Co emploi oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 31 mars 2016

N° de pourvoi : 14-17834

ECLI:FR:CCASS:2016:SO00686

Non publié au bulletin

Rejet

Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

Me Brouchot, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu’ayant constaté que les sociétés SE transports et Sologne entretien avaient une activité complémentaire, un même siège social et les mêmes dirigeants, que la salariée, en définitive engagée par la société SE transports, avait néanmoins également travaillé pour le compte de la société Sologne entretien qui l’avait toujours rémunérée et se trouvait mentionnée en qualité d’employeur sur les bulletins de paie, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de s’expliquer sur les éléments qu’elle écartait, a ainsi fait ressortir une confusion d’intérêts, d’activité et de direction caractérisant une situation de co-emploi ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens :
Attendu qu’il n’y pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à permettre l’admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sologne entretien et la société SE transports aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sologne entretien et la société SE transports à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour la société Sologne entretien, la société SE transports
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné les sociétés Sologne entretien et SE Transports, en qualité de co-employeurs, à verser diverses indemnités à titre d’heures supplémentaires, pour fait de harcèlement moral et pour licenciement non fondé à Mme X... ;
AUX MOTIFS QUE la société Sologne entretien et la société SE Transports ont une activité complémentaire, le même siège social et les mêmes dirigeants ; que le 11 mars 2008, la société SE Transports a adressé à Mme X... une promesse d’embauche ; que la mise à disposition de Mme X... par la société Sologne entretiens au bénéfice de la société SE Transports ne peut être retenue que si cette dernière n’est pas déjà son employeur ; que constitue une promesse d’embauche valant contrat de travail l’écrit qui précise qui est l’employeur (ici la société SE Transports), l’emploi proposé (responsable des transports), la date d’embauche (ici la fin du préavis travaillé chez son précédent employeur soit le 18 avril 2008), le salaire (2. 000 euros nets), dès lors que la salariée l’a accepté puisqu’elle est entrée en fonction le 25 avril 2008 ; qu’étant ainsi engagée par la société SE Transports, la mise à disposition auprès de celle-ci est sans objet ; que si l’on considère que les deux sociétés ont une activité complémentaire et des liens particulièrement étroits, qu’il résulte de nombreux éléments que la salariée a travaillé essentiellement pour la société SE Transports, mais aussi pour la société Sologne entretien et qu’elle a toujours été rémunérée par la société Sologne entretien, mentionnée comme employeur sur les bulletins de paie, ces éléments suffisent pour considérer que les deux entités étaient co-employeurs et doivent être tenues in solidum d’éventuelles condamnations ;
ALORS, D’UNE PART, QUE ne revêtent la qualité de co-employeurs que les sociétés qui ont une confusion d’intérêts, d’activité et de direction en disposant de la possibilité de donner l’une ou l’autre indifféremment au salarié des instructions dans leur intérêt commun, le rétribuant l’une ou l’autre ; que dans leurs conclusions d’appel, les sociétés Sologne entretien et SE Transports avaient fait valoir qu’outre la circonstance que leurs activités étaient distinctes et complémentaires, seule la première rétribuait Mme X... , mise à disposition de la société SE Transports, au regard de ses bulletins de paie régulièrement produits aux débats ; que tout en constatant que ces bulletins de paie faisaient ressortir que la société Sologne entretien rétribuait seule Mme X... à l’exclusion de la société SE Transports, la cour d’appel qui s’est fondée sur la circonstance inopérante et en tout cas insuffisante de ce que ces sociétés avaient des activités complémentaires, avaient le même siège social et les mêmes dirigeant, et que Mme X... aurait travaillé pour elles deux, a privé son arrêt de base légale au regard de l’article L. 1221-1 du code du travail ;
