Délégation de pouvoir non nécessaire

Cour de cassation

chambre criminelle

Audience publique du 4 septembre 2018

N° de pourvoi : 17-84149

ECLI:FR:CCASS:2018:CR01639

Non publié au bulletin

Cassation partielle

M. Soulard (président), président

SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

 

M. D... B... ,

contre l’arrêt de la cour d’appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 4 mai 2017, qui, pour blessures involontaires, travail dissimulé, emploi d’étranger non muni d’une autorisation de travail et abus de biens sociaux, l’a condamné à un an d’emprisonnement, 5 000 euros d’amende, cinq ans d’interdiction de gérer et à cinq ans d’interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 5 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. X..., conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de M. le conseiller X..., les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général Y... ;

Vu le mémoire produit ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du procès-verbal de l’inspection du travail, base des poursuites et des autres pièces de procédure que deux accidents du travail sont survenus dans des conditions similaires les 8 et 16 juin 2001 sur un chantier de construction réalisé par la société Fergal, gérée par M. Jean-Pierre Z... et par la société Nasem, ayant pour gérant de droit M. E... C... ; que cette dernière entreprise avait obtenu de l’entreprise Fergal la sous-traitance d’une partie des travaux à la suite de l’intervention de M. D... B... auprès de chacune de ces sociétés, lui-même ayant été embauché par l’entreprise Nasem à compter du 9 juin 2001 ; que ces accidents ont été provoqués par la chute de deux ouvriers depuis la toiture d’un hangar, alors que les intéressés, MM. Ahmed F... et Mohammed A..., étaient tous deux dépourvus d’équipement de protection individuelle destinés à prévenir ce type de risque et qu’aucun dispositif de protection collective n’avait été installé ; que l’enquête a établi que ces deux travailleurs n’avaient pas bénéficié de contrat de travail et n’avaient pas fait l’objet de déclaration auprès de l’URSSAF, F... étant également dépourvu d’une autorisation de travail en France ; que M. B..., ayant été désigné comme le véritable employeur des deux travailleurs accidentés, a été poursuivi des chefs de blessures involontaires, de travail dissimulé et d’emploi d’étranger non muni d’une autorisation de travail ; qu’ayant, de plus, procédé et fait procéder à l’encaissement de deux chèques clients de la société Nasem, pour un montant total de 5 520 euros, il a été également poursuivi pour abus de biens sociaux ; que le tribunal correctionnel a déclaré le prévenu coupable des faits qui lui étaient reprochés et l’a condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis, à 2 000 euros d’amende et à cinq ans d’interdiction de gérer ; que M. B..., de même que le procureur de la République, ont relevé appel de cette décision ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-20 du code pénal, L. 1221-10, L8221-5, L. 8224-1 et L.8256-2 du code du travail, L. 241-3 et L. 241-9 du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a condamné M. D... B... pour blessures par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence, travail dissimulé par dissimulation de salariés, embauche d’un étranger sans autorisation de travail et abus de biens sociaux, l’a condamné à une peine d’un an d’emprisonnement, à payer une amende de 5 000 euros et a prononcé l’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société et l’interdiction des droits civiques, civils et de famille et s’est prononcée sur les intérêts civils ;

”aux motifs que M. E... C... déclarait aux militaires de la gendarmerie que le chantier où s’était produit les deux accidents avait été apporté par M. B... contre un emploi dans sa société ; qu’il avait accepté le contrat de sous-traitance proposé par l’entreprise Fergal, en mai et embauché M. B... en juin ; que celui-ci avait réalisé de fausses factures à l’attention de l’entreprise Fergal en prétendant que la SARL Nasem avait des problèmes avec sa banque et s’était fait remettre des chèques de paiement qu’il avait fait établir sans ordre. M. C... précisait que M. B... n’avait été déclaré que le 9 juin car il ne devait commencer à travailler qu’à partir de cette date ; qu’il résulte de tous les éléments d’enquête (DIRRECTE, Police et gendarmerie), et cela ne souffrant aucune contrariété suffisante, que : - MM. Ahmed F... et Mohammed A... ont bien été victimes d’accidents du travail par chute de hauteur, sur le chantier du ... sis à ... - ces accidents sont dus à des manquements graves en matière de sécurité sur ledit chantier du fait de l’absence de protections collectives (filets) et/ou individuelles (harnais) pour effectuer des travaux de dépose de tuiles en toiture à environ 8 mètres de hauteur,

 les conséquences pour les victimes ont été des fractures et contusions multiples ayant nécessité des interventions chirurgicales dans les deux cas et des arrêts de travail importants ;

