cumul marchandage oui

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 8 avril 2009

N° de pourvoi : 07-41847

Non publié au bulletin

Cassation partielle

Mme Collomp (président), président

SCP Didier et Pinet, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Dit n’y avoir lieu à mettre hors de cause la société Railrest ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme Afaf X... a été engagée par la société d’intérim Hors Clichés et mise à la disposition, dans le cadre de deux contrats de mission à temps partiel, à compter du 2 juillet 2003 et jusqu’au 1er août 2003, de la société Railrest, qui a pour activité la prestation de services à la clientèle de voyageurs à bord des trains « Thalys » ; que la salariée a été engagée par la société Railrest à compter du 20 août 2003 en qualité d’hôtesse d’accueil dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel ; qu’à la suite de son licenciement le 26 septembre 2003, Mme Afaf X... a saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes à l’encontre de la société Railrest et de la société Hors Clichés ;

Sur le pourvoi principal de la salariée et de l’union locale CGT de Chatou :

Sur le deuxième moyen, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt d’avoir débouté la salariée de ses demandes liées à la requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps plein pour la période comprise entre le 20 août et le 26 septembre 2003, alors, selon le moyen :

1°/ que, selon l’article L. 212-4-6 du code du travail relatif au travail à temps partiel modulé, le contrat doit mentionner la qualification du salarié, les éléments de sa rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle de référence, les autres éléments devant être impérativement fixés par la convention ou l’accord collectif relatif à l’organisation du temps de travail ; que pour débouter la salariée de sa demande de requalification en contrat à temps plein du contrat ne portant pas mention de la répartition des horaires de travail dans la semaine ou dans le mois, la cour d’appel a retenu qu’il n’était pas démontré que l’accord collectif, incomplet, aurait été dénoncé ; qu’en statuant par ce motif inopérant quand l’accord collectif, même non dénoncé, ne pouvait pallier la carence du contrat de travail, la cour d’appel a violé l’article L. 212-4-6 du code du travail ;

2°/ qu’en s’abstenant de vérifier si l’accord collectif du 7 novembre 2002 comportait des mentions relatives aux modalités de décompte de la durée du travail, aux modalités de durée minimale journalière et aux modalités d’information du salarié sur les programmations d’horaires et les modifications de ces horaires, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 212-4-6 du code du travail ;

Mais attendu qu’ayant constaté, d’une part, que les clauses du contrat de travail à durée indéterminée mentionnaient la durée mensuelle de travail de référence, la qualification du salarié et les éléments du salaire et, d’autre part, que la répartition du travail entre les jours de la semaine et les semaines du mois était communiquée avec un délai de prévenance de sept jours, la cour d’appel a, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;

Sur le pourvoi incident de la société Hors Clichés :

Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches :

Attendu que la société Hors Clichés fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée au paiement d’une indemnité de requalification au profit de la salariée, alors, selon le moyen :

1°/ que la mention selon laquelle le contrat d’intérim a pour but de remplacer un salarié absent suffit à la régularité formelle du contrat ; que n’est pas inexacte la mention selon laquelle le salarié remplacé était absent, au seul prétexte que cette absence serait définitive ; que la cour d’appel a violé les articles L. 124-3 et L. 124-4 du code du travail ;

2°/ qu’une entreprise n’est jamais obligée de remplacer un salarié licencié ou démissionnaire par un autre salarié, l’employeur conservant le pouvoir de réorganiser son entreprise ; que l’entreprise utilisatrice a le droit de suppléer l’absence résultant d’une démission par un contrat intérimaire, pour se donner le temps de la réflexion ; qu’en requalifiant le contrat d’intérim conclu dans ces conditions, et parfaitement valable en tant que tel, la cour d’appel a violé les textes précités et méconnu l’étendue des pouvoirs de l’employeur ;

3°/ que la loi exige la mention des fonctions exercées par le salarié et non celle de leur qualification, qui résulte des fonctions exercées ; que la cour d’appel a violé l’article L. 124-4 du code du travail ;

Mais attendu que les dispositions de l’article L. 124-7, alinéa 2, devenu L. 1251-40 du code du travail qui sanctionnent l’inobservation, par l’entreprise utilisatrice, des dispositions des articles L. 124-2 à L. 124-2-4, devenus L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 251-35, n’excluent pas la possibilité, pour le salarié, d’agir contre l’entreprise de travail temporaire lorsque les conditions, à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d’oeuvre est interdite, n’ont pas été respectées ;