ALORS, D’AUTRE PART, QUE dans leurs conclusions d’appel, les sociétés Sologne entretien et SE Transports s’étaient régulièrement prévalues de l’aveu judiciaire par Mme X... de ce que la société Sologne entretien était son seul et unique employeur lequel résultait de sa décision de n’attraire que cette seule société et non la société SE Transports devant le conseil de prud’hommes qui l’avait dûment souligné pour écarter leur qualification de co-employeurs ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen péremptoire, la cour d’appel n’a pas satisfait l’obligation de motivation de son arrêt, violant ainsi l’article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné les sociétés Sologne entretien et SE Transports, qualifiées de co-employeurs, à verser à Mme X... , les sommes de 20. 000 euros d’heures supplémentaires, de 2. 000 euros de congés payés afférents et de 10. 000 euros de contrepartie obligatoire en repos ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... fournit son agenda renseigné par elle ; que selon les tarifs et les plaquettes, elle était à la disposition des prestataires, clients ou fournisseurs sur le fixe ou le mobile, qu’elle gérait aussi les plannings des chauffeurs puisqu’après son arrêt, elle n’était plus en relation avec eux en raison de prétendues difficultés ; que les sociétés produisent aussi des attestations selon lesquelles elle n’était pas toujours là très tôt le matin, prenait une pause déjeuner d’environ 2 heures et partait parfois relativement tôt le soir ; que néanmoins ces témoins n’étaient pas systématiquement là pour voir ce qu’ils disent avoir constaté ; qu’il résulte de ces éléments que si elle n’a pas fait systématiquement 60 heures par semaine, il était fréquent qu’elle fasse nettement plus de 39 heures ;
ALORS, D’UNE PART, QUE si la preuve des heures de travail effectuées n’incombe plus spécialement à l’une des parties et que l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le salarié doit cependant fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande ; que pour rejeter des débats les attestations produites par les sociétés Sologne entretien et SE Transports, et retenues comme probantes par le conseil de prud’hommes pour débouter Mme X... de sa demande de ce chef, la cour d’appel a uniquement énoncé que néanmoins ces témoins n’auraient pas été systématiquement là pour voir ce qu’ils disaient avoir constaté, ce qui revient à qualifier de faux lesdites attestations en ce qu’elles émaneraient de personnes qui auraient attesté, comme avérés, de faits auxquels elles n’auraient pas assisté ; qu’en se fondant sur ce motif non susceptible de justifier le rejet des débats desdites attestations, la cour d’appel n’a pas légalement justifié son arrêt infirmatif au regard de l’article L. 3171-4 du code du travail ;
ALORS, D’AUTRE PART, QUE dans leurs conclusions d’appel, les sociétés Sologne entretien et SE Transports avaient fait valoir que dans le respect de la procédure applicable en leur sein, les salariés devaient obligatoirement établir un tableau de bord des heures effectivement travaillées pour mettre en exergue le fait que non seulement Mme X... ne produisait pas un tel tableau mais même qu’elle ne l’avait jamais rempli et n’avait jamais demandé le paiement d’heures supplémentaires avant l’engagement de la présente procédure ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen pertinent de nature à justifier le rejet de la demande infondée de Mme X... en paiement d’heures supplémentaires, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné les sociétés Sologne entretien et SE Transports, qualifiées de co-employeurs, à verser à Mme X... la somme de 24. 450 euros de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QUE les dirigeants, qui étaient sur place, ne pouvaient ignorer que Mme X... faisait de nombreuses heures supplémentaires ; que c’est donc de façon intentionnelle qu’ils ne les ont pas mentionnées sur les bulletins de paie, le l’indemnité est due, pour un montant de 24. 450 euros ;
ALORS, D’UNE PART, QUE la cassation à intervenir sur le deuxième moyen de cassation qui reproche à l’arrêt attaqué d’avoir condamné les sociétés Sologne entretien et SE Transports au paiement à Mme X... d’heures supplémentaires entraînera par voie de conséquence la cassation de la disposition de l’arrêt les condamnant pour travail dissimulé, par application de l’article 625 du code de procédure civile ;
ALORS, D’AUTRE PART, QU’en tout état de cause, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, le fait, pour tout employeur, de mentionner intentionnellement, sur les bulletins de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli ; que, pour condamner les sociétés Sologne entretien et SE Transports pour travail dissimulé, la cour d’appel a uniquement retenu que leurs dirigeants, étant sur place, n’auraient pu ignorer que Mme X... faisait de nombreuses heures supplémentaires pour en déduire qu’ils ne les auraient pas mentionnées sur les bulletins de paie de façon intentionnelle ; qu’en se fondant sur ce motif insusceptible de caractériser l’absence intentionnelle de mention des heures supplémentaires de la part des sociétés Sologne entretien et SE Transports, la cour d’appel a privé son arrêt infirmatif de base légale au regard de l’article L. 8221-5-2° du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné les sociétés Sologne entretien et SE Transports, qualifiées de co-employeurs, à verser à Mme X... la somme de 24. 