 le deuxième accident s’est produit huit jours après le premier accident sans qu’aucune mesure de prévention ne soit mise en oeuvre pour éviter sa réitération, le travail à réaliser étant pourtant le même ;

 les deux travailleurs accidentés ne bénéficiaient d’aucun contrat de travail et n’avaient pas fait l’objet d’une déclaration auprès de l’URSSAF, M. Ahmed F... étant de surcroît dépourvu de toute autorisation de travail sur le territoire national ;

 qu’il résulte également des déclarations, constantes et concordantes entre elles, de M. C..., gérant de la SARL Nasem, de M. Jean-Pierre Z..., gérant de l’entreprise Fergal, de M. F... et de M. A..., ces derniers les ayant entièrement réitérées devant la cour, que M. B... doit être considéré comme le véritable employeur des deux travailleurs accidentés, motifs pris qu’il les a directement recrutés, la preuve que M. C... en ait été dûment informé n’étant d’ailleurs pas rapportée, qu’il a fixé leurs conditions d’emploi et de rémunération, qu’il les dirigeait effectivement et en permanence sur le chantier et qu’il se présentait comme l’interlocuteur unique de la SARL Nasem, se comportant tel un gérant de fait de cette entité ; que la réalité de l’encaissement des deux chèques clients de la SARL Nasem d’un montant total de 5 520 euros, l’un sur le compte de son épouse et l’autre sur le sien n’est pas contestée ; que le prévenu ne démontre en rien qu’il était en droit de les percevoir ; qu’ancien entrepreneur de maçonnerie ayant eu recours à de la main-d’oeuvre salariée, M. B... connaissait nécessairement toutes les obligations lui incombant, non seulement celles de nature déclarative mais aussi celles concernant la santé et la sécurité des employés, s’agissant plus particulièrement de travaux à réaliser en hauteur ; qu’il convient de stigmatiser son comportement (énoncé de façon détaillée ci-avant), à savoir notamment, sa tentative de dissimulation de l’accident du travail en accident domestique, une fausse déclaration de prêt de main-d’oeuvre, la promesse de remise d’une certaine somme d’argent à chacun des accidentés pour prix de leur silence, sa déclaration comme salarié de la SARL Nasem le lendemain du premier accident dans l’espoir à l’évidence, de se dégager de toute responsabilité, etc

 ; qu’il a donc pu tirer profit de l’état de faiblesse financière des deux victimes pour leur imposer des conditions de rémunération très faibles, une absence de contrat de travail et de déclaration auprès des organismes sociaux et, surtout, des conditions de travail dangereuse et indignes ; qu’il se déduit de tout ce qui précède que le jugement est en voie de confirmation sur la culpabilité ;

”1°) alors que le chef d’entreprise est tenu d’assurer la sécurité de ses salariés, sauf délégation de pouvoirs en matière d’hygiène et de sécurité ; que la direction de fait d’une entreprise suppose l’accomplissement, de manière indépendante des actes positifs de direction, de gestion et d’administration de la société ; que, pour déclarer le prévenu coupable des infractions visées à la prévention, la cour d’appel a estimé qu’il était le véritable employeur des deux salariés accidentés, les ayant embauchés, les dirigeant sur le chantier de sous-traitance passé entre la société Nasem et la société Fergal et qu’il était le dirigeant de fait de la société Nasem se présentant comme « l’interlocuteur unique de la société Nasem » ; qu’ayant, par ailleurs, constaté que le dirigeant de droit de la société Nasem avait admis avoir passé le contrat de sous-traitance avec la société Fergal, avoir perçu les fonds se rapportant à l’exécution de ce chantier, à l’exception de ceux qui avaient été détournés par le prévenu, avoir embauché le prévenu comme salarié, serait-ce juste après l’accident de la première victime sur le chantier de la société Fergal, ce qui établissait que le gérant de droit de la société Nasem s’occupait en fait de l’exécution du chantier, et les détournements de fonds ne suffisant pas à constater la qualité de gérant de fait du prévenu, la cour d’appel a privé sa décision de base légale, en déclarant le prévenu coupable de défaut de déclaration d’embauche des deux personnes ayant travaillé avec lui sur le chantier, d’embauche d’un salarié étranger sans autorisation de travail, et d’abus de biens sociaux ;

”2°) alors que, dès lors que les faits constatés par l’arrêt établissaient que le prévenu ne dirigeait pas la société Nasem, la cour d’appel qui l’a condamné pour blessures involontaires et qui n’a pas recherché s’il avait reçu une délégation de pouvoirs, lui donnant les moyens d’accomplir sa fonction ou une faute non imputable au dirigeant de la société Nasem, a privé sa décision de base légale ;