Et attendu que la cour d’appel ayant constaté qu’en violation des dispositions combinées des articles L. 124-3, alinéa 1, et L. 124-4, alinéas 1 à 9, devenus L. 1251-42 et L. 1251-16 du code du travail, l’entreprise de travail temporaire n’avait pas mentionné la qualification du salarié remplacé dans le premier contrat de mission, ni adressé au salarié les contrats relatifs aux missions dans les deux jours ouvrables suivant sa mise à disposition, en a exactement déduit que la société Hors Clichés s’était placée en dehors du champ d’application du travail temporaire et que la relation contractuelle de travail avec le salarié relevait du droit commun ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société Hors Clichés fait grief à l’arrêt de l’avoir condamnée au paiement de diverses sommes au titre de la prime conventionnelle annuelle, alors, selon le moyen, que la société Hors Clichés a fait valoir dans ses conclusions devant la cour d’appel que le taux horaire de 10,29 euros appliqué aux salariés de la société utilisatrice comme à Mme X... incluait la prime conventionnelle annuelle, ainsi que le conseil de prud’hommes l’avait lui-même admis ; qu’en prononçant une condamnation du chef de cette prime, sans vérifier qu’elle n’était pas comprise dans le taux horaire prévu au contrat de mission de la salariée mise à disposition, et appliqué au personnel correspondant de la société utilisatrice, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 140-2 et L. 122-4-2 du code du travail ;

Mais attendu qu’ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que l’article 8 de la convention collective de la restauration ferroviaire prévoit le versement par l’employeur d’une prime annuelle, correspondant à un mois de salaire augmenté de la prime d’ancienneté, en tenant compte du temps de travail effectif dans l’entreprise et que l’employeur ne justifiait pas du paiement de cette prime, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société Hors Clichés fait grief à l’arrêt d’avoir dit que des sommes étaient dues au salarié à titre de rappels de salaire, de congés payés incidents et de prime annuelle conventionnelle, alors, selon le moyen :

1°/ qu’en se bornant à constater qu’il résultait du contrat à durée indéterminée à temps partiel conclu par Mme X... le 20 août 2003 en qualité d’hôtesse qu’elle avait été rémunérée, à compter de cette date, sur la base d’un taux horaire de 12,57 euros, bien que ce contrat ne mentionne aucun taux horaire, et sans expliquer pourquoi les stipulations de ce contrat permettaient de déduire que cette salariée bénéficiait d’un tel taux horaire, la cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 122-4-2 du code du travail et 1134 du code civil ;

2°/ que le principe d’égalité de rémunération, qui permet notamment d’assurer aux salariés intérimaires une rémunération égale à celle allouée aux salariés de l’entreprise utilisatrice, ne peut s’appliquer qu’entre salariés présents au même moment dans l’entreprise ; que la circonstance que la rémunération d’un salarié, embauché en contrat à durée indéterminée par l’entreprise utilisatrice après avoir fait des missions d’intérim, ait été augmentée, ne suffit pas à caractériser une inégalité de traitement, faute de comparer le taux horaire applicable sur une période identique ; que la cour d’appel a violé les articles L. 140-2 et L. 122-4-2 du code du travail ;

3°/ que l’employeur est libre d’augmenter le taux horaire applicable à une catégorie de salariés, à l’occasion de l’embauche de l’un d’eux, sans que cette augmentation confère aux salariés appartenant à la même catégorie la possibilité de réclamer, pour le passé, l’application du taux horaire augmenté ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel, de ce chef encore, a violé les articles L. 140-2 et L. 122-4-2 du code du travail ;

Mais attendu qu’ayant constaté que la salariée avait perçu en qualité de salariée temporaire, à qualification équivalente et pour le même poste de travail, celui d’hôtesse de quai, une rémunération inférieure à celle qu’elle avait perçue dans le cadre du contrat à durée indéterminée conclu avec la même entreprise, dans la même période de temps, sans que l’employeur ne fournisse d’explication utile, la cour d’appel a, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;

