C..., mandataire liquidateur d’inscrire leurs créances qu’ils considéraient comme des créances salariales, au rang des créances privilégiées ; que celui-ci, estimant qu’ils étaient des créanciers chirographaires, leur a fait connaître que, comme tels, ils ne pouvaient prétendre à aucun paiement du fait de la clôture des opérations pour insuffisance d’actif ; qu’ils ont alors engagé une action devant le conseil de prud’hommes pour obtenir la condamnation de Me C... et de l’AGS GARP au paiement de sommes qu’ils qualifiaient de salaires ;

Attendu que, pour débouter les intéressés de leurs demandes, le conseil de prud’hommes s’est borné à énoncer que la société Artistic Partners ne pouvait être tenue pour l’employeur des artistes et que le contrat, qui ne la liait qu’à la société Américan Indian Dance Théatre, personne morale, ne faisait pas mention nominale de tous les artistes engagés avec le montant du salaire attribué à chacun d’eux et que dès lors, la présomption de contrat de travail entre le producteur et les artistes, prévue à l’article L. 762-1 ne pouvait s’appliquer ;

Attendu, cependant, que ni le fait que le contrat conclu avec l’organisateur de spectacles n’ait pas, contrairement aux prescriptions de la loi, fait mention du nom de chacun des artistes, ni le fait qu’il n’ait été signé que par la société Américan Indian Dance Théatre n’étaient de nature à exclure la présomption légale de contrat de travail prévue à l’article susvisé à défaut de preuve d’un lien de subordination liant exclusivement les 21 danseurs à cette société ;

Qu’en statuant comme il l’a fait, sans rechercher si la société Américan Indian Dance, en signant le contrat du 20 octobre 1989, avait agi comme employeur d’artistes liés à elle par un lien de subordination ou comme simple mandataire des intéressés, le conseil de prud’hommes n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 2 février 1994, entre les parties, par le conseil de prud’hommes de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud’hommes de Nanterre ;

Condamne M. C..., ès qualités et le Garp, envers les demandeurs, aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;

Ordonne qu’à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du conseil de prud’hommes de Paris, en marge ou à la suite du jugement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par Mme le président en son audience publique du seize juillet mil neuf cent quatre-vingt-seize.

Décision attaquée : Conseil de prud’Hommes de Paris (activités diverses) du 2 février 1994

Titrages et résumés : CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Preuve - Spectacle - Absence de contrat écrit - Recherche nécessaire d’un lien de subordination des artistes à l’organisation du spectacle.

Textes appliqués :
* Code du travail L762-1