”3°) alors que la cour d’appel n’a pas précisé quelles étaient les obligations légales ou réglementaires qui n’avaient pas été respectées et qui étaient en relation avec les deux accidents consistant à être passé à travers la toiture ; qu’en statuant ainsi la cour d’appel n’a pas caractérisé la violation d’une obligation légale ou réglementaire de sécurité ou de prudence” ;

Attendu que pour déclarer le prévenu coupable desdits faits en sa qualité de gérant de fait de la société Nasem, l’arrêt relève qu’il résulte, tant du rapport de l’inspection du travail et des investigations réalisées par les enquêteurs, que des déclarations des témoins, réitérées devant la cour, notamment celles des gérants de droit des sociétés Nasem et Fergal, ainsi que des victimes des accidents précités, que, d’une part, M. B... avait recruté ces deux ouvriers, sans pouvoir justifier en avoir informé M. C... et sans avoir procédé à leur déclaration auprès des organismes sociaux, qu’il leur avait fixé leurs conditions d’emploi et de rémunération, qu’il les avait dirigés de manière effective et permanente sur le chantier, y compris lors de la survenance de chacun des accidents et qu’il s’était présenté auprès de la société Fergal comme l’interlocuteur unique de la société Nasem, d’autre part, chacune des chutes d’une toiture dont MM. F... et A... ont été victimes est due à ce qu’aucun d’eux n’avait bénéficié de protections collectives ou individuelles afin d’effectuer les travaux que leur avait assignés le prévenu ; que les juges en déduisent que, d’une part, M. B... s’est comporté comme un gérant de fait de la société Nasem à l’occasion des agissements qui lui ont été reprochés, d’autre part, ayant connaissance des obligations lui incombant en matière de sécurité des travailleurs, notamment s’agissant de travaux de ce type, il n’a mis en oeuvre aucune des mesures de prévention prévues par la loi et les règlements, y compris postérieurement à la survenance du premier accident ;

Attendu qu’en prononçant par ces motifs, exempts d’insuffisance comme de contradiction, la cour d’appel, qui a répondu aux moyens péremptoires des parties, a justifié sa décision dès lors qu’ayant établi que M. B... avait la qualité de gérant de fait de la société Nasem, il appartenait à ce dernier de mettre en oeuvre les obligations légales ou réglementaires en matière de travaux effectués sur des toitures qui lui incombaient et dont la violation délibérée a directement provoqué les deux accidents en cause, sans qu’il y ait lieu de démontrer l’existence d’une délégation de pouvoirs dont le prévenu aurait pu bénéficier ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 130-1, 130-2, 132-19 et 132-24, 132-25 à 132-28, 132-48 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a, infirmant le jugement entrepris, condamné M. D... B... à une peine d’un an d’emprisonnement ;

”aux motifs qu’il convient de stigmatiser son comportement (énoncé de façon détaillée ci-avant), à savoir notamment, sa tentative de dissimulation de l’accident du travail en accident domestique, une fausse déclaration de prêt de main-d’oeuvre, la promesse de remise d’une certaine somme d’argent à chacun des accidentés pour prix de leur silence, sa déclaration comme salarié de la SARL Nasem le lendemain du premier accident dans l’espoir à l’évidence, de se dégager de toute responsabilité, etc

 ; qu’il a donc pu tirer profit de l’état de faiblesse financière des deux victimes pour leur imposer des conditions de rémunération très faibles, une absence de contrat de travail et de déclaration auprès des organismes sociaux et, surtout, des conditions de travail dangereuse et indignes ; qu’il se déduit de tout ce qui précède que le jugement est en voie de confirmations sur la culpabilité ; que, par contre, eu égard à l’extrême gravité des faits commis, dénotant une volonté caractérisée de ne pas assumer la responsabilité et une particulière insensibilité à la situation d’autrui, il convient de le réformer sur la répression et de condamner M. B... à la peine d’un an d’emprisonnement, à une amende de 5 000 euros et de prononcer à son encontre, pour une période de cinq ans, les deux interdictions ci-après précisées ;

”alors qu’il résulte de l’article 132-19 du code pénal que le juge qui prononce une peine d’emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l’espèce, de la gravité de l’infraction, de la personnalité de son auteur, de sa situation matérielle, familiale et sociale ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ; que, dans le cas où la peine n’est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, s’il décide de ne pas l’aménager, doit en outre motiver spécialement cette décision, soit en établissant que la personnalité et la situation du condamné ne permettent pas un tel aménagement, soit en constatant une impossibilité matérielle ; que pour condamner le prévenu à une peine d’un an d’emprisonnement, la cour d’appel a estimé que la peine était justifiée au regard de la gravité des faits et l’indifférence au préjudice causé aux victimes ; qu’en prononçant une peine d’emprisonnement ferme d’un an, sans se prononcer sur l’impossibilité de prononcer une sanction plus adéquate, et sans envisager un possible aménagement de cette peine, la cour d’appel a méconnu l’article 132-19 du code pénal” ;