Mais sur le pourvoi principal de la salariée et de l’union locale CGT de Chatou :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l’article L. 212-4-3, alinéa 1, devenu L. 3123-14 du code du travail, ensemble l’article 1315 du code civil ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps plein, pour la période comprise entre le 2 juillet et le 19 août 2003, ayant constaté que les contrats de travail temporaire ne mentionnaient pas d’horaire de travail mais se référaient à un “tableau de roulement”, la cour d’appel a retenu, par motifs propres et adoptés, que les fréquentes modifications des tableaux et l’obligation en découlant de se maintenir en permanence à la disposition de l’employeur alléguées par la salariée n’étaient établies par aucune pièce, que, compte tenu du type d’activité, le recours à un tableau de roulement paraissait évident et que la salariée, qui ne contestait pas avoir travaillé à temps partiel, ne démontrait pas qu’elle devait se maintenir à la disposition de son employeur ;

Attendu cependant que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu’il en résulte que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et qu’il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur ;

Qu’en statuant comme elle a fait, la cour d’appel a violé les articles susvisés ;

Sur le troisième moyen :

Vu les articles L. 125-1, alinéa 1, et L. 125-3, devenus L. 8231-1 et L. 8241-1 du code du travail ;

Attendu que pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour prêt illicite de main d’oeuvre, la cour d’appel a retenu que, d’une part, l’inobservation par la société Hors Clichés de dispositions relatives au travail temporaire avait entraîné la requalification des contrats de travail temporaire de la salariée en un contrat de travail à durée indéterminée et la condamnation de la société de travail temporaire au paiement d’une indemnité et non de dommages-intérêts en réparation d’un préjudice, et que, d’autre part, il n’était pas démontré que la société Hors Clichés aurait volontairement cherché à causer un préjudice à la salariée, notamment en la privant de l’application de la convention collective ou à éluder une disposition légale ;

Attendu cependant, d’une part, qu’il résulte de la combinaison des textes susvisés que toute opération à but lucratif de fourniture de main-d’oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application des dispositions de la loi, de règlement ou de convention ou accord collectif de travail est interdite et, d’autre part, que les sanctions prévues pour la violation des dispositions relatives au travail temporaire ne sont pas exclusives de celles réprimant le marchandage et le prêt illicite de main-d’oeuvre, et que la volonté de l’employeur de causer un préjudice au salarié est indifférente à caractériser ces infractions ;

Qu’en statuant comme elle a fait, alors qu’elle avait relevé que la société Hors Clichés, par les irrégularités commises dans l’élaboration et la transmission des contrats de mission, s’était placée en dehors du champ d’application du travail temporaire, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Sur le quatrième moyen :

Vu l’article L. 411-11 devenu L. 2131-1 du code du travail ;

Attendu que pour débouter l’union locale CGT de Chatou de sa demande de dommages-intérêts, la cour d’appel a considéré que celle-ci ne démontrait pas que les manquements de la société Hors Clichés et de la société Railrest relevés dans l’arrêt étaient de nature à porter un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession d’hôtesse de quai ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la violation des dispositions relatives au travail temporaire est de nature à porter préjudice à l’intérêt collectif de la profession, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le premier moyen du pourvoi incident, pris en sa cinquième branche :

Vu l’article L. 124-7-1 devenu L. 1251-41 du code du travail ;

Attendu qu’il résulte de l’article L. 124-7-1 devenu L. 1251-41 du code du travail qu’en cas de requalification d’une mission d’intérim en contrat à durée indéterminée, le juge doit accorder au salarié, à la charge de l’utilisateur, une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire ; qu’il en résulte qu’en condamnant la société Hors Clichés au paiement d’une indemnité de requalification, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions ayant débouté la salariée de ses demandes relatives à la requalification de contrats de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein pour la période comprise entre le 2 juillet et le 19 août 2003, de sa demande de dommages-intérêts pour prêt illicite de main-d’oeuvre, de ses demandes dirigées à l’encontre de la société Railrest en cas de requalification des contrats en contrat à durée indéterminée et l’union locale CGT de Chatou de sa demande de dommages-intérêts et ayant condamné la société Hors Clichés à verser à la salariée une indemnité de requalification, l’arrêt rendu le 8 février 2007, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge des dépens par elle exposés ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne les sociétés Hors Clichés et Railrest à payer à Mme X... et à l’union locale CGT de Chatou la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit avril deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits -à l’appui du pourvoi principal- par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour Mme Afaf X... et l’union locale CGT de Chatou.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Mademoiselle X... de sa demande de requalification du contrat de travail en un contrat à temps plein, pour la période comprise entre le 2 juillet et le 19 août 2003 ;

