Etude du Crédoc sur le détachement entrant

Publication d’une étude sur le détachement entrant - Credoc-EN3S-Acoss-Cleiss-HCFIPS-Darès - novembre 2021 - 73 pages

Voir l’étude sur le site de l’EN3S

Une étude conjointe Credoc-EN3S-Acoss-Cleiss-HCFIPS-Darès, publiée avec une relative discrétion, a analysé les opérations de détachement de salariés sur le territoire français, notamment pour comprendre « les motivations qui conduisent les entreprises utilisatrices établies en France à recourir au travail détaché ». A cet effet, un questionnaire a été adressé à plusieurs entreprises françaises.

L’étude, qui utilise 136 fois l’expression « travail détaché », précise que pour lever toute ambiguïté, elle utilisera tout au long du rapport, le terme d’entreprise d’emploi ou d’accueil pour identifier l’entreprise ici française recourant au travail détaché et celui d’entreprise d’envoi pour l’employeur détachant des salariés dans le cadre d’une prestation de services internationale.

Ce faisant, cette étude contribue au contraire à accentuer la confusion sur la réalité commerciale, économique et sociale de la présence en France des salariés détachés à qui, leur employeur, des entreprises étrangères, demande de travailler temporairement en France.
D’une part, le « concept juridique » de travail détaché n’existe pas ; voir à cet égard notre article. Dès lors, chacun peut effectivement disserter à sa guise sur cette locution familière.
D’autre part, l’entreprise française n’est pas juridiquement une entreprise d’emploi ou d’accueil du salarié détaché ; elle ne recourt pas au travail détaché, ni au travailleur détaché. Elle n’est pas son employeur. C’est un donneur d’ordre qui fait appel à une entreprise étrangère pour lui confier à elle, et non pas à ses salariés, l’exécution d’un marché ou d’un contrat, dans le cadre d’une sous-traitance économique ou prestation de services internationale.

Par ailleurs, cette étude comporte des erreurs substantielles, comme la définition de la mobilité intragroupe, à la page 5, assimilée à une modalité de la prestation de services et de la sous-traitance, ce qui n’est pas le cas bien entendu.
Alors que les études socio-économiques sur le sujet du recours à des entreprises étrangères par des donneurs d’ordre français sont très rares, il est désolant que cette étude officielle, bénie par cinq institutions, en utilisant comme fil rouge un concept qui n’existe pas en droit, contribue à accentuer la confusion sur la réalité des pratiques commerciales des entreprises françaises et du statut du salarié détaché.

Enfin l’étude élude le sujet de la fraude à la prestation de services et au détachement, qui est pourtant une composante structurelle du « travail détaché » et dont bénéficient les donneurs français par un moindre coût de la prestation fournie, quand ces donneurs d’ordre ne sont pas eux-mêmes complices ou instigateurs de cette fraude.

Au final, étude très déconcertante.