Vu l’article 132-19 du code pénal ;

Attendu qu’il résulte de ce texte, que le juge qui prononce une peine d’emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l’infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère inadéquat de toute autre sanction ; que si la peine prononcée n’est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, qui décide de ne pas l’aménager, doit, en outre, soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l’espèce et de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu ;

Attendu que pour condamner M. B... à une peine d’un an d’emprisonnement sans aménagement, l’arrêt attaqué retient que les faits reprochés au prévenu sont d’une extrême gravité ; que les juges ajoutent que le prévenu a dénoté une volonté caractérisée de ne pas assumer la responsabilité de ses agissements, de même qu’une particulière insensibilité à la situation d’autrui ;

Mais attendu qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel, qui ne s’est expliquée, ni sur les éléments de la personnalité du prévenu qu’elle a pris en considération pour fonder sa décision, ni sur le caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction et qui n’a pas spécialement motivé son refus d’aménager une telle peine au regard de la situation matérielle, familiale et sociale de l’auteur des faits, a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et les principes ci-dessus énoncés ;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-1 et 132-20 du code pénal, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;

”en ce que l’arrêt attaqué a, réformant le jugement entrepris, condamné M. B... à payer une amende de 5 000 euros et a prononcé l’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société et l’interdiction des droits civiques, civils et de famille ;

”aux motifs qu’il convient de stigmatiser son comportement (énoncé de façon détaillée ci-avant), à savoir notamment, sa tentative de dissimulation de l’accident du travail en accident domestique, une fausse déclaration de prêt de main d’oeuvre, la promesse de remise d’une certaine somme d’argent à chacun des accidentés pour prix de leur silence, sa déclaration comme salarié de la SARL Nasem le lendemain du premier accident dans l’espoir à l’évidence, de se dégager de toute responsabilité, etc

 ; qu’il a donc pu tirer profit de l’état de faiblesse financière des deux victimes pour leur imposer des conditions de rémunération très faibles, une absence de contrat de travail et de déclaration auprès des organismes sociaux et, surtout, des conditions de travail dangereuse et indignes ; qu’il se déduit de tout ce qui précède que le jugement est en voie de confirmations sur la culpabilité ; que, par contre, eu égard à l’extrême gravité des faits commis, dénotant une volonté caractérisée de ne pas assumer la responsabilité et une particulière insensibilité à la situation d’autrui, il convient de le réformer sur la répression et de condamner M. B... à la peine d’un an d’emprisonnement, à une amende de 5 000 euros et de prononcer à son encontre, pour une période de cinq ans, les deux interdictions ci-après précisées ;

”1°) alors qu’il résulte des articles 132-1, 132-20 alinéa 2 du code pénal et 485 du code de procédure pénale qu’en matière correctionnelle, le juge qui prononce une peine d’amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l’infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; que la cour d’appel a condamné le prévenu à payer une amende de 5 000 euros sans s’expliquer sur ses charges et ses revenus, a méconnu les articles susvisés ;

”2°) alors que la cour d’appel qui a prononcé une interdiction professionnelle et une interdiction d’exercer les droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans, sans expliquer en quoi cette dernière interdiction était justifiée au regard des faits en cause, a encore méconnu l’article 132-1 du code pénal” ;

Vu les articles 132-1 et 132-20, alinéa 2, du code pénal ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité

des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle ; que, selon le second, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision en tenant compte des ressources et des charges du prévenu ;

Attendu que, pour infirmer le jugement en portant le montant de l’amende à la somme de 5 000 euros et prononcer l’interdiction d’exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d’administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société et l’interdiction des droits civiques, civils et de famille, l’arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, d’une part, sans s’expliquer sur les ressources et les charges du prévenu qu’elle devait prendre en considération pour fonder sa décision sur la peine d’amende, d’autre part, en s’en tenant, pour confirmer la peine d’interdiction des droits civiques, civils et de famille, à la gravité des faits, sans examiner sa situation personnelle, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

D’où il suit que la cassation est à nouveau encourue ; qu’elle sera limitée aux peines, dès lors que la déclaration de culpabilité de B... n’encourt pas la censure ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives aux peines, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Nîmes, en date du 4 mai 2017, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Nîmes et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre septembre deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

Décision attaquée : Cour d’appel de Nîmes , du 4 mai 2017