AUX MOTIFS QUE la salariée expose que ses contrats de travail temporaire ne mentionnaient ni une durée préalablement fixée ni une répartition de cet horaire pendant la semaine et le mois et se bornaient à préciser que le travail serait effectué suivant l’horaire de roulement et conclut à la requalification de ses contrats de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps plein ; néanmoins, que c’est par une exacte appréciation des faits et de justes motifs, que la Cour adopte, en l’absence d’éléments nouveaux, que le Conseil de prud’hommes a débouté la salariée de cette demande en précisant que les fréquentes modifications des tableaux et l’obligation en découlant de se maintenir en permanence à la disposition de l’employeur allégué par la salariée n’étaient établies par aucune pièce ; que la salariée qui ne démontre pas que l’employeur n’aurait pas déclaré toutes les heures travaillées, doit également être déboutée de sa demande de condamnation pour travail dissimulé ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les deux contrats de travail ne mentionnent pas d’horaire mais stipulent : « selon tableau de roulement ». Les sociétés font valoir que le tableau était établi tous les mois. La demanderesse invoque la difficulté de comprendre ce tableau et ses fréquentes modifications. D’une part, ces dernières ne sont démontrées par aucun document. Cet argument sera donc écarté. D’autre part, compte tenu du type d’activité, le recours à un tableau de roulement paraît évident. Enfin, il n’est pas contesté par la salariée qu’elle travaillait à temps partiel et elle ne démontre pas qu’elle devait se maintenir à la disposition de son employeur. Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre et de celle au titre d’un travail dissimulé qui est lié ;

1°) ALORS QU’en l’absence de contrat écrit ou des mentions légales quant à la durée du travail et à sa répartition, l’emploi est présumé à temps complet ; qu’il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve, d’une part qu’il s’agissait d’un emploi à temps partiel, d’autre part que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur ; qu’après avoir constaté que les contrats de travail de la salariée ne mentionnaient pas d’horaire et prévoyaient seulement que le travail serait effectué « selon tableau de roulement », la Cour d’appel qui a débouté la salariée au motif qu’elle n’apportait pas la preuve des fréquentes modifications des tableaux et de l’obligation en découlant pour elle de se maintenir en permanence à la disposition de l’employeur a inversé la charge de la preuve et a violé l’article 1315 du Code civil, ensemble l’article L. 212-4-3 du Code du travail ;

2°) ALORS QUE (subsidiairement), en se bornant à énoncer que compte tenu du type d’activité, le recours à un tableau de roulement apparaissait évident, la Cour d’appel n’a relevé aucun élément d’où il résulterait que l’employeur a renversé la présomption d’emploi à temps plein ; qu’en déboutant la salariée de sa demande de requalification, la Cour d’appel a derechef violé l’article L. 212-4-3 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Mademoiselle X... de sa demande de requalification du contrat de travail en contrat de travail à temps plein pour la période comprise entre le 20 août et le 26 septembre 2003 ;

AUX MOTIFS QUE la salariée expose qu’elle a été engagée pour une durée maximum de travail de 1.445 heures par an modulée sur l’année sous réserve de respecter une durée moyenne de travail de 129 heures par période de 28 jours, cette modulation ne pouvant pas conduire à une durée de travail inférieure à 110 heures ou supérieure à 140 heures par période également de 28 jours ; qu’il était précisé que les horaires de travail pour chaque journée travaillée seraient communiqués par écrit par période de quatre semaines en respectant un délai de prévenance de septembre jours ; que la salariée soutient que les dispositions de l’article L. 212-4-6 du Code du travail n’ayant pas été respectées par la SA Rail Rest, l’accord collectif du 7 novembre 2002 prévoyant un temps de travail annualisé est illégal et ne peut pas lui être opposé et qu’en conséquence, cette dernière ne pouvait pas se prévaloir d’un aménagement du temps de travail de ce type ; que l’article L. 212-4-6 du Code du travail précise qu’une convention ou un accord d’entreprise n’ayant pas fait l’objet d’opposition dans un délai de huit jours d’une ou des organisations syndicales habilitées n’ayant pas signé l’un des textes en question ou à défaut des délégués du personnel, peut prévoir que la durée hebdomadaire de travail peut varier dans certaines conditions sur tout ou partie de l’année ; qu’il n’est pas soutenu par la salariée que l’accord litigieux, signé par les syndicats CFDT et Force ouvrière, aurait été dénoncé, alors que les modalités relatives à l’aménagement du temps de travail des personnels sédentaires d’exécution ont été régulièrement précisées dans ce document ; enfin, que les clauses du contrat de travail sont conformes aux dispositions de l’article L. 212-4-3 du Code du travail puisque la durée mensuelle de travail, la qualification du salarié et les éléments du salarié et que la répartition du travail entre les jours de la semaine et les semaines du mois n’étaient communiquées avec un délai de prévenance de septembre jours ; que la salariée sera donc déboutée de ses demandes liées à la requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps plein ;

