Adoption de la directive du 28 juin 2018 sur le détachement de salarié

Adoption d’une nouvelle directive sur le détachement de salarié par une entreprise de l’Union européenne
Présentation de la directive 2018/957 du 28 juin 2018

Voir la directive

L’Union européenne a adopté le 28 juin 2018 une troisième directive destinée à mieux préciser et définir la législation du travail à respecter par une entreprise communautaire qui envoie en mission temporaire un salarié dans un autre Etat membre.
La directive du 28 juin 2018 est la troisième directive consacrée par l’Union européenne à ce sujet, après celle n° 96/71 du 16 décembre 1996 et celle n° 2014/67 du 15 mai 2014 ; elle modifie exclusivement la directive du 16 décembre 1996.
L’objectif de la directive du 28 juin 2018, tout en garantissant le respect de la libre prestation de services, est d’assurer au salarié détaché de meilleurs droits sociaux, pour éviter les pratiques de dumping social et de concurrence sociale déloyale qui se sont développées au fil du temps au sein de l’Union européenne.

La directive du 28 juin 2018 prévoit principalement les mesures suivantes :
.- l’égalité de traitement en matière de rémunération effective dans l’Etat d’accueil et d’emploi entre le salarié détaché et le salarié en emploi direct dans cet Etat, en application du principe « A travail égal, salaire égal » ;
.- le versement au salarié détaché de tous les éléments de la rémunération (primes, indemnités, avantages en nature) prévus par la législation de l’Etat d’accueil et d’emploi, et pas uniquement le versement du salaire de base ;
.- la limitation de la durée du détachement à douze mois, pouvant être prolongée de six mois, jusqu’à dix huit mois ;
.- l’application aux entreprises étrangères de toutes les conventions et accords collectifs étendus ;
.- l’égalité de traitement dans l’Etat d’accueil et d’emploi entre le salarié intérimaire détaché et le salarié permanent en emploi direct dans cet Etat ;
.- un encadrement juridique plus précis, et plus favorable au salarié, des conditions de prise en charge des frais de transport, de nourriture et de logement du salarié détaché ;
. l’engagement d’adopter des dispositions spécifiques pour le transport terrestre ou fluvial, dans la cadre du paquet « mobilité ».
La transposition de la directive du 28 juin 2018 doit être assurée pour le 30 juillet 2020.
La directive du 28 juin 2018 n’a pas d’incidence sur les règles de sécurité sociale et de protection sociale du salarié détaché, qui relèvent d’autres textes communautaires, et notamment, n’a pas de conséquence sur les conditions de délivrance ou de retrait du certificat de détachement ou de son utilisation dans un autre Etat membre.

Quel est l’impact de la directive du 28 juin 2018 sur la législation du travail applicable en France au salarié détaché ?
La directive du 28 juin 2018 n’apporte pas d’amélioration aux droits sociaux du salarié détaché en France, dans le cadre d’une prestation de services internationale, dans le cadre d’une mobilité internationale intragroupe ou dans le cadre d’une prestation pour compte propre effectuée par son employeur.
L’essentiel des mesures contenues dans la directive du 28 juin 2018 sont en vigueur en France depuis le décret n° 94-573 du 11 juillet 1994, pris en application de l’article 36 de la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle :
.- la directive du 28 juin 2018, contrairement à ce qui a été annoncé, ne rend pas obligatoire le principe « A travail égal, salaire égal », qui implique de verser la même rémunération effective au salarié détaché, à égalité de poste de travail, de qualification et d’ancienneté. La directive ne rend obligatoire que la rémunération minimale légale ou conventionnelle étendue. La différence entre la rémunération effective et la rémunération minimale est significative, puisque les entreprises françaises versent très souvent aux salariés des rémunérations (nettement) supérieures au minimum légal ou conventionnel.
.- les entreprises étrangères qui détachent des salariés en France sont tenues de respecter, sans réserve, les conventions collectives étendues depuis l’entrée en vigueur du décret du 11 juillet 1994, y compris les dispositions relatives au paiement de tous les éléments de la rémunération ;
.- en application de ces conventions collectives étendues, et depuis la même époque, les entreprises étrangères sont tenues de prendre en charge, soit en nature, soit en paiement d’indemnités, les frais de transport, de nourriture et de logement ; le code du travail ne contient aucune disposition sur ce sujet.
.- le salarié intérimaire détaché en France bénéficie depuis le décret du 11 juillet 1994 de l’égalité de traitement avec le salarié intérimaire employé par une entreprise de travail temporaire française, qui lui-même bénéficie de l’égalité de traitement avec le salarié permanent de l’entreprise utilisatrice.
La limitation de la durée du détachement du salarié à douze mois n’offre aucun droit particulier au salarié détaché. Par ailleurs, aucune fraude, aucun abus lié à une durée excessive ou illégale du détachement n’a été constaté ; le travail illégal et le dumping social sont générés par d’autres pratiques : fausse sous-traitance, fraude à l’établissement, dévoiement de la mobilité internationale intragroupe, fraude aux présomptions de salariat, utilisation abusive du certificat de détachement.
Dans l’attente des mesures du paquet « mobilité », les chauffeurs routiers ou le personnel navigant sur voie fluviale restent des salariés détachés en France dans le cadre de prestations de services internationales ; la directive du 16 décembre 1996 est applicable à leur employeur établi à l’étranger, hors opérations de transit par le territoire français.