450 euros de dommages et intérêts pour licenciement infondé ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... avait la qualification de responsable transports et l’a effectivement exercée ; qu’il est établi par des attestations qu’à l’été 2010, ses fonctions lui ont été retirées et qu’elle n’exerçait plus que des tâches purement administratives, ne la mettant plus en rapport avec les chauffeurs et les clients ; que les intimées soutiennent qu’en raison de relations dégradées avec les chauffeurs, la société Sologne entretien n’a pas eu d’autre choix que de mettre fin à sa mise à disposition auprès de la société SE Transports pour la rapatrier en son sein afin qu’elle n’ait plus de rapports avec eux ; qu’il a été vu que puisqu’elle avait été engagée par la société SE Transports, la mise à disposition auprès de celle-ci était sans objet ; que dès lors le fait de la priver des attributions et des responsabilités de son emploi de responsable transports constituait bien une modification unilatérale du contrat puisqu’il était porté atteinte à sa qualification ; que cette modification ne pouvait lui être imposée pour des raisons disciplinaires puisqu’aucune procédure n’a été suivie et qu’elle l’a refusée ; que ce manquement sera retenu ; que doit également être retenu le manquement tiré de la reprise du véhicule de fonction dont la mise à disposition était prévue dans le document du 11 mars 2008 valant contrat de travail ;
ALORS, D’UNE PART, QU’un salarié ne peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur et réclamer que cette rupture produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse qu’à la condition qu’il prouve qu’ont été commis à son encontre des manquements graves dans l’exécution du contrat de travail, ainsi en cas de modification dudit contrat et pas seulement des conditions de travail, faute de quoi la rupture doit être analysée en une démission volontaire ; que, dans leurs conclusions d’appel, les sociétés Sologne entretien et SE Transports avaient fait valoir, sollicitant la confirmation du jugement prud’homal de ce chef, que la modification des fonctions de Mme X... à son retour de congés, dans le cadre de l’exécution de sa convention de mise à disposition, emportait modification des conditions de travail mais non du contrat de travail lui-même, sa classification professionnelle étant demeurée maintenue de même que sa rémunération ; qu’en affirmant péremptoirement que la privation d’une partie des attributions et des responsabilités de Mme X... constituerait une modification unilatérale de son contrat de travail, non acceptée par celle-ci, et porterait atteinte à sa qualification, la cour d’appel qui, sans réfuter ces motifs contraires du jugement infirmé, n’a ainsi pas caractérisé en quoi ces diminutions d’attributions et de responsabilités auraient effectivement porté atteinte à la qualification professionnelle de Mme X... , emportant modification de son contrat de travail, n’a donc pas légalement justifié sa décision de ne pas retenir la seule modification de ses conditions du travail, insusceptible de caractériser des manquements graves aux obligations contractuelles, au regard des articles L. 1231 1 et L. 1237-1 et 2 du code du travail ;
ALORS, D’AUTRE PART, QUE ne constitue pas un manquement grave de nature à rendre impossible la poursuite du contrat de travail d’un salarié et fondée sa décision de prendre acte de la rupture dudit contrat aux torts de son employeur, le seul fait pour ce dernier de reprendre le véhicule mis à la disposition du salarié ; qu’en qualifiant de manquement grave la reprise du véhicule de Mme X... , motif pris de ce que ce véhicule serait de fonction, tel que prévu par la promesse d’embauche et non pas seulement une voiture de service, la cour d’appel n’a pas tiré les exactes conséquences légales de ses constatations au regard des articles L. 1231-1 et L. 1237-1 et 2 du code du travail qu’elle a ainsi violés.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné les sociétés Sologne entretien et SE Transports, qualifiées de co-employeurs, à verser à Mme X... la somme de 8. 000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;
AU SEUL MOTIF QUE la modification du contrat, la reprise de ce véhicule et le non-paiement des heures supplémentaires constituent des agissements répétés qui ont eu pour effet de dégrader les conditions de travail de Mme X... et d’altérer sa santé puisqu’elle a été arrêtée plusieurs mois pour syndrome anxio-dépressif évidemment en rapport avec ces difficultés professionnelles ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur les deuxième et quatrième moyens de cassation qui reprochent à l’arrêt attaqué d’avoir condamné les sociétés Sologne entretien et SE Transports au paiement à Mme X... de différentes sommes à titre d’heures supplémentaires et pour prise d’acte fondée de la rupture du contrat de travail à leurs torts, pour manquements graves caractérisés par la diminution de fonctions et la reprise du véhicule mis à sa disposition, entraînera par voie de conséquence la cassation de la disposition de l’arrêt les condamnant pour harcèlement moral résultant de ces agissements, par application de l’article 625 du code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d’appel d’Orléans , du 20 mars 2014