1°) ALORS QUE selon l’article L. 212-4-6 du Code du travail relatif au travail à temps partiel modulé le contrat doit mentionner la qualification du salarié, les éléments de sa rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle de référence, les autres éléments devant être impérativement fixés par la convention ou l’accord collectif relatif à l’organisation du temps de travail ; que pour débouter la salariée de sa demande de requalification en contrat à temps plein du contrat ne portant pas mention de la répartition des horaires de travail dans la semaine ou dans le mois, la Cour d’appel a retenu qu’il n’était pas démontré que l’accord collectif, incomplet, aurait été dénoncé ; qu’en statuant par ce motif inopérant quand l’accord collectif, même non dénoncé, ne pouvait pallier la carence du contrat de travail, la Cour d’appel a violé l’article L. 212-4-6 du Code du travail ;

2°) ALORS QU’en s’abstenant de vérifier si l’accord collectif du 7 novembre 2002 comportait des mentions relatives aux modalités de décompte de la durée du travail, aux modalités de durée minimale journalière et aux modalités d’information du salarié sur les programmations d’horaires et les modifications de ces horaires, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 212-4-6 du Code du travail ;

3°) ALORS QU’en déclarant opposable aux salariés intérimaires l’accord collectif d’aménagement du temps de travail de la société utilisatrice instituant un travail à temps partiel modulé sur l’année, sans rechercher si les contrats de mission faisaient référence à cet accord, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 212-4-6 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour prêt illicite de main d’oeuvre ;

AUX MOTIFS QUE la salariée demande que la SARL Hors Clichés soit condamnée à lui payer des dommages-intérêts pour prêt illicite de main d’oeuvre ; qu’elle soutient qu’en cas de requalification en application des dispositions de l’article L. 212-3-13 du Code du travail, le prêt de main d’oeuvre devient facto illicite, notamment parce que le salarié se trouve privé du bénéfice de la convention collective nationale applicable ; que l’article L. 125-3 du Code du travail interdit les opérations à but lucratif ayant pour objet le prêt de main d’oeuvre qui ne seraient pas effectuées dans le cadre des dispositions relatives au travail temporaire ; qu’en outre, selon l’article L. 125-1 du Code du travail, est interdit le marchandage de main d’oeuvre lequel est constitué par toute opération à but lucratif de fourniture de main d’oeuvre qui aurait pour effet de causer un préjudice au salarié ou d’éluder les dispositions de la loi, de règlement ou de convention ou d’accord collectif de travail ; qu’en l’espèce, l’inobservation par la SARL Hors Clichés de dispositions relatives au travail temporaire a entraîné la requalification des contrats de travail temporaire de la salariée en un contrat de travail à durée indéterminée et la condamnation de la société de travail temporaire au paiement d’une indemnité et non de dommages-intérêts en réparation d’un préjudice ; qu’en outre, il n’est pas démontré que la SARL Hors Clichés aurait volontairement cherché à causer un préjudice à la salariée, notamment en la privant de l’application de la convention collective ou à éluder une disposition légale ; que la salariée doit être déboutée de ses demandes ;

1°) ALORS QUE la requalification du contrat de travail temporaire irrégulier en contrat à durée indéterminée et l’allocation de l’indemnité afférente ne sont pas exclusives de la condamnation de l’entreprise de travail temporaire et de l’entreprise utilisatrice à des dommages-intérêts envers le salarié pour marchandage ou prêt illicite de main d’oeuvre ; qu’en déboutant la salariée au motif que l’inobservation des dispositions relatives au travail temporaire avait donné lieu à la requalification du contrat et à une indemnité, la Cour d’appel a violé les articles L. 125-1 et L. 125-3 du Code du travail ;

2°) ALORS QU’aux termes de l’article L. 125-1 du Code du travail, toute opération à but lucratif de fourniture de main d’oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu’elle concerne ou d’éluder l’application des dispositions de la loi, de règlement ou de convention ou accord collectif de travail ou « marchandage » est interdite ; que la sanction de ces opérations illicites n’est pas subordonnée au caractère intentionnel de l’infraction ; qu’en retenant dès lors, pour débouter la salariée de sa demande qu’il n’était pas démontré que l’entreprise de travail temporaire avait volontairement cherché à lui causer un préjudice, la Cour d’appel a violé l’article L. 125.3 du Code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté l’Union Locale CGT de Chatou de sa demande de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QU’il n’est pas démontré par l’Union Locale CGT de Chatou que les manquements de la SARL Hors Clichés et de la SARL Rail Rest relevés dans l’arrêt soient de nature à porter un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession d’hôtesse de quai (cf. arrêt p. 10 § III) ;

ALORS QUE les manquements de l’entreprise de travail temporaire et de l’entreprise utilisatrice à l’égard des salariés portent une atteinte à l’intérêt collectif de la profession dont le syndicat doit obtenir réparation ; qu’en déboutant l’Union Locale CGT de Chatou de sa demande de dommages-intérêts au motif inopérant qu’une atteinte à l’intérêt collectif de « la profession d’hôtesse de quai » n’était pas démontrée, quand elle sanctionnait notamment par la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée les manquements des sociétés Hors Clichés et Rail Rest envers la salariée, la Cour d’appel a violé l’article L. 411-11 du Code du travail.

Moyens produits -à l’appui du pourvoi incident- par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Hors Clichés.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR CONDAMNE la société Hors Clichés au paiement d’une indemnité de requalification au profit de la salariée ;

AUX MOTIFS, PREMIEREMENT, QUE le motif du recours au deuxième contrat intérimaire est erroné puisque la salariée remplacée avait quitté l’entreprise à la suite de son licenciement ; que cette inexactitude équivaut à une absence de motifs ;

ALORS D’UNE PART, QUE la mention selon laquelle le contrat d’intérim a pour but de remplacer un salarié absent suffit à la régularité formelle du contrat ; que n’est pas inexacte la mention selon laquelle le salarié remplacé était absent, au seul prétexte que cette absence serait définitive ; que la Cour d’appel a violé les articles L. 124-3 et L. 124-4 du Code du travail ;

ALORS D’AUTRE PART QU’une entreprise n’est jamais obligée de remplacer un salarié licencié ou démissionnaire par un autre salarié, l’employeur conservant le pouvoir de réorganiser son entreprise ; que l’entreprise utilisatrice a le droit de suppléer l’absence résultant d’une démission par un contrat intérimaire, pour se donner le temps de la réflexion ; qu’en requalifiant le contrat d’intérim conclu dans ces conditions, et parfaitement valable en tant que tel, la Cour d’appel a violé les textes précités et méconnu l’étendue des pouvoirs de l’employeur ;

AUX MOTIFS, DEUXIEMEMENT, QUE le contrat de mission ne comportait pas mention de la qualification de la salariée remplacée ou embauché ;

ALORS QUE la loi exige la mention des fonctions exercées par le salarié, et non celle de leur qualification, qui résulte des fonctions exercées ; que la Cour d’appel a violé l’article L. 124-4 du Code du travail ;

AUX MOTIFS, TROISIEMEMENT, QUE la transmission tardive du contrat de mission équivaut à une absence d’écrit ;

ALORS QUE faute de constater que la preuve de ce retard prétendu, qui incombe au salarié, a été rapportée, la Cour d’appel a violé l’article 1315 du Code civil ;

AUX MOTIFS, QUATRIEMEMENT, QUE ces irrégularités incombent à l’entreprise de travail temporaire, le recrutement n’ayant ni pour objet ni pour effet de pourvoir un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise ;

ALORS QUE la requalification d’un contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée, prononcée à l’encontre de la société de travail temporaire, n’emporte pas sa condamnation au paiement d’une indemnité de requalification ; qu’en statuant comme elle l’a fait la Cour d’appel a violé, par fausse application, l’article L. 124-7-1 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR CONDAMNE la société de travail temporaire Hors Clichés au paiement de diverses sommes au titre de la prime conventionnelle annuelle ;

AUX MOTIFS EXPRESSEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Mademoiselle X... devait percevoir cette prime conformément aux dispositions de l’article L. 124-4-2 du Code du travail ; que la société Hors Clichés ne peut pas opposer qu’elle l’aurait intégrer e dans le taux horaire, alors qu’elle n’est pas individualisée sur les bulletins de salaire et que de la salariée pouvait légitimement penser qu’elle s’ajoutait au taux horaire ;

ALORS QUE la société Hors Clichés a fait valoir dans ses conclusions devant la Cour d’appel, que le taux horaire de 10,29 euros appliqué aux salariés de la société utilisatrice comme à Mademoiselle X..., incluait la prime conventionnelle annuelle ainsi que le Conseil de prud’hommes l’avait lui même admis (conclusions p. 10 in fine et suivantes) ; qu’en prononçant une condamnation du chef de cette prime, sans vérifier qu’elle n’était pas comprise dans le taux horaire prévu au contrat de mission de la salariée mise à disposition, et appliqué au personnel correspondant de la société utilisatrice, la Cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 140-2 et L. 122-4-2 du Code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR DIT que des sommes étaient dues au salarié à titre de rappel de salaire, de congés payés incidents et de prime annuelle conventionnelle ;

AUX MOTIFS QUE Mademoiselle X... demande un rappel de salaire sur le fondement de l’article L. 124-4-2 du Code du travail, en vertu duquel sa rémunération ne pouvait être inférieure à celle des salariés permanents de la société Railrest ; que les contrats de travail temporaire du salarié précise qu’il était rémunéré sur la base d’un taux horaire de 10,29 euros par heure ; que contrairement à ce que soutient la société Railrest, qui prétend que toutes les hôtesses étaient payées suivant un taux horaire de 10,29 euros, il ressort du contrat à durée indéterminée à temps partiel conclu avec l’entreprise utilisatrice par Mademoiselle X... le 20 août 2003, en qualité d’hôtesse, qu’elle a été rémunérée, à compter de cette date, sur la base d’un taux horaire de 12,57 euros ; qu’il est donc dû à Mademoiselle X... une somme de 554,30 euros à titre de rappel de salaire, et 55,34 euros au titre de congés payés incidents ;

ALORS D’UNE PART QU’en se bornant à constater qu’il résultait du contrat à durée indéterminée à temps partiel conclu par Mademoiselle X... le 20 août 2003 en qualité d’hôtesse qu’elle avait été rémunérée, à compter de cette date, sur la base d’un taux horaire de 12,57 euros, bien que ce contrat ne mentionne aucun taux horaire, et sans expliquer pourquoi les stipulations de ce contrat permettaient de déduire que cette salariée bénéficiait d’un tel taux horaire, la Cour d’appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 122-4-2 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

ALORS D’AUTRE PART QUE le principe d’égalité de rémunération, qui permet notamment d’assurer aux salariés intérimaires une rémunération égale à celle allouée aux salariés de l’entreprise utilisatrice, ne peut s’appliquer qu’entre salariés présents au même moment dans l’entreprise ; que la circonstance que la rémunération d’un salarié, embauché en contrat à durée indéterminée par l’entreprise utilisatrice après avoir fait des missions d’intérim, ait été augmentée, ne suffit pas à caractériser une inégalité de traitement, faute de comparer le taux horaire applicable sur une période identique ; que la Cour d’appel a violé les articles L. 140-2 et L. 122-4-2 du Code du travail ;

ALORS DE TROISIEME PART QUE l’employeur est libre d’augmenter le taux horaire applicable à une catégorie de salariés, à l’occasion de l’embauche de l’un d’eux, sans que cette augmentation confère aux salariés appartenant à la même catégorie la possibilité de réclamer, pour le passé, l’application du taux horaire augmenté ; qu’en statuant comme elle l’a fait la Cour d’appel, de ce chef encore, a violé les articles L. 140-2 et L. 122-4-2 du Code du travail ;

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris du 8 février 2007